A l’échelle des grandes nations, Haïti est un pays minuscule de 27750 km². Le rayonnement culturel international de peintres, de chanteurs ou encore d’écrivains originaires de la perle des Antilles, de Basquiat à Dany Laferrière en passant par Wyclef Jean, n’en est que plus remarquable.
Haïti, une culture très riche
Haïti, ce pays de moins de 12 millions d’habitants, baigné par l’Océan Atlantique et la Mer des Antilles, fait souvent l’actualité pour de biens tristes raisons. On pense aux séismes meurtriers, aux tempêtes dévastatrices ou encore à la situation politique particulièrement instable et à la mainmise de gangs.
Mais Haïti c’est aussi une terre riche par sa culture et par son rayonnement. On connait souvent la culture haïtienne par sa peinture avec notamment l’Art naïf, par sa musique avec notamment le Compas qui a inondé les Antilles dans les années 70, ou encore par sa littérature avec des noms aussi connus que Jacques Roumain (et son fameux Gouverneur de la Rosée) ou le poète René Depestre ou encore le brillant et regretté Jacques Stephen Alexis.
Mais même si ces différents modes d’expression méritent le respect, l’art haïtien ne se limite pas à cela. Haïti regorge de sculpteurs et plasticiens de talent (Edouard Duval-Carié, Tessa Mars, Patrick Vilaire, Serge Jolimeau, etc.) dont les œuvres sont exposées dans les plus grandes galeries de la planète, mais aussi de grand écrivains comme Yanick Lahens (Prix Femina 2014), Dany Laferrière, prix Medicis 2009 et membre de l’Académie Française ou Lionel Trouillot. Sans oublier une scène musicale hip hop très dynamique.
Une communauté très implantée aux USA
Mais l’influence d’Haïti dans la culture moderne se traduit aussi par l’explosion de la représentativité de la diaspora. Le pays a connu après la première guerre mondiale de nombreuses vagues d’immigration et les USA ont toujours été une terre d’asile privilégiée pour les candidats à une vie meilleure.
En ce qui concerne l’émigration haïtienne, les causes sont multiples : difficultés économiques, dictature de Duvalier père puis de Baby Duvalier, chaos politique et violence des gangs, catastrophes naturelles à répétition, taux de chômage dépassant les 30%, etc. On retrouve notamment des communautés haïtiennes importantes dans les Antilles francophones, en Martinique et en Guadeloupe essentiellement.
Mais pour des raisons historiques, c’est vers les USA que les plus grandes vagues ont été observées. Des communautés haïtiennes sont ainsi nées à New York, Miami, Chicago, etc. On en retrouve d’ailleurs la trace, pour les connaisseurs, dans le nom de grands groupes de Compas de la grande époque, comme les Volo Volo de Boston, Accolade de New York, Afro Combo de Boston, Skah Shah de New York.
Aujourd’hui, plus de 800.000 personnes vivant aux USA se déclarent d’ascendance haïtienne, ce qui en fait de loin la plus grande communauté haïtienne hors du pays. Il n’est donc pas si étonnant de retrouver des Haïtiens de première, seconde ou troisième génération dans tous les milieux, mais ils sont tout particulièrement présents dans la culture. Il y a de multiples raisons à cela, mais deux me viennent plus volontiers à l’esprit :
– Haïti est une terre où de nombreuses cultures se sont mélangées ou télescopées, depuis les premiers indigènes (des Indiens) jusqu’aux colons blancs en passant par les esclaves noirs amenés pour le travail des champs. On retrouve d’ailleurs l’apport de ces différentes vagues dans la richesse du créole haïtien. Par ailleurs, si on a plutôt en tête des images tragiques du pays, il faut savoir qu’il regorge de paysages splendides et de lieux chargés d’histoire. Quel meilleur terreau pour une expression culturelle ?
– Dans un pays qui a connu une histoire difficile, la culture fait figure de moyen d’expression ultime. Par la peinture, par la littérature, par la musique, les artistes haïtiens expriment leurs souffrances, leurs rêves, leurs frustrations, leur quotidien mais aussi l’amour du pays et la nostalgie.
C’est très vrai en musique, on ne compte plus les titres de compas ou d’autres styles musicaux en vogue faisant référence à « Haïti Chérie », « Haïti perle des Antilles », Haïti qu’on ne pourra jamais oublier ou encore à un retour fantasmé au pays.
Une diaspora très active
Parmi les stars d’origine haïtienne ou nées en Haïti, on peut citer des stars internationales comme Snoop Dogg, Jason Derulo, P Diddy (ou Puff Diddy), Gary Dourdan (Warrick Brown dans Les Experts).
Arrêtons-nous un instant sur le cas emblématique de Wyclef Jean. Ancien membre des Fugees avec son compère Pras Michel (également d’origine haitienne) et de la fantasque Lauren Hill, ayant vendu dans sa carrière plus de 35 millions d’albums, Wyclef Jean n’a jamais oublié ses origines.
Il ne manque d’ailleurs pas une occasion de chanter en créole, sur ses albums ou lors de collaborations avec des artistes antillais. Le chanteur a même tenté de se présenter aux élections présidentielles en 2010, sa candidature ayant cependant été rejetée par le collège électoral haïtien.
Si Wyclef Jean revendique ses origines, tous ses compatriotes expatriés ne le crient pas sur les toits, loin de là. Simple désinterêt ou volonté de couper avec un passé compliqué, difficile de le savoir. Mais il se murmure que Dr Dre, Will Smith (qui en a tout de même parlé dans un show à la TV américaine), Missy Elliot, Warren G, Lenny Kravitz et Sydney Poitier (de façon plus lointaine pour ces deux derniers), ou encore Usher et 50 Cent auraient tous en commun des origines haïtiennes, la plupart du temps par un seul de leurs parents. Beau tableau de chasse pour un état se plaçant au 143ème rang mondial pour sa superficie, vous en conviendrez !
La plupart du temps, les enfants de la vague d’immigration haïtienne ont tout de même plutôt pour habitude de revendiquer leurs origines avec fierté. Après tout, même si cela se sait peu dans nos contrées, Haïti a été la première république noire et peut se targuer d’avoir défait la puissante armée Napoléonienne, première puissance de l’époque.
Plus près de nous la communauté est représentée par des figures aussi diverses que l’humoriste canadien Antony Kavanagh, les guadeloupéens de parents haïtiens Kery James et Admiral T, le peintre -récemment décédé- Hervé Telemaque, ou encore le réalisateur de « Lumumba » et de « I’m not your negro » Raoul Peck, le génial multiinstrumentiste Jowee Omicil et la chanteuse canadienne Melissa Laveaux. Et saviez-vous que la maman de l’acteur-réalisateur Maurice Barthélemy (de la troupe des Robins des Bois) était Mimi Barthelemy, une conteuse haïtienne ?