Venu présenter Master Gardener de Paul Schrader, l’Américain a profité de son passage à Paris pour donner une masterclass. L’Éclaireur y était, on vous raconte.
T-shirt blanc, casquette sur la tête et lunettes sur le nez, Joel Edgerton arrive sur la scène du cinéma Le Lincoln à Paris sous les applaudissements du public présent. La veille, l’Australien présentait Master Gardener (2023), le nouveau film de Paul Schrader pour lequel il incarne un jardinier au passé trouble. En marge du Champs-Élysées Film Festival, l’acteur et réalisateur donnait donc une masterclass au Lincoln, animée par la journaliste de Cinemateaser Emmanuelle Spadacenta.
Révélé au grand public dans la prélogie Star Wars de George Lucas, Joel Edgerton a accepté de remonter le temps, à l’époque de son enfance dans une petite ville australienne. « On s’ennuyait beaucoup avec mon frère (Nash Edgerton). On était passionnés par les films d’Arnold Schwarzenegger, de ninjas… On a commencé à bricoler des montages, sans savoir que ça allait devenir un jour notre métier. »
Avec tendresse, Joel Edgerton évoque son frère, sa « plus grande inspiration ». « Mon frère a commencé au cinéma comme cascadeur. Parfois il remontait les films dans lesquels il jouait et montrait le résultat aux réalisateurs. C’est comme ça qu’il est devenu monteur, puis cinéaste à son tour. J’admire sa pugnacité et son jusqu’au-boutisme. » Nash Edgerton a notamment réalisé The Square (2008), écrit par Joel.
Révélé par Star Wars
Si Joel Edgerton donnait sa masterclass à l’occasion d’un festival du cinéma indépendant, l’acteur s’est pourtant révélé dans la plus grande saga de science-fiction de l’histoire. Dans l’épisode I et II de la prélogie de Star Wars, l’Australien incarne Owen Lars, demi-frère d’Anakin Skywalker et futur père adoptif de son fils Luke. « C’est toujours drôle d’être ramené sans cesse à Star Wars. Je pense que je n’ai jamais passé aussi peu de temps à l’écran dans un de mes films. »
Pourtant, le rôle de fermier sur Tatooine ouvre les portes d’Hollywood à l’acteur, un rôle qu’il reprendra des années plus tard dans la série Kenobi (2022). « J’ai un peu hésité. Je n’avais pas forcément envie de me replonger dans une époque où j’étais un acteur débutant. Et puis finalement je me suis dit : mais alors qui le fera à ta place ? Donc j’ai accepté, et ça a été un vrai plaisir. »
Loin des fonds verts de Star Wars, Joel Edgerton s’est construit une carrière à mi-chemin entre le cinéma d’auteur indépendant et le grand Hollywood. On l’a notamment vu chez David Michôd (Animal Kingdom), Baz Luhrmann (The Great Gatsby), David Lowery (The Green Knight) ou encore chez Barry Jenkins, pour la minisérie The Underground Railroad. « Ça ne m’intéresse pas de faire des films qui font 350 millions de dollars de recettes la première semaine, et puis que tout le monde oublie par la suite. J’ai récemment revu Le Voleur de bicyclette et c’est ce que je veux toujours faire : des films qui résistent à l’épreuve du temps ». Il confie également ne pas aimer les « crâneurs du cinéma ». « J’aime les réalisateurs qui filment sans artifice ».
Si Joel Edgerton ne nomme pas par politesse les films qu’il regrette d’avoir tourné, l’acteur s’est notamment confié sur le tournage compliqué du film Bright (2017), dans lequel il incarnait un orc aux côtés de Will Smith. « C’était une expérience incroyable devant la caméra, et un véritable enfer quand elle s’arrêtait. J’étais enseveli sous une montagne de prothèses et de maquillage et me sentais complètement prisonnier. Je me rappelle avoir pleuré dans les bras de mon frère un jour, et puis j’oubliais tout dès que l’on commençait à tourner. Jouer devant la caméra procure une dose d’adrénaline incroyable ».
Un réalisateur salué par la critique
Créateur de la société de production Blue-Tongue Company avec son frère Nash et le réalisateur David Michôd notamment, Joel Edgerton mène également une carrière d’auteur. Scénariste sur le western Jane Got a Gun (2015) et le film historique The King (2019), l’Australien avait fait ses débuts dans la réalisation avec The Gift, sorti en 2015. « On retrouve ma plus grande obsession dans mes films : les erreurs qu’un humain peut faire, et ce qu’il fait par la suite. Dans The Gift, le héros retrouve un homme qu’il a fait beaucoup souffrir dans le passé. Pour mon deuxième film (Boy Erased), cette culpabilité est incarnée par le personnage de Nicole Kidman et de ses regrets d’avoir envoyé son fils en thérapie de conversion. »
Ce deuxième long-métrage sur un jeune homosexuel envoyé en hôpital pour « guérir sa déviance » est né d’un coup de foudre. « C’était assez unique pour moi. J’ai découvert le livre de Garrard Conley dont le film est adapté en février, avant de commencer le tournage en septembre. Je n’aurais jamais pensé faire un film sur le sujet avant ça. »
L’acteur a également évoqué Warrior (2011), film de Gavin O’Connor dans lequel il incarne un combattant de MMA opposé à son frère, joué par Tom Hardy. « C’était une expérience de tournage vraiment incroyable, rien n’était laissé au hasard. Le film a été un échec commercial à sa sortie, mais je suis heureux qu’il ait gagné en popularité avec les années ».
Enfin quand un jeune membre du public lui demande des conseils en matière de jeu, Joel Edgerton répond : « La comédie c’est un peu comme le Krav-Maga, un art qui évolue sans cesse pour trouver la méthode la plus efficace. Il faut trouver ce qui marche le mieux pour vous, en sachant que chaque expérience professionnelle est à prendre. Je suis également persuadé que le script est la chose la plus importante pour un film : tu peux faire un mauvais film avec un bon script, mais l’inverse n’est pas possible ».
The Master Gardener de Paul Schrader sortira en salles le 5 juillet prochain, avec Joel Edgerton, Sigourney Weaver et Quintessa Swindell dans les rôles principaux.
