Agustín Díaz Yanes signe un thriller à la fois politique et intime. Inspiré de faits réels, Un fantôme dans la bataille retrace l’infiltration d’une agente de la Garde civile au sein de l’ETA, en proie à sa propre disparition.
Pas d’explosions, ni de répliques martiales dans Un fantôme dans la bataille. Arrivé sur Netflix le 17 octobre, le nouveau film d’Agustín Díaz Yanes privilégie la retenue. Inspiré d’une vraie infiltration de la Garde civile au sein de l’Euskadi ta Askatasuna (ETA), organisation indépendantiste basque, il s’ancre dans l’Espagne des années 1990, marquée par la violence politique. Ce thriller lent et tendu scrute la part invisible de la guerre.
Le tournage a été réalisé dans le Pays basque espagnol et le sud de la France. Le film a d’ailleurs connu une sortie en salles en Espagne le 3 octobre, avant son arrivée sur Netflix.
Une agente effacée par sa mission
L’histoire suit Amaia, interprétée par Susana Abaitua (Patria, Fou de toi), institutrice et taupe. Infiltrée pendant plus de dix ans, elle tente de localiser les zulos, caches d’armes dissimulées par le groupe séparatiste. Plus la mission dure, plus sa propre identité s’efface, prisonnière d’un rôle qu’elle ne quitte jamais vraiment. La caméra de Díaz Yanes colle à son regard, sans héroïsme ni discours, et laisse la tension s’installer.

La mise en scène privilégie les plans fixes, la lumière grise du nord de l’Espagne. Le directeur de la photographie Paco Femenía enveloppe le tout d’une humidité constante. Les scènes d’action sont rares, Artículo 14 parlant d’un film « où le suspense se mesure en respirations retenues ».
Présenté en avant-première au Festival de San Sebastián, le long-métrage a été salué pour sa mise en scène et son ton mesuré. Selon El País, le réalisateur signe « un cinéma de vérité », soutenu par des interprétations sobres, intenses.

Histoire et mémoire
Díaz Yanes, déjà connu pour Personne ne parlera de nous quand nous serons mortes (1995) ou Sans nouvelles de Dieu (2001) ne reconstruit pas simplement une époque : il interroge la manière dont un pays vit avec ses blessures. Le montage insère de véritables images d’archives — attentats, funérailles, reportages télévisés — qui viennent interrompre la fiction.

Le réalisateur a en outre travaillé avec d’anciens membres de la Garde civile pour garantir l’authenticité et s’éloigner des schémas moraux du genre. Les membres de l’ETA ne sont pas traités comme des caricatures, les agents non plus. El Mundo y voit la marque du cinéaste, « capable d’harmoniser la sensibilité morale du protagoniste avec celle du spectateur ».