Critique

Hyperdrama de Justice : que vaut le dernier album du duo électro ?

27 avril 2024
Par Benoît Gaboriaud
Hyperdrama de Justice : que vaut le dernier album du duo électro ?
©André Chémétoff

Daft Punk n’est plus, vive Justice ! Grâce à eux, la French Touch perdure. Après huit ans d’absence des platines, le tandem de musique électronique que la Terre entière nous envie revient avec Hyperdrama, un quatrième album inspiré et jouissif. Un must !

L’inquiétude était à son comble ! Après la séparation des Daft Punk, le long silence de Justice suscitait quelques angoisses. Enfin, le duo français vient le rompre avec Hyperdrama. Leur meilleur album ? Pas loin. En tout cas, il s’agit assurément d’un concentré de tubes.

Formé en 2003 par Gaspard Augé et Xavier de Rosnay, sur le label Ed Banger Records créé par Pedro Winter, Justice ne surprend pas, mais revient au sommet et en bonne compagnie. À l’affiche d’Hyperdrama : un casting hors pair et pointu constitué de Tame Impala, The Flints, Connan Mockasin, Miguel et Thundercat. 

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Un show prometteur

Avant même l’heure de la sortie dans les bacs d’Hyperdrama, Justice a entamé les festivités au Coachella Festival, en Californie, histoire de prendre la température. Verdict : la presse et le public américain ont été conquis ! The New York Times n’a pas tari d’éloges, évoquant notamment « l’un des groupes live les plus excitants au monde« .

Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un coup d’œil à la captation du nouveau titre One Night/All Night, visible sur la chaîne YouTube du groupe. Le show constitue une pierre majeure de l’édifice de leur carrière live phénoménale, déjà récompensée par le Grammy 2019 du meilleur album électronique pour le live-album Woman Worldwide. Cette performance initie une tournée mondiale qui passera par de nombreux festivals en Amérique et en Europe, et qui se clôturera à Paris par deux Accor Arena en décembre prochain.

Mi-humain, mi-machine

Avant la fête, la foule, les strass et les paillettes mérités, Justice s’est enfermé dans sa maison-studio bien cachée quelque part dans Paris. C’est ici, durant une longue période entrecoupée par la crise de Covid-19, que Gaspard Augé et Xavier de Rosnay ont expérimenté de nouvelles voies et voix pour façonner Hyperdrama, présenté comme une version augmentée de l’âme humaine, dans laquelle la joie, la colère et la tristesse sont exacerbées, mais sincères. 

Bien sûr, on retrouve dans Hyperdrama l’essence de la musique du duo : un savant mélange de touches disco hédonistes – qui rythment notamment l’excellent titre d’ouverture Neverender – et d’ambiances sonores plus agressives, issues du gabber ou de la techno hardcore, présentes dès Generator, le second titre particulièrement puissant. À elles seules, les deux premières pistes résument efficacement l’esthétique musicale de Justice, que le groupe a su peaufiner durant plus de 20 ans. Le disque démarre donc sur les chapeaux de roue, propulsant l’auditeur au sommet du savoir-faire du duo. Mais celui-ci relâche la pression assez vite et dévoile de nouveaux horizons et quelques surprises, comme des featurings : une première dans sa carrière.

Des voix de tête

Tous les artistes invités ont un point en commun : ils écrivent, composent et souvent produisent leur musique en totale autonomie. En premier lieu : Tame Impala, le projet musical psychédélique de Kevin Parker. L’artiste australien magnifie Neverender et One Night/All Night, un single redoutable aux accents rave. Connan Mockasin, lui aussi musicien de pop psychédélique originaire de la même partie du monde, plus exactement de Te Awanga en Nouvelle-Zélande, vient poser sa voix satinée sur Explorer

Coup de cœur déniché par Pedro Winter, la chanteuse néerlandaise RIMON – qui secoue actuellement la scène RnB – apporte ce qu’il faut de sensualité à Afterimage, un titre éthéré mais énergique, parfait pour clôturer une soirée sur les dancefloors, à l’instar de Mannequin Love, sur lequel résonnent les voix de tête gorgées de groove de The Flints. Ce morceau est une belle mise en lumière de ce groupe assez méconnu chez nous, formé par les jumeaux anglais et surdoués George et Henry.

Visiblement, Justice a désormais un penchant pour les envolées lyriques vers les aigus, en témoigne à nouveau The End, agrémenté de la voix de l’artiste californien Thundercat, et Saturnine, dans lequel se démarque Miguel grâce à un falsetto digne de celui de Prince. Force est de constater que toutes ces voix assez homogènes et haut perchées insufflent à ces nouveaux morceaux une sensualité et une humanité bienvenues.

Quand ils en sont dépourvus, ils manquent d’éclat, comme Dear Alan ou Muscle Memory, un peu mous et dispensables. En revanche, Moonlight Rendez-Vous, sorte d’interlude, surprend par son côté jazzy crépusculaire et apporte une belle respiration.

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