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Mieux vaut tard que jamais : Spotify annonce des mesures contre la prolifération de la musique par IA

26 septembre 2025
Par Pierre Crochart
Mieux vaut tard que jamais : Spotify annonce des mesures contre la prolifération de la musique par IA
©Spotify

Alors que Deezer annonçait début septembre que 28% de la musique publiée chaque jour était faite par IA, le leader du secteur se retrousse enfin les manches.

Jusqu’ici plutôt attentiste, voire enthousiaste au sujet de l’intelligence artificielle, avec l’introduction de plusieurs fonctionnalités dédiées, Spotify annonce prendre des mesures concrètes pour mieux identifier les contenus générés par IA. Si la plateforme suédoise n’ira pas jusqu’à labelliser automatiquement les morceaux concernés avec un outil, comme le fait Deezer, elle souhaite en particulier lutter contre l’usurpation d’identité d’artistes. En effet, de nombreux musiciens découvrent que des titres générés par IA ont été uploadés à leur insu sur les plateformes, nuisant à leur réputation.

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Informer, mais pas punir

Spotify angle son billet de blog sur le sujet de la protection des artistes et des producteurs contre l’IA. L’idée est de limiter les dérives possibles en encourageant les labels et les indépendants à se conformer à un nouveau standard mis en place depuis le début d’année : le DDEX.

Il s’agit en quelque sorte de l’équivalent musical des Content Credentials inaugurés par Adobe il y a quelques mois pour la création visuelle. Ces nouvelles métadonnées permettent aux producteurs d’inclure dans les crédits de leurs morceaux les technologies d’IA génératives utilisées et de préciser à quelles fins elles ont été mobilisées. Déclaratifs, ces crédits visent à informer les auditeurs et auditrices, mais ils ne semblent en aucun cas obligatoires. Quinze labels internationaux se sont déjà engagés à jouer le jeu des métadonnées DDEX, dont les français Idol et Believe.

« Il s’agit ici de renforcer la confiance, et non de sanctionner les artistes qui utilisent l’IA de manière responsable », précise la plateforme. Elle ajoute que « cela n’aura pas d’impact sur la mise en avant ou la promotion des contenus sur Spotify », ce qui tranche avec l’approche de Deezer, qui exclut les titres générés par IA de ses playlists afin de les priver de revenus. Spotify, lui, défend clairement le droit des artistes et des producteurs à utiliser l’IA, qu’il considère comme un outil créatif ouvrant de nouvelles opportunités.

Deezer Velvet Sundown groupe IA
Deezer est la seule plateforme de streaming a identifier les titres générés par IA.©Capture d'écran

Lutter contre l’usurpation d’identité d’artistes

Là où Deezer prend clairement position contre la musique générée par IA, qui tire mécaniquement les revenus des véritables artistes vers le bas, Spotify souhaite plutôt lutter contre le spam. Les outils d’intelligence artificielle générative permettent en effet à des personnes de générer à la chaîne des milliers de titres et de les uploader en masse sur les plateformes, inondant les serveurs et polluant les résultats de recherche. En 2024, écrit Spotify, « nous avons retiré plus de 75 millions de morceaux indésirables ».

L’un des effets de bord de cette pratique est l’usurpation d’identité d’artistes. Qu’ils soient encore en activité, à la retraite ou parfois décédés, nombre d’entre eux découvrent que des titres qu’ils n’ont jamais composés ont été publiés sur leur page Spotify (les autres plateformes sont aussi concernées). « Nous travaillons avec les distributeurs pour bloquer, en amont, les tentatives de mise en ligne frauduleuse sur les profils d’artistes, annonce le géant du streaming. Enfin, nous investissons dans des outils de détection pour accélérer les vérifications et permettre aux artistes de signaler une inadéquation dès la phase de pré-sortie. »

L’utilisation frauduleuse de la voix d’artistes via l’IA et les deepfakes est également dans le radar de Spotify. « Cloner la voix d’un artiste sans son accord revient à exploiter son identité et à fragiliser son art. Certains artistes peuvent choisir de prêter leur voix à des projets IA et c’est leur choix. Notre rôle est de faire en sorte que ce choix leur appartienne toujours », s’engage la plateforme.

Ces annonces s’inscrivent dans un contexte de rentrée un peu délicat pour Spotify. La plateforme aux quelque 700 millions d’utilisateurs et d’utilisatrices est sous le feu des critiques à la fois pour son laxisme en matière d’IA générative, mais aussi et surtout pour les investissements récents de son patron, Daniel Ek, dans la startup de drones militaires Helsing. Plusieurs groupes internationaux le dénoncent, comme Massive Attack, King Gizzard and the Lizzard Wizard ou Xiu Xiu, qui ont annoncé ces dernières semaines avoir retiré leur musique de la plateforme en guise de protestation.

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Article rédigé par
Pierre Crochart
Pierre Crochart
Journaliste