LE CERCLE LITTÉRAIRE – Le coup de cœur de Sylvie B. (La Varenne St Hilaire). Irvin Yalom est né à Washington en 1931 dans une famille juive d’origine russe. Médecin de formation, plus que le corps, il veut étudier l’âme humaine et se spécialise en psychiatrie et s’intéresse à la philosophie. Il devient professeur à la prestigieuse université de Stanford. Il publie de nombreux ouvrages dans sa discipline. À la soixantaine, il commence une carrière d’écrivain de romans.
Le Problème Spinoza
Le coup de cœur de Sylvie B. (La Varenne St Hilaire)
Spinoza – Rosenberg deux destins opposés
Irvin Yalom est un admirateur du hollandais Baruch Spinoza (1632-1677), un des pères de la philosophie moderne. Son œuvre dense et complexe est très difficile d’accès. Pour faire comprendre ses recherches, il faudrait en faire un héros romanesque, mais il a vécu une vie quasiment monacale. Sa famille d’origine Portugaise, s’est réfugiée aux Pays-Bas, terre d’asile pour tous les marranes de la péninsule ibérique poursuivis par l’Inquisition. Intellectuel questionneur, considéré comme hérétique, il est chassé à 23 ans de sa communauté en 1656. Il vivra très isolé jusqu’à sa mort.
En visitant sa maison dans les environs d’Amsterdam, l’auteur apprend que le théoricien du nazisme, Alfred Rosenberg (1893-1946) s’intéressait également à Spinoza. Rosenberg est estonien. Dès le lycée il est convaincu de la suprématie aryenne et adopte les théories antisémites développées notamment par Chamberlain. Il fait ses études supérieures en Russie, voit la révolution bolchévique et dès la fin de la guerre en 1918, gagne Munich. Devenu journaliste dans la revue d’extrême droite de Dietrich Eckart, il rencontre Hitler dès 1919 et soutiendra activement son action. Se décrivant comme philosophe, son livre Le mythe du XXème siècle paru en 1930 connaîtra un grand succès de librairie. Pendant la guerre, il sera chargé de la spoliation des biens juifs et sera condamné à la pendaison par le tribunal de Nuremberg en 1946.
La lumière contre les ténèbres
Irvin Yalom va mettre en parallèle la vie de ces deux hommes. Le livre s’organise sur une double trame narrative, chapitre après chapitre, nous sommes alternativement au XVIIème et au XXème siècle, dans la tête de chacun de ces deux protagonistes. Utilisant ses connaissances en psychologie, l’auteur recrée de toutes pièces la vie intérieure de ses deux personnages. Tout s’articule sur leur opposition. Ils représentent les deux faces de la vie, le bien et le mal. Tous deux hommes de grandes solitudes, ils se questionnent sur la liberté, la religion et surtout l’appartenance à une communauté ; l’un est dans l’amour du prochain, l’autre dans la haine et la détestation. Époustouflant !
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Paru le 29 janvier 2014 – 552 pages
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sylvette Gleize