Critique

Stranger Things : que vaut vraiment la saison 5, partie 1 ?

27 novembre 2025
Par Thomas Ducres
“Stranger Things”, saison 5, partie 1, le 27 novembre 2025 sur Netflix.
“Stranger Things”, saison 5, partie 1, le 27 novembre 2025 sur Netflix. ©Netflix

Trois ans après la diffusion du dernier épisode de la saison 4, la création des frères Duffer revient enfin pour un grand final divisé en trois parties. Les quatre premiers épisodes, d’une durée de 4h31 au total, réussissent-ils à éviter le sentiment de déjà-vu ?

Neuf ans. C’est le temps écoulé depuis la première saison de Stranger Things. Une éternité à l’heure du binge-watching, et qui rend l’arrivée de cette saison 5 encore plus incroyable. Qui aurait pu parier en 2015, seulement trois ans après l’arrivée de Netflix en France, que cette histoire de retrokids des années 1980 passionnerait à ce point la planète ? Neuf ans plus tard, tout a changé. Non seulement le budget pharaonique de chacun des épisodes, mais aussi – et surtout – la tête du gang de gamins d’Hawkins.

Mike, Will ou encore Onze n’étaient que des enfants ; ils et elles sont désormais de jeunes adultes. Dès le premier épisode de la saison 5, impossible, donc, de ne pas penser à l’évolution physique de Daniel Radcliffe entre L’école des sorciers (2001) et Les reliques de la mort (2011). Dix ans séparent les deux films en rappelant aux spectateurs que leurs héros ont vieilli en même temps qu’eux.

Et, comme la saga Harry Potter ou l’interminable Walking Dead, la série Stranger Things a, elle aussi, joué la carte d’un phénomène pop culture imbattable : la réalité du temps qui passe sur le visage des acteurs. La bande du monde à l’endroit qui conduisait des vélos dans la première saison a nettement grandi et, aujourd’hui, elle démolit des Démogorgons au volant de voitures dans un monde où tout part vraiment en sucette.

Un début upside down

Si Stranger Things était un jeu vidéo des années 1980 façon Castlevania, cette cinquième saison pourrait en être le niveau final. Quoi de neuf depuis la saison 4 ? Nous sommes à l’automne 1987, la ville d’Hawkins est désormais sous quarantaine militaire, des failles béantes du monde à l’envers poussent partout, Vecna est introuvable et le docteur Kay (interprétée par Linda Hamilton à qui l’on doit le rôle mythique de Sarah Connor) a remplacé Martin Brenner dans le rôle de la scientifique gouvernementale.

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Pas vraiment une surprise quand on sait la passion des frères Duffer pour Terminator 2 et les blockbusters eighties. Du reste, l’une des principales sources d’inspiration pour cette nouvelle salve est, de l’aveu même des créateurs, Maman, j’ai raté l’avion (1990), pour les nouveaux pièges tendus aux héros. Et spoiler – qui n’en est pas un : des pièges, la saison 5 en est remplie.

Comme un air de retrouvailles

Le premier épisode, nommé L’incursion, ressemble en préambule à de grosses retrouvailles. D’abord entre les ados d’Hawkins, à nouveau réunis. Mais aussi avec les débuts mêmes de la série en 2016, avec d’emblée un flashback sur les événements de 1983, durant lesquels Will se faisait pourchasser par un Demogorgon dans l’Upside Down. Sentiment évident de boucle prête à se boucler avec les derniers huit chapitres et le dénouement ultime prévu pour le jour de l’An (les épisodes 5, 6 et 7 seront quant à eux disponibles le 26 décembre).

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En attendant, le premier épisode suit l’arc narratif habituel des débuts de nouvelle salve : réintégration de l’ensemble des personnages principaux (pas encore morts) dans une sérénité de façade, et impression d’un faux plat scénaristique avec de petites blagues ; soit un échauffement tout de même un peu longuet qui durera le temps des deux premiers épisodes. Enfin, ça, c’est jusqu’à la véritable organisation de l’incursion dans le monde à l’envers pour faire la peau à Vecna.

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On est évidemment ravi de retrouver Dustin, sa casquette et son cheveu sur la langue, tout comme on l’est de réentendre (un peu en boucle) le Running Up That Hill de Kate Bush. Mais la véritable star musicale de ces quatre premiers épisodes, outre Dustin, c’est l’Upside Down de Diana Ross qui illustre à lui seul la fusion des deux mondes en cours à Hawkins.

Des chiffres qui donnent le tournis

Si l’on évitera de spoiler la fin de l’épisode 4, de loin le meilleur de la saison 5 (l’action y est omniprésente et il propose un final à la Matrix), on peut néanmoins s’attarder sur les attentes qui pèsent sur ce grand final. À elle seule, la saison 4 de Stranger Things a cumulé en 2022 l’équivalent d’un milliard d’heures de visionnages en moins de 30 jours.

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Parrot Analytics, une entreprise d’analyse de données, estime quant à elle que la série aurait au global généré 2 millions de nouveaux abonnés pour Netflix et plus d’un milliard de dollars de revenus depuis 2020 (source : Time magazine). On n’est donc pas franchement surpris que chacun des épisodes de cette dernière saison ait coûté entre 50 et 60 millions de dollars. Soit, en faisant chauffer la calculatrice, la bagatelle d’un demi-milliard de dollars en production (le double de la saison 4).

Une cinquième saison tout sauf artificielle

Pour Matt Duffer, avant même que les scores d’audience ne tombent, c’est déjà une victoire. Lui et son frère avaient initialement prévu que la saison 2 de Stranger Things contiendrait l’intégralité des épisodes allant jusqu’à la cinquième salve. Convaincus par les dirigeants de chez Netflix qu’il valait mieux étaler toute cette hémoglobine sur plusieurs années, les jumeaux ont revu leur copie, pour le plus grand bonheur des fans, avec notamment l’arrivée du très trouble Monsieur Quiproquo.

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Et si le début de cette cinquième saison comporte malgré tout quelques trous d’air (notamment dans l’épisode 2, La disparition de Holly Wheeler), les gagas de la série en auront aussi pour leur argent niveau production. « Les décors étaient tout aussi ambitieux que ceux que j’ai utilisés pour Marvel », a confié au Time Shawn Levy, producteur exécutif de la saga.

Un rapide coup d’œil au mystérieux mur que découvriront Jim Hopper et Joyce permettra de s’en convaincre… Même si, évidemment, la fin du quatrième épisode sonne comme un « doux préliminaire » à ce qui devrait suivre dans les épisodes suivants prévus pour Noël.

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Quoi qu’il en soit, pas de mauvaise surprise à attendre de cette première cuvée d’épisodes. Le compte est bon et, sauf catastrophe, les pères de Stranger Things devraient arriver à éviter le fiasco de Game of Thrones dans son ultime saison, largement contestée par les fans.

Pour la suite, on gardera un œil attentif sur le combat final entre Hawkins et le monde à l’envers. Difficile, en 2025, de ne pas faire un lien avec la révolution de l’intelligence artificielle et nos difficultés, de plus en plus évidentes, à distinguer le vrai du faux. Et ça aussi, en 2023, au moment de la fin de la quatrième saison, aucun voyant n’aura pu le prédire.

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