C’est un matin de guerre comme les autres, les soldats s’élancent des « plaies béantes de la terre qu’on appelle les tranchées » vers la mort. La leur, celle des ennemis ou bien celle des amis… Goncourt des Lycéens 2018.
C’est un matin de guerre comme les autres, les soldats s’élancent des « plaies béantes de la terre qu’on appelle les tranchées » vers la mort. La leur, celle des ennemis ou bien celle des amis…
« Nous sommes plus que frères puisque nous nous sommes choisis »
Alfa Ndiaye ne pourra empêcher la mort de son frère d’arme, pas plus qu’il n’aura le courage de stopper son agonie. Mademba Diop est son « plus que frère », son « frère d’âme ».
Sa fin atroce le fera sombrer dans la folie. Tel un « fou dangereux », Alfa Ndiaye répand la mort autour de lui dans des tueries sans merci pour ses adversaires. Sa bravoure lui attirera d’abord l’admiration de ses congénères, avant d’inspirer une terreur pour ce « soldat sanguinaire » pour qui aucune limite dans l’horreur ne semble permise. Il devient alors le « sauvage », le « sorcier », « le dévoreur du dedans des gens ».
Il sera évacué à l’Arrière.
« La nuit, tous les sangs sont noirs »
L’Arrière, c’est la dernière ligne de front. Lieu de repos entre deux attaques à l’Avant pour certains, lieu de pénitence pour d’autres. Pour Alfa, il s’agira de tenter de reprendre le goût à la vie, en trompant la mort.
Entre « Les Toubabs et les Chocolats d’Afrique noire », Alfa Ndiaye, dans une longue complainte, va alors nous conter sa condition de tirailleur sénégalais. Écrit dans un style répétitif, proche de la scansion, la narration se transforme en véritable chant traditionnel.
Alfa le griot face à l’horreur de la guerre, se fait chantre de la paix et havre de résistance à l’une des plus grandes boucheries humaines.
« Tant que l’homme n’est pas mort, il n’a pas fini d’être créé », nous rapporte-t-il dans ce proverbe peul. Un livre que nous n’avons pas fini de méditer, et sera certainement très commenté lors de cette rentrée littéraire.
Frère d’âme est le premier roman de David Diop. Il fait partie des 32 titres sélectionnés pour le Prix du roman Fnac 2018.
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Parution le 16 août 2018 – 176 pages
Photo d’illustration © bmewett