1. L’icône du cinéma

La carrière d’Alain Delon sur grand écran est immense. Pendant plus d’un demi-siècle, il fascine et façonne le cinéma français, en tournant pour plus de 90 réalisateurs. Sa plus longue collaboration a lieu d’ailleurs avec Jacques Deray : neuf films en tout, dont les succès La Piscine (1969), Borsalino (1970), ou encore Trois hommes à abattre (1980).

Sa carrière au cinéma va de rôles secondaires au début des 1950 à icône du film noir, puis du cinéma français dans son ensemble. Rocco et ses frères (1960) et Le Guépard (1963) de Luchino Visconti ; Le Samouraï (1967), Le Cercle rouge (1970), Un flic (1972) de Jean-Pierre Melville, mais aussi Plein soleil (1960), L’Éclipse (1962), Le Clan des Siciliens (1969), Monsieur Klein (1976) sont autant de succès (et parfois certains échecs) traversés par la grâce de l’acteur, réalisateur et producteur français. 

Son air ténébreux et sa gueule parfaite inspirent et deviennent une référence à l’international. Souvent cité comme modèle important lorsqu’il s’agit du métier d’acteur, Alain Delon se fait plus rare à partir des années 2000, où il retrouve le théâtre et joue dans des téléfilms.

César du meilleur acteur en 1985 pour son rôle dans Notre histoire, il obtient une Palme d’honneur revenant sur l’ensemble de sa carrière en 2019. Au total, Alain Delon a attiré plus de 130 millions de spectateurs en salles, faisant de lui l’un des acteurs ayant le plus rassemblé en France.

2. La passion pour la musique

En plus du cinéma, Alain Delon s’est essayé à la musique. Passionné de chant et rêvant de devenir chanteur — comme il le disait, il est devenu acteur « par accident » —, Alain Delon commence à poser sa voix dans les années 1960 avec le titre Laetitia, pour le film Les Aventuriers (1967).

En 1972, il collabore avec Dalida sur la chanson Paroles, Paroles, qui devient un succès international. L’acteur enregistrera d’ailleurs ce morceau culte en seulement deux prises en studio, après avoir demandé à boire un verre de cognac. Cinq and plus tard, en 1977, il sort Parfum de gitanes, où il récite des poésies de Baudelaire sur des solos de saxophone.

Jusqu’à la fin de sa carrière, Alain Delon revient régulièrement à la musique : en anglais avec I Don’t Know, en duo avec Phyllis Nelson, ou en français avec Comme au cinéma, morceau revenant sur l’ensemble de sa filmographie, mais ne rencontrant pas le succès.

Si sa voix suave a toujours passionné, l’artiste n’a pas eu la même consécration dans le monde de la musique que dans celui du cinéma. En 2019, tout de même, il signe un dernier projet artistique et utilise une nouvelle fois sa voix grave pour accompagner le morceau de Julia Paris intitulé Je n’aime que toi.

3. Un passé de « truand »

Pendant une grande partie de sa carrière, Alain Delon gagne en réputation en incarnant des rôles de malfrats et de truands. Dans Le Samouraï, il devient un tueur à gage solitaire, avant d’incarner un membre de la pègre marseillaise dans Borsalino et sa suite, Borsalino and Co (1974). L’air ténébreux et taciturne, Alain Delon excelle dans le genre — à l’inverse de la comédie — et se spécialise dans ce type de rôles.

Ces films lui rappellent alors sa jeunesse, puisqu’il aurait fréquenté quelques cercles peu recommandables, avant de s’engager dans l’armée à 17 ans et de partir pour la guerre d’Indochine. Il avouera d’ailleurs en interview tout devoir à sa formation militaire, après être passé par les bancs de plusieurs pensionnats. 

Plus tard, il change de registre et passe de « l’autre côté » en incarnant des policiers, avec au moins six films contenant le mot « flic » dans le titre : Un flic (1972), Il était une fois un flic (1972), Flic Story (1975), Pour la peau d’un flic (1981), Parole de flic (1985) et Ne réveillez pas un flic qui dort (1988). À chaque fois, l’acteur reconnait que le choix du titre concernait avant tout des raisons commerciales.

4. Belmondo, Gabin, Bardot… Des liens amicaux et artistiques forts

La vie d’Alain Delon est aussi faite de rencontres et de collaborations. Tout au long de sa carrière, l’acteur côtoie des réalisateurs emblématiques, et fait ses premiers pas devant leur caméra aux côtés de partenaires de jeu l’ayant inspiré et poussé à progresser.

Il voue ainsi un immense respect à René Clément, qui lui offre son grand premier rôle dans Plein Soleil (1960), et gardera une relation particulière avec Luchino Visconti, Henri Verneuil, Jean-Pierre Melville, ainsi que Jacques Deray, et ce jusqu’à leur disparition. 

À l’écran, Alain Delon à l’occasion de rencontrer une de ses idoles, Jean Gabin, dans le film Mélodie en sous-sol (1963). Il entretient également une profonde amitié et complicité avec Jean-Paul Belmondo tout au long de sa vie, les acteurs ayant souvent été comparés l’un à l’autre depuis le tournage du film Borsalino (1970), et ce jusqu’à leur dernière collaboration, 1 chance sur 2 (1998) de Patrice Leconte.

Par la suite, Alain Delon rencontrera Brigitte Bardot en 1961. Si au départ, les deux acteurs ne s’apprécient pas, une amitié de 65 ans naîtra sans « qu’il ne se passe jamais rien », confie l’acteur en préface dans la biographie Alain Delon, Amour et mémoires (Martinière). Avec Romy Schneider par contre, qu’il rencontre en 1958, c’est une toute autre histoire.

50 ans de collaboration et de rencontres ont marqué la vie d’Alain Delon, qui a d’ailleurs du mal à revoir ses films et à constater la disparition d’anciens amis. Lors de la projection au Festival de Cannes de la copie restaurée du Guépard, il déclare en larmes à la fin de la projection à Claudia Cardinale : « Tu as vu ? Ils sont tous morts ».

5. Entre amour et haine

Tout au long de sa vie, l’acteur a également été célèbre pour ses nombreuses histoires amoureuses, ayant marqué les tabloïds et les époques. Avec Romy Schneider, de 1958 à 1963, ils forment ainsi un couple mythique du cinéma jusqu’au sulfureux et culte La Piscine. Malgré leur séparation, les deux acteurs resteront proches, et Alain Delon avouera avoir été dévasté par la disparition brutale de l’actrice en 1982.

Lors de l’enregistrement de Paroles, Paroles, il partage une courte histoire avec Dalida avant d’épouser Francine Canovas, qui devient Nathalie Delon en 1964. Le couple divorcera quelques années après la naissance de leur enfant, Anthony. L’acteur rencontrera, par la suite, Mireille Darc, avant de se séparer après 15 ans de relation. Cette dernière sera l’une de ses plus grandes histoires d’amour, avant celle que l’icône du cinéma français entretiendra pendant plus d’une décennie avec la mannequin, Rosalie Van Breemen. Une relation dont naîtront les deux derniers enfants d’Alain Delon : Anouchka, à qui il voue une adoration sans bornes, et Alain Fabien.

Alain Delon a toujours eu un rapport particulier avec ses enfants, reconnaissant notamment avoir été dur avec Anthony durant son enfance. Le père et son fils ont toujours eu une relation conflictuelle, entre amour et haine, entre déclarations publiques tendres, et procès en justice pour une histoire de blouson en cuir. Dernier pan d’un volet judiciaire : la bataille médiatique liée à l’héritage de Delon ayant opposé, ces derniers mois, les trois enfants de l’acteur, dont le décès semble avoir tout balayé. C’est d’une voix unie qu’ils ont annoncé la disparition tragique de la star aux yeux bleus perçants, adulé des femmes et des spectateurs.

En 2019, lorsqu’il recevra d’ailleurs une Palme d’honneur au Festival de Cannes, il la dédiera avant tout au public, estimant que c’est seulement grâce à lui qu’il est devenu « une star ». Mais bien plus qu’une star, Alain Delon était une icône.