LE CERCLE LITTÉRAIRE – Le coup de cœur d’Anne C. (Issy les Moulineaux). La guerre n’a pas un visage de femme rassemble les témoignages de centaines de femmes engagées du côté soviétique durant la Seconde Guerre mondiale. L’auteure n’est pas historienne et n’a pas voulu écrire une Histoire de cette guerre vue par les femmes. En revanche, elle a patiemment écouté et enregistré les témoignages bouleversants des femmes pour créer un recueil inoubliable de ces voix féminines.
La guerre n’a pas un visage de femme
Le coup de cœur d’Anne C. (Issy les Moulineaux)
La guerre n’a pas un visage de femme rassemble les témoignages de centaines de femmes engagées du côté soviétique durant la Seconde Guerre mondiale. L’auteure n’est pas historienne et n’a pas voulu écrire une Histoire de cette guerre vue par les femmes. En revanche, elle a patiemment écouté et enregistré les témoignages bouleversants des femmes pour créer un recueil inoubliable de ces voix féminines à nulles autres pareilles.
Des héroïnes de l’ombre
Certaines sont tireurs d’élite, d’autres partisanes, conductrices de locomotives, chirurgiennes ou simples brancardières. Mais être brancardière signifie ramper sur le champ de bataille pour ramener les blessés à bout de bras. Les plus jeunes d’entre elles ont à peine 16 ans. Certaines ont menti sur leur âge pour pouvoir être enrôlées. L’auteure ne fait l’impasse sur aucun aspect de la vie des femmes en temps de guerre, qu’il s’agisse de sentiments – elles sont toutes filles, sœurs, épouses ou mères -, d’engagement ou d’hygiène féminine. Aucun tabou, aucun faux-semblant. Mais toujours cette force des jeunes femmes d’être au combat, souvent en première ligne, pour vaincre l’ennemi, défendre sa terre Patrie et ses idéaux, sans jamais faiblir, même sous la torture. Aucun témoignage ne parle d’héroïsme ni de gloire, mais de fatigue, d’épuisement et de mort. De courage et de détermination évidemment. Les larmes sont à peine évoquées mais on les devine présentes à chaque page, lorsque les témoignages deviennent difficilement soutenables.
En dépit de leur participation clé à l’économie de guerre notamment en 14-18 en France, la guerre a été jusqu’à récemment considérée comme exclusivement une affaire d’hommes. Svetlana Alexievitch, par son travail exceptionnel d’écoute et de recueil méthodique d’une parole enfouie, démontre que, lorsque vient l’heure où l’on ne peut plus reculer pour défendre sa terre et son peuple, les femmes méritent tout autant que les hommes la reconnaissance de leur pays. Un grand livre.
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Parution le 5 octobre 2016 – 416 pages
Traduit du russe par Paul Lequesne