Grand Prix à la dernière Mostra de Venise, J’accuse, le nouveau film de Roman Polanski revient sur l’Affaire Dreyfus avec un casting de choix. Jean Dujardin, Louis Garrel et Emmanuelle Seigner, redonnent un coup de projecteur à l’une des plus grandes erreurs judiciaires françaises.
Qui ?
Chaque film de Roman Polanski est toujours un événement. Encore davantage quand il s’intéresse à un sujet qui le touche tout particulièrement. Et l’Affaire Dreyfus en fait partie, lui qui souhaitait l’aborder au cinéma depuis sept ans. Reprenant le titre du texte J’accuse de Zola qui a permis de donner un nouveau regard à cette méprise judiciaire qui a déchiré la IIIe République, il a décidé de s’entourer d’un casting événementiel. Jean Dujardin n’incarne pas Alfred Dreyfus comme on aurait pu le penser de prime abord (il portera les traits de Louis Garrel), mais il est le pivot du dénouement de cette affaire. Il Interprète en effet le commandant Marie-Georges Picquart qui découvre l’envers du décor. À ses côtés, Emmanuelle Seigner, compagne et muse de Polanski, Grégory Gadebois, Denis Podalydès, Melvil Poupaud ou encore Mathieu Amalric.
Quoi ?
Si J’accuse revient sur l’Affaire Dreyfus, Polanski a choisi d’adapter le roman An officer and a spy de Robert Harris, avec qui il avait travaillé sur le film The Ghost Writer. Plutôt qu’Alfred Dreyfus, on suit les pérégrinations de Marie-Georges Picquart, de sa découverte de l’innocence de Dreyfus à la mise en lumière du véritable coupable. Une affaire qui mettra plus de douze années avant de trouver une résolution.
Ce qu’on en attend…
Comme souvent, les films de Roman Polanski divisent. C’est d’ailleurs ce qui s’est produit lors de la dernière Mostra de Venise, même si ce n’est pas la qualité du film qui a été mise en cause. Ce thriller historique a surtout dérangé à cause de la vie privée du cinéaste toujours mise en avant, dont on pourrait y voir un parallèle avec l’Affaire Dreyfus. Ce contexte aurait pu faire de l’ombre à J’accuse, mais ce dernier a tout de même obtenu le Grand Prix du Jury : de quoi en faire l’un des films les plus attendus de cette fin d’année. Le budget, colossal (plus de 22 millions d’euros), a permis à Polanski de faire le film qu’il espérait, grandiloquent, impressionnant et on le souhaite, fort émouvant.
Ce qu’on en a pensé
Le film commence lors de la dégradation d’Alfred Dreyfus, dans la cour d’honneur de l’École militaire, devant le regard amusé de Marie-Georges Picquart qui ignore alors qu’il sera le futur défenseur de cet officier qu’il méprise. Une scène qui montre en quelques minutes l’ambiance haineuse qui règne à l’époque, lors de cette fameuse Affaire Dreyfus qui déclencha tant de passions. Et pourtant, si la France était déchirée entre les pro et les antidreyfusards, Roman Polanski a ôté toute véhémence à l’écran, en optant pour une mise en scène plutôt austère, afin de montrer que le personnage de Picquart (impeccable Jean Dujardin) garde la tête froide en toute circonstance. Quand il découvre la vérité sur l’innocence de celui qui a été déporté et isolé, c’est maître de lui-même qu’il consent à mettre sa vie et sa carrière entre parenthèses, pour que la lumière soit faite. J’accuse n’est donc pas la vision de l’Affaire Dreyfus par Polanski, mais le parcours d’un homme vers la tolérance. Un des grands films du réalisateur.
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Photos : © Guy Ferrandis / LÉGENDAIRE – R.P. PRODUCTIONS – GAUMONT – FRANCE 2 CINÉMA – FRANCE 3 CINÉMA – ELISEO CINÉMA – RAI CINÉMA