Sacrée artiste musicale de l’année 2023 aux Tik Tok Awards, Lyna Mahyem transmet les émotions comme personne dans sa musique. Nous avons eu l’occasion de la rencontrer pour la sortie de la deuxième partie de son double album, « Mon Ame ». Entretien avec une artiste accomplie et déterminée.
Quel est votre premier souvenir marquant avec la musique ?
C’est ma reprise de Booba, 92i Veyron, qui a été vue plusieurs millions de fois. Déjà, d’atteindre juste quelques milliers de vues, c’était juste énorme pour moi. Mais là, à cette époque, on était plutôt à 1 million de vues en plus chaque jour. C’est un souvenir marquant parce que ce sont des scores que je n’avais jamais atteints auparavant.
Vous attendiez-vous au succès de ce titre ?
Non, pas du tout. Cela avait vraiment pour but d’alimenter mes réseaux sociaux et c’était un titre du moment que j’écoutais sur le chemin du travail. Franchement, c’était le premier titre que j’enregistrais et que je mettais sur les réseaux. Avant, j’y mettais plutôt des petites vidéos, des freestyles, des reprises que je filmais dans ma chambre. Je n’avais pas forcément de pression parce que je ne m’y attendais pas, tout simplement.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de chanter ?
Je suis passionnée de musique, donc je suis une passionnée de chant. Je chante depuis mon plus jeune âge. Mais ce sont surtout mes copines qui m’ont poussée à me dévoiler sur le net. Elles voyaient le potentiel que je pouvais avoir. Elles m’ont dit: “Ça mérite d’être vu par d’autres personnes aussi passionnées que toi. Lance-toi ! Fais tes vidéos ! Ca ne coûte rien.” Et en effet, cela ne nous a pas coûté grand-chose, mais au final, cela m’a permis de savoir quelle artiste je suis aujourd’hui.
C’est à travers Femme forte que l’on a pu réellement vous découvrir. Qu’est-ce que vous avez retenu de cet album ?
La grosse pression, beaucoup de larmes, beaucoup de joie, des cheveux blancs, beaucoup de stress. Je pense que c’était quand même un bon stress. C’est une expérience que je ne connaissais pas. LM, mon premier album, n’était pas sorti dans les meilleures conditions, dira-t-on. En l’occurrence, c’est Femme forte que je considère vraiment comme mon premier opus. C’est là que je me suis vraiment rendue compte de toute l’énergie que j’avais mis dedans, de tout mon investissement personnel. A cette époque, on consommait la musique différemment et je ressentais beaucoup d’appréhension. Désormais, même si cela me tient toujours à coeur de concevoir un album, on sait que désormais ce sont les singles qui fonctionnent le mieux.
Que pensez-vous justement de la consommation rapide de la musique aujourd’hui ?
C’est dommage mais je pense qu’il y a une autre étude à faire pour savoir pourquoi on consomme la musique aussi rapidement ? On a même des formats speed up (musique accélérée). Et pourtant, c’est dommage de ne pas prendre son temps. La musique, c’est un partage, la confession de l’artiste qui nous chante des mots qui peuvent nous ressembler ou nous parler, tout simplement.
Vous avez marqué les esprits avec Demain, un véritable hit. Quel a été l’impact de ce morceau sur votre carrière ?
C’était la première fois où je parlais réellement d’amour dans un morceau. C’était la première fois où je dévoilais un petit peu mes sentiments, où je faisais un petit peu” la loveuse”. J’étais sûre de ce titre-là. Je savais qu’il allait connaître un succès incroyable. Et ça a été le cas… mais en deux temps ! En effet, une trend a été lancée par Hana Nice, une créatrice de contenu, qui a lancé sur le titre une petite chorégraphie, devenue totalement virale. Cela a permis de redonner un second souffle à Demain, qui avait été créé en 2019.
Vous faites donc votre retour avec l’album intitulé Mon âme, un nom qui semble très significatif. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous avez choisi ce titre ?
J’ai abordé des thématiques que je n’avais pas forcément abordées dans mes précédents albums et j’ai eu comme cette impression de m’être livrée beaucoup plus. Cela m’a pris quand-même deux ans pour créer ce projet. Des insomnies, du stress, de la remise en question, de la maturité, de la résilience… On a assemblé toutes ces choses-là pour dire que j’ai puisé au fond mon âme.
C’est un double album et la seconde partie, sortie le 31 mai, possède un côté plus festif, plus léger que la première, qui était plus mélancolique. Etait-ce un choix de distinguer ces deux parties ?
Très bonne analyse, parce que c’est exactement ça. Cela reflète la personne que je suis. Comme tout le monde, j’ai mes côtés un peu plus mélancoliques, un peu plus calmes. On a tous envie de parfois passer du temps tranquillement mais aussi, à d’autres moments, de faire la fête, de s’amuser d’être entouré, et de partager des good vibes. Le double album reflète ces deux aspects qu’on possède tous.
Ce projet est-il le plus personnel de votre carrière ?
Exactement. Après, je ne sais pas ce que je ferai à l’avenir. En tout cas, jusqu’à présent c’est le projet le plus personnel que j’ai pu faire.
Vous êtes souvent considérée comme une grande sœur par les nombreuses jeunes femmes qui écoutent votre musique. Quels sont les messages que vous souhaitez véhiculer ?
Franchement, si elles me considèrent juste, c’est déjà gagné pour moi. Parce qu’aujourd’hui, les gens ne considèrent plus trop les autres. Même si on me connaît malgré la barrière des réseaux sociaux, on ne me connaît pas forcément dans la vie de tous les jours. Mais je reste accessible. Maintenant, si on me considère comme une grande sœur, c’est en effet, comme vous l’avez dit, un message que je véhicule. Je suis archi-protectrice dans la vie de tous les jours. Je suis super bienveillante avec ceux qui m’écoutent, comme avec mon entourage proche ou mon entourage tout court. C’est vraiment ce que je souhaite transmettre, la bienveillance.
Vous collaborez dans ce nouveau projet avec Bryan MG, Nassi et Numidia Lezoul…
Ce sont des artistes que j’apprécie. Donc ça allait de soi. Tout simplement, on n’a pas réfléchi. On s’est croisés au studio pour certains, et certains que j’ai appelés. On a travaillé ensemble parce qu’il y a une véritable réciprocité. La musique, ce n’est pas des mathématiques. “Moi, j’adore ce que tu fais et tu adores ce que je fais ? Travaillons ensemble et partageons nos univers !”. C’est là où ressort vraiment toute l’authenticité de deux personnes, deux artistes, deux âmes.
Vous avez des inspirations diverses. Qu’est-ce qui vous a poussée à vouloir autant vous diversifier ?
Tout simplement parce que je déteste être redondante. Je n’aime pas du tout retourner sur mes pas. J’aime bien prendre des risques, innover, chercher la nouveauté, découvrir d’autres fronts… Et c’est ce qu’on a fait. J’ai été accompagnée de compositeurs de talent tels que Sino, Heaven Sam, Young Bouba… Ils m’ont tous permis de me renouveler et de sortir de ma zone de confort. Et je pense que ça, c’est important dans la carrière d’un artiste.
Est-il difficile de se faire une place dans ce milieu quand on est une femme ?
Oui, je trouve que c’est compliqué. Ça l’est un peu moins aujourd’hui car le milieu s’est démocratisé. Les femmes ont beaucoup plus la parole dans le domaine de la musique même si on est encore, par moments, négligées sur certains points.
Récemment, vous avez réalisé votre Planète rap à Argenteuil, la ville où vous avez grandi. Pourquoi était-ce si important de délocaliser l’émission ?
Tout démarre de là ! C’était mon premier Planète Rap en huit ans de carrière, donc c’était important pour moi de le faire là-bas. Ce fut symbolique. On a démarré dans la cuisine de mes parents. J’avais envie de partager ça avec tous ceux qui m’ont vue grandir, les grands de chez moi, ceux qui m’ont vue faire mes premiers pas dans la musique… En l’occurrence, je pense particulièrement à Figtou, qui m’a donné accès à mon premier studio, mes premiers ateliers d’écriture… Et vivre ça avec eux, c’était symbolique, tout simplement.
Vous parlez de vos ateliers d’écriture. Ecrire, qu’est-ce que cela représente pour vous ?
C’est vital ! Aujourd’hui, j’ai même du mal à déléguer l’écriture à quelqu’un pour mes chansons. Je pense que je suis la personne la plus à même de me raconter et je m’inspire de tout ce qui peut m’entourer. J’écris à partir des choses que j’ai vécues, que ma voisine a vécues, que ma sœur a vécues, qu’une amie a vécues… Je suis un peu le haut-parleur de toutes ces personnes-là. Mais j’écris pour d’autres artistes aussi. L’écriture me permet d’être à l’écoute. L’écriture est une force.
Et vous n’avez jamais eu peur du syndrome de la page blanche ?
Non, je pense qu’on est assez nombreux dans ma tête. Donc, je ne pense pas que ça risque d’arriver.
Vous serez au Zénith de Paris le 10 novembre. Quel est votre rapport à la scène ?
Je préfère la scène au studio. C’est là où je rassemble tout l’amour, toute l’énergie que je peux procurer au public. C’est un échange de bons procédés : « Je vous offre des musiques et vous, quand on est sur scène et que vous chantez mes sons à l’unisson, vous me rendez de l’énergie. » D’être sur scène, c’est mon moment à moi ; j’oublie tout. Je peux être malade, je peux vivre des moments tragiques. Mais face au public, j’oublie tout. C’est magique. J’y passe les plus beaux jours de ma vie.
Est-ce que vous pensez déjà à votre prochain projet ?
Oui, je suis une machine, Là, on est en full promo, donc c’est vrai que je n’ai pas forcément le temps d’avoir mes petites séances studio qui me manquent énormément d’ailleurs. J’en ai des choses à raconter.