Rugueux duo guitare/batterie au son brut il y a une vingtaine d’année, The Black Keys a rejoint au fil des ans la cour des grands du rock mondial, en prenant le soin d’étoffer son line-up si nécessaire. Des influences musicales XL qui les nourrissent depuis leurs débuts (indie rock, blues, americana, soul, country, funk, hip hop…), on avait tout juste rangé le précédent (« Dropout Boogie ») que les voilà déjà de retour avec un 12e LP, « Ohio Players ». Du coup, on a rallumé la platine.
Jamais à court d’énergie et d’humour, le désormais ultra-célèbre duo d’Akron (Ohio) rempile donc pour un nouveau tour de piste. Un copieux programme musical en 14 titres dont le titre rend directement hommage au groupe Ohio Players. Une forme de clin d’œil cocasse et malicieux à ce monument du funk originaire du même Etat qu’eux et qui a fait les beaux jours (et surtout les nuits) des dancefloors au cœur des Seventies.
Si on sait les deux compères de Black Keys (Patrick Carney & Dan Auerbach) éclectiques et fins connaisseurs de musiques au sens large, que celles et ceux qui se posent la question d’un album orienté disco-funk se rassurent : nos deux énergumènes n’ont pas pour autant réglé le curseur sur le genre musical pré-cité. Les Black Keys font du rock, à leur façon, et l’assument parfaitement.
Vous retrouverez dans ce généreux LP tout ce qui fait la marque de fabrique du groupe : des riffs et une énergie à l’efficacité redoutable (Live Till I Die), une écriture imparable et groovy qui vous harponne dès les premiere notes (Beautiful People), des glissades soulfull comme cette belle reprise de William Bell (I Forgot To Be Your Lover) et des emprunts savamment dosés à la culture hip-hop (Candy & Her Friends/Paper Crown)
Ajoutez à cela un son gonflé et enveloppant, ni trop retro, ni trop moderne. D’étroites collaborations avec des musiciens bien sentis, et vous voilà avec ce qui pourrait bien être encore une fois un futur best-seller de cette incomparable paire de musiciens.
Les influences… « Last Night A DJ Save My Life »
Une question reste en suspend malgré tout. Si ce n’est l’aspect “régionaliste” de la référence aux musiciens de l’Etat qui les as vus naître (l’Ohio donc, c’est bon vous suivez ?), pourquoi faire référence aux auteurs du tubesque Love Rollercoaster ?
Pour la guitare à deux manches de Leroy « sugarfoot » Bonner sur laquelle Dan Auerbach louche depuis qu’il est môme ? Pour les chorégraphies virevoltantes ? Pour les costumes en polyester et les chemises à paillettes de ces extravagants et talentueux musiciens ou pour cet esprit « rieur » que revendiquait et défendait cet incroyable combo ?
La réponse est donnée dans une récente interview des Black Keys. Il s’agit donc surtout de l’esprit festif que cette formation afro-américaine typique des Seventies incarnait. Car la principale inspiration pour ce nouvel opus est à chercher du côté de ces DJ sets que le duo a pris l’habitude de donner en club après leurs concerts.
Dan Auerbach : “La grosse inspiration pour cet album à été d’embarquer nos vieux 45 tours pendant qu’on était en tournée et les jouer dans différents endroits, de voir comment les gens réagissaient aux titres qu’on était en train de passer.”
Patrick Carney : “L’idée, c’est d’avoir toujours en tête le côté fun de faire de la musique. C’est un album pour faire la fête. Quand tu passes des disques en club, tu perçois en direct si un titre est bien accueilli ou pas, si tel groove ou tel genre de vibration fonctionne sur les gens. On a construit l’album un peu comme ça.”
Ohio Players : les copains d’abord
Marrant de revendiquer en pleine pochette son origine géographique quand on sait qu’aujourd’hui, la base arrière, c’est cette capitale musicale légendaire qu’est Nashville, dans le Tenessee. Dan Auerbach y a monté il y a quelques années maintenant son studio et son propre label, Easy Eye Sounds. C’est là que l’album Ohio Players a été enregistré en partie. Qualifier le chanteur /guitariste des Black Keys d’hyperactivité semble être le minimum que l’on puisse faire pour définir l’implication de ce musicien/producteur dans le paysage musical actuel.
Entre son travail de producteur, d’arrangeur et de musicien pour ses propres projets ou ceux qu’il accompagne avec sa structure (Robert Finley, Britty, Hermanos Guiterrez, Hank Williams JR, Shannon & The Clams, Jon Muq…), il a donc trouvé le temps d’attraper son vieux camarade de jeu pour remettre une pièce dans le jukebox et repartir à l’assaut des routes du rock avec un nouvel album. Puisqu’on cause camaraderie, vous noterez bien la présence de quelques têtes connues au programme d’Ohio Players : Beck, Dan The Automator, Noel Gallagher, Leon Michels (El Michel’s Affair), Tom Brenneck (Menehan Street Band) et le magistral Kelly Finnigan échappé des Monophonics.