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Les vlogueuses lifestyle, nouvelle forme de propagande nord-coréenne

28 mars 2023
Par Marion Piasecki
Les vlogueuses lifestyle, nouvelle forme de propagande nord-coréenne
©Olivia Natasha-YuMi Space DPRK daily

Ces derniers mois, plusieurs jeunes filles ont publié sur YouTube et TikTok des vidéos de leur vie quotidienne en Corée du Nord.

Quand on entend parler de propagande nord-coréenne dans l’actualité, il s’agit généralement de discours militaire, voire de menaces, à base de vidéos de tirs de missiles et de gigantesques parades. Les étrangers qui y réalisent un reportage ou tournent une vidéo mentionnent tous qu’ils sont accompagnés en permanence d’un guide pour suivre un chemin précis.

Cependant, des chaînes TikTok et YouTube ont récemment attiré l’attention : des jeunes femmes nord-coréennes y parlent de leur vie quotidienne dans ce pays. Vlogs, propagande, ou un peu des deux ?

Sorties au restaurant, au parc d’attractions…

La plus jeune de ces vidéastes est Song A, qui se présente également sous le nom anglais Sally Parks. Âgée de 11 ans, elle s’exprime déjà dans un anglais parfait. Au fil de ses vidéos, elle présente différents lieux de Pyongyang, comme le parc aquatique et le centre des sciences et des technologies. Le ton est assez sérieux, plus proche des vidéos touristiques que des enfants influenceurs.

https://www.youtube.com/watch?v=uWaWNECR9n4
Dans cette vidéo, Song A montre les activités pour enfants dans le Centre des sciences et des technologies de Pyongyang,

Une autre YouTubeuse relativement populaire (18 000 abonnés) est YuMi, qui se donne pour nom anglais Olivia Natasha. Sa chaîne ressemble plus à du contenu lifestyle classique, où elle mange par exemple dans plusieurs restaurants, essaie des vêtements traditionnels, va à la salle de sport et fait même un micro-trottoir pour demander aux gens leurs pronostics pour la Coupe du monde.

Pas de liens avec leurs abonnés

L’existence de chaînes comme celles-ci pose quelques questions. Les Nord-Coréens n’ont pas accès à Internet, uniquement à un intranet national nommé Kwangmyong. Le citoyen moyen n’a donc pas la possibilité de regarder des vidéos sur YouTube et encore moins d’en créer. Song A et YuMi ne sont donc pas aussi ordinaires qu’elles veulent laisser paraître.

Les chaînes elles-mêmes sont un peu étranges : les deux vidéastes ont l’air de réciter un texte, ne donnent pas de liens vers d’autres réseaux sociaux et n’échangent avec les autres internautes. Contrairement aux relations parasociales typiques entre les influenceurs et leurs fans, ici même pas de like ou de réponse aux commentaires et pas de vidéos type FAQ, pourtant assez courantes sur les chaînes de vlog dans les autres pays.

https://www.youtube.com/watch?v=OXdITucYZ5I

Un petit aperçu de la vie en Corée du Nord

Qui se cache donc derrière ces chaînes YouTube ? Selon le site spécialisé NK News, celle de YuMi est gérée par l’entreprise de communication nord-coréenne Sogwang Media Corporation. Quant à Song A, elle est en réalité la fille d’un diplomate ayant travaillé à l’ambassade nord-coréenne de Londres et a grandi là-bas, ce qui explique son niveau d’anglais. Son grand-père est même le vice-ministre des Affaires étrangères.

Par le passé, plusieurs chaînes YouTube s’apparentant à de la propagande nord-coréenne avaient été supprimées par la plateforme, notamment pour respecter les sanctions américaines contre le pays. L’agence Sogwang cherche donc à créer du contenu qui passe plus inaperçu tout en contrant l’image que les Occidentaux ont du pays. Par exemple, la chaîne de YuMi comporte plusieurs vidéos où elle mange des plats et snacks divers et variés alors que, selon l’ONU, près de la moitié des habitants est sous-alimentée.

Les chercheurs préfèrent toutefois que ces vidéos restent en ligne parce que, même si cela reste de la propagande montrant le style de vie des plus aisés, cela donne un petit aperçu de ce qui se passe dans ce pays encore très fermé.

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Article rédigé par
Marion Piasecki
Marion Piasecki
Journaliste