LE CERCLE LITTÉRAIRE – Le coup de cœur de Martine L. (Lyon). Alain Labbé est un grand navigateur qui a fait le tour du monde avec Olivier de Kersauson. Nous assistons à sa reconversion en producteur de fraises.
Le Bateau fraise
Le coup de cœur de Martine L. (Lyon)
Une vie de marin
En 1974, il embarque sur Pen Duick VI avec Éric Tabarly pour la transat anglaise. À bord, il rencontre Kersauson. En 1975, il le rejoint pour accomplir son premier tour du monde, mais malheureusement il y a de la casse. Deux ans après, il repart en course pour les 3 caps. À cette époque, la navigation c’est l’aventure. Pas de GPS, pas d’argent mais simplement le plaisir de naviguer, d’être sur l’eau et de se sentir libre. C’est un monde fait de rencontres, de voyages, de fuites, de tempêtes, … Alain Labbé naviguera pendant 12 ans et effectuera deux tours du monde.
Retour sur la terre ferme
Après ces péripéties maritimes, Alain Labbé aspire à une vie proche de la nature. Il rejoint son copain Jean Claude en Dordogne. Il y découvre un autre monde et une nouvelle façon de vivre, y fait des rencontres, dont Anne-Marie la vraie paysanne, qu’il épouse. Il décide alors d’écrire un livre relatant ses expéditions maritimes, mais l’inspiration lui manque. Il trouve un emploi à Brest sur les chantiers navals, mais se retrouve au chômage.
La reconversion
C’est alors qu’il décide de se lancer dans la culture de la fraise. Il effectue des formations, apprend et se documente et se retrouve enfin sur son terrain, face à ses fraisiers capricieux et tyranniques. Le travail est difficile. L’ancien marin découvre les aléas de la météo, de la pollinisation, de l’embauche des cueilleurs saisonniers et leur manque d’assiduité. Il doit se battre contre l’invasion de la fraise espagnole et sa concurrence déloyale. On le suit sur les marchés avec les bruits, les couleurs, les odeurs et les clients. À travers ce métier, il retrouve beaucoup de sensations déjà vécues dans le domaine maritime : l’échec, le désespoir, l’allégresse, l’incertitude du lendemain…
Un peu d’histoire
Plougastel se situe à proximité de Brest. La culture de la fraise y bénéficie de la douceur océanique. Dans les années 1760, Aimé Frézier rapporte les premiers plans du Chili. La « blanche du Chili » est cultivée dans la région de Concepción. Aimé Frézier l’a fait découvrir à Louis XIV, et un certain Le Gall changera la destinée de Plougastel pour plusieurs siècles. Mais la fraise de Plougastel connaitra des difficultés. En 1997, la production baisse et les aides de l’État n’arrivent pas. La retraite des producteurs et la vente des terrains va faire péricliter la production. Des producteurs se regroupent. Pourquoi alors ne pas créer une AOP de la fraise ?
C’est un superbe roman sur le monde paysan, le retour à la nature et à la terre. C’est surtout un amour pour ce petit fruit rouge : la fraise. Ce livre nous explique comment un « voileux » aguerri s’oriente vers cette nouvelle passion. Les deux mondes ne sont pas si éloignés.
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Paru le 5 mars 2020 – 256 pages