Et de trois ! Valérie Perrin nous confirme avec Trois, son nouvel et troisième roman, qu’elle est une auteure qui compte. Avec la justesse et la sensibilité qui caractérisent son écriture romanesque, elle nous en dit plus sur ce roman et sur son contexte.
Trois est une célébration de l’amitié, mais les protagonistes connaissent pourtant des trajectoires très différentes. Est-ce toujours le cas des amitiés au long cours ?
L’amitié est une trajectoire qui est chaotique, comme tous les chemins de vies. Ne nous est-il pas arrivé à tous d’être fou de quelqu’un dans notre jeunesse, de le rencontrer aujourd’hui sur un trottoir et se penser « merde, on n’a absolument rien à se dire » ? J’ai eu plusieurs amies d’enfance, ce ne sont que des beaux souvenirs. Avec l’une de mes amies, on ne se lâchait pas. Et puis au collège, elle est partie en pension. On s’est perdues peu à peu, on change d’amis, on change de bande, on change d’habitudes, on se lâche la main. Mais je l’ai croisée il n’y a pas longtemps, elle est toujours aussi belle, de la voir m’a mis les larmes aux yeux. Mes amis, je les ai rencontrés plus tard dans ma vie. Bien après l’enfance.
Cette façon d’ancrer vos personnages dans les détails de la vie de tous les jours évoque (parmi bien d’autres de ses chansons) Les filles de 1973, de Vincent Delerm. Vous le citez d’ailleurs avec tendresse dans les remerciements. Le travail de Delerm fait-il écho au vôtre ?
Vincent Delerm fait partie de mes artistes préférés. Je voue un amour inconditionnel à son album À présent. J’ai écrit Changer l’eau des fleurs l’année où cet album est sorti. Et cela se ressent entre chaque ligne. D’ailleurs, j’ai terminé ce roman en rendant hommage à la chanson « La vie devant soi » de cet album. Je ne peux qu’aimer Vincent Delerm, nous avons trop de choses en commun : des images très précises, du cinéma, du super 8, une piscine municipale, une photo sépia, une affiche qui se déchire, une fille de 1973, le baiser Modiano, François de Roubaix, Martin Parr, manger une part de gâteau Savane de Papy Brossard…
Trois interroge différentes notions liées à la sexualité. Pensez-vous qu’un roman puisse avoir, sur des sujets aujourd’hui clivants, des vertus pédagogiques ?
Je pense qu’un roman, un film, une pièce de théâtre, une œuvre quelle qu’elle soit, peut apporter – si ce n’est une réponse – du réconfort. Nous extraire d’une certaine solitude. Peu importe le secret que l’on porte au fond de soi, peu importe sa nature, l’important, c’est de savoir que nous ne sommes pas seuls à le porter. Que d’autres vivent la même chose. La culture, ça sert à ça, à ressembler, à dissoudre un malaise. Même si certains pensent qu’elle est non essentielle.
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Paru le 31 mars 2021 – 672 pages