Vous vouliez une nouvelle raison de psychoter ? Ne cherchez plus ! Des chercheurs de l’Université de Californie à Santa Barbara ont réussi à « lire » à travers les murs grâce aux signaux wifi. Une nouvelle raison de s’inquiéter pour sa vie privée ?
Courant septembre 2023, les équipes de la professeure Yasamin Mostofi, de l’Université de Californie à Santa Barbara, ont publié un article et une vidéo sur leurs recherches autour des signaux wifi. Ils ont découvert que ces derniers sont capables de lire à travers les murs. Plus précisément, ils ont mis au point une méthode, baptisée « Wiffract », qui rend possible une imagerie de haute qualité d’objets fixes avec uniquement des signaux wifi. Une révélation qui présente de profondes implications pour l’avenir de la communication et de la sécurité sans fil.
Concrètement, leur méthode utilise la théorie de la diffraction (chaque point atteint par une onde se comporte comme une source secondaire) et le principe du cône de diffraction de Keller pour tracer les bords des objets. La technique a également permis, pour la première fois, de « lire » des lettres de l’alphabet à travers les murs uniquement grâce au wifi. Par le passé, des expériences avaient déjà permis de « voir » d’une pièce à l’autre par la technologie sans fil, mais la lecture de lettres, et a fortiori de mots, était jusqu’à présent une tâche jugée trop complexe pour le wifi en raison de détails trop nombreux à prendre en compte.
Tracer le bord des objets plutôt que d’essayer de voir un ensemble
« Imaginer un décor fixe avec le wifi est un défi considérable en raison du manque de mouvement, explique Yasamin Mostofi, professeure en génie électrique et informatique. Nous avons donc adopté une approche complètement différente pour résoudre ce problème difficile en nous concentrant plutôt sur le traçage des bords des objets. »
Et d’ajouter : « Lorsqu’une onde donnée touche le bord d’un objet, un cône de rayons sortants émerge selon la théorie géométrique de la diffraction de Keller, appelée aussi cône de Keller. » En cumulant les cônes et donc les points de contact, l’équipe de scientifiques est donc capable de cartographier peu à peu un objet… et donc de réaliser une sorte de représentation de la pièce et des éléments inanimés qui s’y trouvent. Yasamin Mostofi précise que la méthode Wiffract fonctionne non seulement avec des objets aux contours précis et pointus, mais aussi quand ils ont des contours plus flous et courbes.
L’équipe a créé une vidéo afin d’expliquer comment fonctionne sa « lecture » par ondes wifi. Il faut comprendre que le signal wifi « rebondit » sur les obstacles. C’est pour cela qu’il est nécessaire d’installer des répéteurs dans un logement assez vaste ou aux murs épais. Le réseau wifi ne traverse pas impunément des briques ou de la pierre, par exemple. L’équipe de chercheurs a donc récupéré à son compte ce principe pour analyser sur quoi le signal wifi rebondissait et interpréter les différents points de contact pour les interpréter en formes « lisibles » grâce à un algorithme.
La prochaine étape de travail pour l’équipe de l’UC Santa Barbara sera d’appliquer la méthode Wiffract aux corps en mouvement. Un tout autre défi, car la vitesse de calcul doit être décuplée afin de détecter la forme en temps réel, mais aussi son sens de déplacement. L’orientation des cônes qui interceptent une forme permet de répondre à ce défi.
Aussi intéressante que soit cette découverte scientifique, elle pose néanmoins la question du respect de la vie privée. Les réseaux wifi, d’autant plus s’ils sont publics, sont connus pour leur faible robustesse en termes de sécurité. Si, en plus, ils permettent de « voir » à travers les murs…