Article

Ethereum après The Merge : et maintenant ?

17 octobre 2022
Par Florence Santrot
Ethereum après The Merge : et maintenant ?
©Hi my name is Jacco/Shutterstock

Un mois après le changement de paradigme du fonctionnement de la blockchain Ethereum, L’Éclaireur fait le point sur les conséquences de cette petite révolution. Et sur les prochaines étapes pour la cryptomonnaie.

« Et nous avons finalisé ! » Ce n’est pas sans fierté que Vitalik Buterin, le cofondateur de la blockchain Ethereum, annonçait sur Twitter que The Merge – la fusion – avait eu lieu jeudi 15 septembre. Ce jour-là, le système de stockage et d’échange de valeur sur Internet, sans intermédiaire centralisé, a changé de méthode de fonctionnement. Plutôt que de reposer sur le principe de « Proof of Work » (PoW, preuve de travail), Ethereum, avec sa cryptomonnaie Ether, a désormais recours à un autre protocole : la « Proof of Stake » (PoS, preuve d’enjeu).

Concrètement, cette mue permet d’éviter de très lourds calculs, extrêmement gourmands en énergie, lors de transactions en Ether, la deuxième cryptomonnaie la plus populaire au monde après le Bitcoin. Avec la PoS, les calculs sont remplacés par la validation d’une transaction par l’entremise d’un riche propriétaire d’Ether – un validateur – qui garantit que vous possédez bien une part de la cryptomonnaie (c’est « l’enjeu »).

Un mois après, quel impact ?

L’objectif premier de The Merge était de réduire la consommation énergétique de chaque transaction. L’Ether n’est pas la première cryptomonnaie à basculer en PoS, mais c’est la plus importante à le faire. Et le bilan est plus que favorable. Les experts s’accordent pour dire que le passage à la PoS a sans doute permis de réduire de 99 % de la consommation d’électricité de la blockchain. Alex de Vries, économiste à l’Université libre d’Amsterdam, estime qu’avec le protocole PoW, Ethereum utilisait autant d’électricité qu’un pays comme la Nouvelle-Zélande. Cette mue technique devrait donc permettre de diminuer l’« empreinte écologique colossale des cryptomonnaies », se réjouit Alex de Vries, qui publie sur son site Digiconomics un index de la consommation d’énergie d’Ethereum.

Après une très forte augmentation de la consommation d’énergie pour Ethereum à partir de 2021 – atteignant jusqu’à 90 TWh par an – elle est aujourd’hui presque nulle.©Digiconomics

Cette révolution pourrait permettre aussi d’attirer de nouveaux investisseurs qui rechignaient jusque-là à acheter des Ether en raison de la pollution induite. En effet, une bonne partie de l’électricité nécessaire aux transactions provient de sources non renouvelables comme le charbon et le pétrole, par exemple. « Au mieux, on estime que les énergies vertes représentent 25 % de la consommation électrique des cryptoactifs. Et c’est sans doute moins en vrai », assure Alex de Vries. Avec une blockchain beaucoup plus verte, certaines réticences pourraient sauter.

Un cours en recul, mais rien de “hors norme”

Depuis un mois, le cours de l’Ether a reculé de 18 % environ. La faute au nouveau protocole ? Rien ne permet de l’affirmer. En effet, en un an, le cryptoactif a perdu 60 % de sa valeur, emporté comme les autres monnaies virtuelles par un « crypto winter », une chute généralisée et très forte des cours. La bascule en Proof of Stake n’avait en tout cas pas pour but de faire rebondir le cours de l’Ether.

En revanche, la PoS a pour effet mécanique d’atténuer l’aspect décentralisé de la monnaie. Auparavant, pour chaque transaction Ether, une opération de « minage » (des calculs mathématiques complexes pour garantir la validité de l’échange financier et l’inscrire dans la blockchain) pouvait être réalisée par quiconque. Il suffisait de disposer d’ordinateurs ou de serveurs avec une puissance de calcul suffisante. En échange, ces mineurs se rémunéraient à chaque transaction. Alex de Vries estime que ces mineurs pouvaient gagner, en cumul, jusqu’à 22 millions de dollars par jour rien qu’avec les transactions Ethereum.

Le risque de la centralisation

Aujourd’hui, ce sont les validateurs qui s’occupent de garantir une transaction. Pour obtenir ce statut, il faut pouvoir gager une somme importante d’Ether. Officiellement, près de 450 000 personnes ont ce statut. Mais le cabinet Dune Analytics a analysé le marché et estime que seulement trois entreprises spécialisées dans l’achat-vente de cryptos (Lido, Coinbase et Kraken) garantissent plus de la moitié des opérations. De plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer cette tendance à la centralisation… à l’opposé du principe initial des blockchains. Un comble.

À lire aussi

Article rédigé par