La chanteuse vient de sortir son onzième album. Avec cette nouvelle création musicale, Taylor Swift offre une œuvre profonde et touchante, totalement en accord avec son évolution artistique.
Annoncé lors des derniers Grammy Awards, le onzième album de Taylor Swift, The Tortured Poets Department, est disponible depuis ce 19 avril 2024 dans les bacs. Véritable œuvre cathartique comme elle a l’habitude d’en faire, TTPD (pour les intimes) est surtout une démonstration totale du talent d’autrice de Taylor Swift. Avec ses 31 morceaux, elle confirme sa plume aboutie et atteint une nouvelle ère dans sa carrière. Retour sur un album de musique qui fera date et qui pourrait bien être l’un de ses meilleurs.
The Tortured Poets Department, comme dévoilé initialement, devait contenir 16 morceaux et s’inscrivait dans une continuité artistique après le synthétique Midnights, son album sorti fin 2022.
Taylor Swift s’est ainsi entourée de ses deux récents collaborateurs : Jack Antonoff et Aaron Dessner, fondateur et membre du groupe The National. Surprise lors de la sortie, Taylor Swift annonce que TTPD est en réalité un double album et dévoile 15 autres pistes inédites, pour un total faramineux de 31 chansons, toutes écrites, composées et interprétées par l’artiste.
The Tortured Poets Department : la force du texte
The Tortured Poets Department se présente comme une succession de poèmes mis en musique et en rythme, traitant de différents sujets. Puisque la poésie est au cœur de l’album, aucune surprise, dès lors, de constater à quel point Taylor Swift à écrit, écrit et écrit.
Le disque est très verbal. Plus que ses autres chansons, les titres de TTPD osent poser de longues phrases, sans s’obliger à respecter les constructions classiques et attendues des chansons. En réalité, Taylor Swift raconte des histoires, ses histoires, toujours à sa façon. À partir de là, deux albums semblent coexister en un et, par certains aspects, The Tortured Poets Department porte également la marque des deux autres collaborateurs de Taylor Swift. Jake Antonoff d’un côté, qui signe des morceaux plus rythmés, et Aaron Dessner de l’autre, qui pousse l’art de Taylor dans ses plus beaux retranchements, avec des envolées lyriques et mélodieuses splendides.
31 morceaux et une rage mais aussi une résilience et une acceptation incontestables de la part de Taylor Swift face à son passé. The Tortured Poets Department est l’album de la maturité d’une certaine façon. Elle l’explique en le présentant : il ne s’agit ni de se venger, ni d’ouvrir de vieilles blessures, mais de transformer un passé en œuvre artistique pour avancer, tout en le partageant.
Mieux encore, loin de seulement concerner ses anciennes relations – comme souvent dans sa discographie – TTPD est un album infiniment et profondément personnel, dans lequel Taylor Swift questionne sa propre célébrité, son existence et son évolution en tant que femme et artiste. Point culminant de 10 albums, de 10 ères musicales différentes, The Tortured Poets Department s’affirme comme son propre objet, tout en mélangeant des styles et thèmes déjà abordés.
La conclusion de Folklore et d’Evermore ?
Avec Folklore et Evermore en 2020, Taylor Swift a en effet réussi une transition douce et mélodieuse dans un genre plus onirique, moins porté sur la country de ses débuts ou sur la pop. The Tortured Poets Department vient conclure la trilogie, surtout grâce aux 15 morceaux surprises dévoilés le jour même. Comme si Taylor Swift offrait deux suites. La première à Midnights, la seconde à Folklore et Evermore.
Le style Aaron Dessner, sur les chansons où il est crédité, y est pour beaucoup. Grâce à ses mélodies harmoniques, bercées par la voix de l’artiste, et ses textes poétiques, plusieurs chansons s‘imposent instantanément : The Smallest Man Who Ever Lived, The Black Dog, The Albatros, Robin ou encore The Prophecy.
Avec Clara Bow, elle fait un pont entre les icônes Clara Bow, Stevie Nicks et elle-même… Avec Fortnight et Florida!!!, Taylor Swift invite Post Malone puis Florence and the Machine à amener leur propre style dans l’album avec deux titres entraînants se démarquant. Enfin, avec The Manuscrit, dernière piste de l’album, elle referme sa nouvelle œuvre avec une grâce et une portée digne de ses plus grandes créations.
The Tortured Poets Department est peut-être l’album le plus « Taylor Swift » de Taylor Swift. Ou plutôt, de la nouvelle Taylor Swift, qui ne s’excuse plus de ce qu’elle est ou de ce qu’elle a accompli, consciente de son héritage, et toujours habitée par cette volonté absolue de faire une musique authentique et personnelle. Traitant autant des cœurs brisés et des trahisons, que des joies ou de l’espoir, TTPD est une véritable consécration et Taylor Swift monte d’un cran.
Par sa construction musicale, narrative et même visuelle, The Tortured Poets Department mélange différentes inspirations, convoque des figures et un temps du passé tout en se teintant d’une douce mélancolie.
Le titre en lui-même permet à Taylor Swift de crier au monde son envie d’être reconnue à sa juste valeur, comme une autrice à part entière, une écrivaine, une poétesse. Avec une belle dérision, elle mentionne également sa récente relation avec le joueur de football américain Travis Kelce dans So high School, tout en mettant en avant leurs différences et son amour de l’art : « You know how to ball, I know Aristotle », avant de consacrer une chanson à Cassandre (capable de voir l’avenir mais jamais crue). Une envie constante de figurer dans le cercle des poètes torturés que Taylor Swift cultive depuis des années et affirme enfin complètement. Elle a gagné avec force une légitimité incontestable.
The Tortured Poets Department est un album plein de mystères et de secrets. Chaque nouvelle piste écoutée offre un voyage au cœur du passé de Taylor Swift – certaines chansons répondent directement à des anciens titres – ou dans ses thématiques et ses obsessions récurrentes. Mais c’est avant et surtout une invitation à la suivre dans l’exercice de son art, qu’il soit musical ou littéraire.
En une seule écoute, l’album fait déjà preuve d’une complexité et d’une richesse incroyable. Une seule envie : se plonger dans les mots, analyser les virgules, comprendre le sens caché des phrases et continuer de rêver et d’avancer, grâce à la profondeur assumée d’une artiste en perpétuelle évolution.