Le nouvel album de Bastien Vivès, Une sœur, sort le 3 mai 2017 en librairie. L’occasion de se pencher sur le chevalet d’un auteur qui a très vite fait son nid dans l’univers de la BD. Bastien Vivès revient en dessins sur sa passion et son métier, de ses débuts à s’exercer avec des croquis de tortues ninja (Raphaël de préférence), en passant par son parcours académique, jusqu’à l’adaptation ciné de Polina et la série animée adaptée de Lastman. Rencontre avec l’une des étoiles montantes du 9e art.
Le nouvel album de Bastien Vivès, Le Chemisier, sort le 12 septembre 2018 en librairie. L’occasion de se pencher sur le chevalet d’un auteur qui a très vite fait son nid dans l’univers de la BD. Bastien Vivès revient en dessins sur sa passion et son métier, de ses débuts à s’exercer avec des croquis de tortues ninja (Raphaël de préférence), en passant par son parcours académique, jusqu’à l’adaptation ciné de Polina et la série animée adaptée de Lastman. Rencontre avec l’une des étoiles montantes du 9e art.
La règle d’or : s’échauffer
Bastien Vivès : Un truc que j’ai dessiné toute ma vie, ce sont les tortues ninjas, surtout Raphaël. C’est un truc que je sais dessiner, de manière sûre. C’est difficile de commencer… Même si là je voulais dessiner un cheval, je ne pourrais pas forcément comme ça de tête, le faire. Certains dessinateurs ont un bagage de vocabulaire. Ils peuvent dessiner tout et n’importe quoi. On leur pose la question et ils dessinent tout ce qu’ils veulent. Ils ont forcément une super mémoire visuelle. Moi pas forcément, donc il me faut un petit peu d’entraînement avant de pouvoir dessiner quelque chose. Par exemple, dessiner les animaux, c’est très compliqué, parce qu’il faut vraiment avoir une base de photos ou juste les avoir beaucoup dessinés avant…
L’apprentissage : des tortues ninja à l’école de dessin
Quand j’étais petit, j’ai dessiné beaucoup de tortues ninja. Comme ce sont des monstres assez simples, ça me permettait de faire un peu d’anatomie vite fait, de commencer un peu les bases sans que ce soit trop difficile. Quand t’es petit, si tu dois commencer à faire des personnages ressemblants, des petites nanas par exemple, c’est très difficile, parce qu’on se retrouve vite à faire des monstres. On ne maîtrise pas trop (rires). Alors qu’une tortue ninja, même si elle est ratée, ça passe. Ça reste des volumes assez simples, bien rondouillards…
J’ai surtout appris à dessiner avec mon petit frère et mon père. On dessinait tout le temps à la maison, et après évidemment j’ai axé toutes mes études par rapport au dessin. J’ai fait un lycée arts appliqués, j’ai fait une école de graphisme, puis les Gobelins en dessin animé, ce qui fait que j’ai toujours fait du dessin. C’était le truc que je recherchais à l’école.
La création de personnages : un peu de réel, beaucoup d’imagination
Mes personnages, la plupart du temps, c’est des petites meufs, et vu que je les ai quand même bien en tête, c’est assez facile à dessiner. Pour mes personnages féminins, je m’inspire des nanas que je croise, que j’ai dans la tête. Polina, c’est une de mes très bonnes amies, italienne, qui a vraiment cette gueule-là, elle a une petite tête de singe.
Je m’inspire des gens que je croise, de personnages réels. Même quand je dois faire des personnages, un design, sur des BD un peu plus imaginaires, comme Lastman… Richard Aldana, par exemple, c’est Lou Ferrigno qui est un acteur américain bodybuildé, un culturiste qui a fait la série Hulk. On part d’une base et après, au fur et à mesure, ça bouge.
Je fais rarement des personnages qui ressemblent totalement à des personnes existantes. J’essaie de me tenir assez loin de l’autobiographie. Peut-être, au début, je peux penser à une personne quand je fais une BD mais, très vite, le personnage commence à prendre sa personnalité, commence à vivre par lui-même. Polina, elle est Polina, elle n’a pas le caractère de Valeria. Elle existe toute seule.
Le nouvel album : Une sœur
Je voulais raconter une histoire de fraternité. C’est ce qui motive un petit peu tout l’album. Ça s’appelle Une sœur, c’est cette nana qui débarque entre deux frères. Elle est un petit peu plus âgée et elle redistribue un peu les cartes : le grand-frère devient petit frère. Elle aurait rêvé d’avoir un petit frère, lui d’une grande sœur, et c’est une rencontre pendant une semaine en Bretagne. Il y a un côté un peu touche-pipi, tout ça.
Moi j’ai jamais eu de grande sœur, et j’aurais bien aimé en avoir une. La BD, c’est assez pratique, on peut refaire un peu l’histoire. Ce n’est pas du tout autobiographique. Ça ne m’est jamais arrivé une histoire dans ce genre-là. Mais je retrouve un peu mon petit frère, avec qui on dessinait beaucoup quand on était petit…
Hélène, la « grande sœur », elle débarque avec sa mère, une cousine éloignée de la mère d’Antoine et de Titi. La mère a fait une fausse couche, ils ont pas le moral, donc ils viennent passer une semaine en Bretagne. Il y a une espèce de mini drame au début… Antoine ne sait pas trop ce que c’est une fausse couche, donc sa mère lui explique et lui dit qu’elle en a fait une aussi, avant sa naissance. Il se dit que lui aurait pu avoir une grande sœur, et elle, elle aurait dû avoir un petit frère…
J’avais cette histoire en tête depuis deux ans et je me suis dit que, pour parler d’une relation de frères, il fallait que je mette cette nana au milieu. Au moment où le personnage arrive, ça débloque tout. Des bonnes idées on en a tout le temps, 5000 par seconde. Tout a déjà été raconté, tout a déjà été dit, il faut juste trouver un bon axe.
Le bonus : le cinéma et la télévision
Je n’ai pas participé aux adaptations de Polina et Lastman. Pour Lastman, je suivais ça un peu de loin, mais ça reste Jérémie Périn qui a tout réalisé, avec Balak, avec qui je fais Lastman, au scénario, et toute une équipe de scénaristes.
La Polina du film, elle est quand même mortelle, elle est incroyable. Anastasia Shevtsova, elle a fait un boulot super. Je flippais à fond que le film soit raté… Il y a eu quelques écueils vite fait, mais c’est un premier film et Anastasia dedans, elle est vraiment super. Le matériau humain, ce n’est pas le truc que je maîtrise le mieux, donc quand je vois qu’il y a des gens qui arrivent bien à s’approprier, à incarner des rôles, je suis quand même assez fasciné.
Avoir son mot à dire ? Tu t’en fous ! Moi ça m’intéressait pas. Si moi je devais adapter quelque chose, je n’aimerais pas que l’auteur soit au-dessus de mon épaule. Ça ne peut que nuire au projet. Au moins, Angelin (Preljocaj) et Valérie (Müller) ont fait leur film.
J’ai essayé un petit peu d’écrire un scénario, à un moment donné. Les producteurs sont intimement convaincus que, entre la BD et le cinéma, il y a quelque chose, mais en fait non… Au bout d’un an et demi, j’ai abandonné, parce que moi je sais pas faire de cinéma, je sais pas écrire, c’est pas pertinent. Je me débrouille bien mieux avec le dessin, donc je vais rester à faire du dessin tranquillement. Pour l’instant, il n’y en a qu’un seul qui a vraiment réussi le passage, c’est Riad Sattouf.
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Le Chemisier, Bastien Vivès – Parution le 12 septembre 2018
Photo de Bastien Vivès © Zazzo-2017
Polina – le film © UGC Distribution