Le collectif 50/50 a dévoilé hier une étude, portant sur un échantillon de 115 films français sortis en salles en 2019, qui confirme la faible représentation des femmes et des personnages non-blancs.
Rien de nouveau sous le soleil, argueront certains. Hier se tenait au Théâtre de la Porte Saint-Martin, à Paris, la quatrième édition des Assises pour la parité, l’égalité et la diversité dans le cinéma et l’audiovisuel, organisées chaque année par le collectif 50/50, association qui promeut activement l’égalité entre les sexes et la diversité dans le paysage audiovisuel français. À l’occasion de ces assises ont été présentés les résultats de « Cinégalités », une vaste étude menée par Sarah Lécossais et Maxime Cervulle, respectivement maîtresse de conférences et professeur en sciences de l’information et de la communication.
Le constat est clair : la parité et diversité dans le cinéma français ne sont toujours pas au rendez-vous. En se basant sur un corpus de 115 films français sortis au cours de l’année 2019, recoupant les films bénéficiant des budgets les plus conséquents et ayant fait le plus d’entrées en salles, les chercheurs ont dégagé un certain nombre de critères : le genre, l’âge et l’origine perçus, la représentation de la délinquance et de la criminalité, les catégories socioprofessionnelles, les handicaps, l’imaginaire géographique – 26% des films étudiés se déroulent à Paris – ou encore l’orientation sexuelle, les genres cinématographiques jusqu’à la composition des équipes de tournage et la répartition des budgets.
Un manque de diversité flagrant
Un des multiples constats qui ressort de cette étude est la faible représentation de personnages « non-blancs » : plus de 80% des personnages principaux sont perçus comme blancs, contre seulement 7% de personnages perçus comme noirs, 8% de personnages perçus comme arabes et 1% de personnages perçus comme asiatiques. Un écart qui se creuse en fonction de l’âge des personnages représentés : des moins de 15 ans jusqu’à la tranche d’âge 20-34 ans, un peu moins de 70% des personnages sont perçus comme blancs, contre 91% pour les 65-79 ans et la totalité pour les plus de 80 ans. 11% des personnages non-blancs sont impliqués dans des activités criminelles, dont 28% des personnages perçus comme arabes. « Les figures de la marginalité sont d’abord des étrangers », constate Maxime Cervulle. Sur les 15 films les mieux financés cette année-là, 88% des personnages principaux sont perçus comme blancs.
Après 50 ans, les femmes sont de moins en moins représentées
Selon cette étude, les femmes cisgenres – qui représentent pourtant plus de la moitié de la population française – constituent seulement 38% des personnages principaux des films étudiés. Là où les femmes de 20-34 ans représentent 51% des rôles principaux, le chiffre chute soudainement à 12% pour les 50-64 ans (seulement 1,2 % des personnages principaux de cette tranche d’âge sont des femmes) avant de remonter jusqu’à 75% pour les 80 ans et plus. Une réalité mise en lumière par l’association Actrices et acteurs de France associés (AFAA) avec l’initiative « Tunnel de la comédienne de 50 ans ».
L’invisibilité des actrices de plus de 50 ans se traduit parfois dans des choix de casting, à l’image du film Eiffel où la jeune Emma Mackey, 25 ans, affiche 22 ans d’écart avec Romain Duris lorsque, dans les faits, Gustave Eiffel et son âme soeur Adrienne Bourgès en avaient seulement neuf. Ou encore, on peut citer le futur biopic de Ridley Scott sur Napoléon, Kitbag, où Jodie Comer a été choisie pour interpréter l’impératrice Joséphine en face de Joaquin Phoenix, qui interprétera quant à lui Bonaparte : les deux comédiens ont aujourd’hui 20 ans d’écart, alors que Joséphine de Beauharnais était de six ans l’aînée de Napoléon. Ainsi, là où les femmes de 50 ans et plus sont de moins en moins représentées, les hommes entre 50 et 64 ans constituent au contraire 88% des personnages principaux.