« Il ne s’agit que d’un aveu de vulnérabilité », nous rassure Lili Barbery-Coulon quant à la teneur de son livre. Exit les méthodes implacables pour changer de vie, ou les discours culpabilisants : l’autrice nous propose en toute transparence un récit, sensible et éclairé, sur la réconciliation avec son propre corps qu’elle a longtemps haï.
Un parcours sans faute
Lili Barbery-Coulon fait partie de ces personnes dont la vie a pu faire rêver bien des internautes : un métier intéressant (journaliste pour Vogue puis pour M le Magazine du Monde), un appartement à Paris, un mari, une enfant, sans oublier les voyages presse, les soirées, les cadeaux. Le tout mis en avant sur ses vitrines numériques : son blog d’abord, et ses réseaux sociaux, sur lesquels elle partage son quotidien via des photos toujours plus léchées. En somme, le train de vie fantasmé par une génération entière.
Seulement voilà : la journaliste-influenceuse-maman-épouse se sent vide. Si elle donne à voir un personnage de femme épanouie, la réalité est plus sombre : des douleurs physiques aux insomnies, en passant par des TCA (Troubles des Comportements Alimentaires), elle ne semble pas habiter pleinement son propre corps. Elle constate d’ailleurs « j’ai appris à détester mon corps toute petite ».
L’aveu d’une fragilité
C’est fin 2015 qu’elle amorce ce qu’elle nomme sa « série d’éveils de conscience », dans le but de se « reconnecter à sa nature profonde ». Le déclic survient lors d’un week-end chez le chef Olivier Roellinger, qui convie la blogueuse, avec sa fille, à venir passer un moment à La Ferme du Vent. Le séjour est magique, l’histoire du chef la bouleverse, elle repart à Paris en flottant. Elle met le doigt sur son mal-être et décide de se recentrer sur elle-même, en se tournant vers une spiritualité. Rapport à l’alimentation, désintoxication des réseaux sociaux, méditation, initiation au yoga : tout y passe, et elle accumule les constats effarants. « En plus du flot d’e-mails quotidiens, j’accumulais un nombre invraisemblable de messages auxquels je n’arrivais pas à offrir une réponse claire. Les passer en revue me donnait la nausée ».
Son rythme de vie ralentit considérablement, et Lili entame une transformation, tant sur le plan physique que mental. Elle prend une nouvelle direction professionnelle : l’ex journaliste part en retraite spirituelle au Maroc et suit une formation pour devenir professeure de yoga.
Nouveau départ
À travers La Réconciliation, Lili Barbery-Coulon nous livre un témoignage honnête : celui d’un chemin, certes cabossé, qui la mène vers l’amour de soi. Son récit est parsemé d’entretiens avec différentes personnalités, psychologue, naturopathe, chanteuse, astrologue, entrepreneuse. Ces parenthèses de réflexions sont autant d’occasions d’approfondir des thématiques qui lui tiennent à cœur : comment sortir du jugement de soi et des autres ? Pourquoi ralentir ? Pourquoi prendre soin de soin conduit-il au respect de la Terre ?
Et la prise de conscience de l’autrice ne s’arrête pas à son propre corps : elle voit sa conscience écologique s’éveiller, réalise qu’il est peut-être préférable de prendre les transports en commun plutôt que des VTC et que le secteur dans lequel elle évoluait n’était pas forcément très respectueux de la planète. À ce propos, elle se confronte à un paradoxe concernant les cadeaux qu’elle reçoit : « Je m’en plaignais, car déballer, trier, ranger ces flacons pour de futurs articles, puis les distribuer autour de moi dévorait une grande partie de mes journées. Paradoxalement, j’étais aussi flattée de toujours « en être ». »
Ce discours, témoin d’une volonté d’un « retour à l’essentiel » peut agacer quand il est tenu par des personnes qui ont, en apparence, accès à l’abondance. Néanmoins, il est celui de nombreux individus qui évoluent dans le milieu de l’influence ou qui sont amenés à travailler avec leur image. Ce livre trouvera donc un écho particulier chez les jeunes (ou moins jeunes) attirés par ce mode de vie, qui rêvent d’un quotidien d’influenceur·euse fait de voyages presse et d’avalanches de cadeaux.
Finalement, et comme le précise Lili Barbery-Coulon : « L’initiation à l’amour de soi n’est pas un marathon pas de ligne d’arrivée. Pas de trophée. Pas de podium. »
—
Paru le 6 janvier 2021 – 416 pages