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Rentrée littéraire 2024 : quand les auteurs racontent notre monde

02 septembre 2024
Par Lisa Muratore
“Badjens” de Delphine Minoui fait partie de la sélection du Prix du Roman Fnac.
“Badjens” de Delphine Minoui fait partie de la sélection du Prix du Roman Fnac. ©Éditions Seuil

À travers les pages de leurs nouveaux romans, plusieurs auteurs et autrices de la rentrée littéraire posent leur regard sur notre monde afin de se faire le reflet des considérations sociales et politiques récentes.

La rentrée littéraire 2024 bat son plein. Certains auteurs et autrices se sont déjà illustrés depuis la fin du mois d’août avec des propositions inédites, fortes et émouvantes, parfois particulièrement personnelles. D’autres ont choisi, par le biais de la littérature, d’apporter leur regard sur le monde. Ces nouvelles parutions reflètent ainsi notre société, à travers ses problématiques nationales ou internationales.

La France en ligne de mire

C’est le cas de Personne morale (Actes Sud) de Justine Augier, dans lequel l’écrivaine revient sur un scandale étatique : celui du cimentier Lafarge, fleuron de l’industrie française, qui pendant la guerre en Syrie a poursuivi ses activités en versant des millions de dollars en taxes et droits de passage à des groupes djihadistes, exposant ainsi ses salariés après avoir mis à l’abri les expatriés étrangers. En montrant le combat de plusieurs femmes, l’autrice revient dans un livre percutant et documenté sur la notion de responsabilité.

Le sort de la France et de ses DOM-TOM est également au cœur de cette rentrée littéraire, notamment avec le nouveau roman d’Alice Zeniter, Frapper l’épopée (Flammarion). Dans ce dernier, l’autrice raconte le retour de Tass en Nouvelle-Calédonie et sa quête pour retrouver des jumeaux kanaks qu’elle croit liés au mouvement indépendantiste. Ce roman, en plus d’interroger la notion d’origine et d’héritage, fait écho à l’actualité d’Outre-Mer avec la question de l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie qui a beaucoup secoué l’actualité récente et demeure une problématique récurrente pour la France.

De son côté, c’est sur l’île de beauté que nous embarque Jérôme Ferrari avec Nord Sentinelle (Actes Sud) dans lequel l’auteur revient sur les mécanismes de la violence, notamment en Corse, et la problématique du tourisme massif débarquant dans une réalité complexe, où le code de l’honneur fait foi. En décrivant le sort de colons modernes, mais aussi la dualité des natifs, Jérôme Ferrari montre qu’il est de retour, toujours avec cette plume acerbe.

Un ton qui fait écho au roman d’Aurélien Bellanger en cette rentrée littéraire, avec Les Derniers Jours du Parti socialiste (Seuil). Disponible depuis le 19 août en librairie, le livre dresse une farce, mais surtout un portrait sans concession de la gauche. Le livre a fait beaucoup parler de lui et figure notamment au sein de la sélection du Prix littéraire Le Monde 2024.

Le monde à travers les pages

Outre le sort de la France, d’autres auteurs et autrices donnent à lire le récit de personnages face à la violence de leur pays. C’est le cas de Djaïli Amadou Amal avec Le Harem du roi dans lequel l’autrice et activiste camerounaise brise les tabous sur le mariage forcé et la polygamie en Afrique à travers l’histoire d’amour de Boussoura et Seini. De son côté, Gaël Faye a fait le choix de la reconstruction avec Jacaranda (Grasset) dans lequel l’écrivain dévoilé grâce à Petit Pays (Grasset) raconte les conséquences du génocide rwandais et l’espoir nourri par la population après ces terribles événements.

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On doit également citer Badjens (Seuil) de Delphine Minoui. Nommé au Prix du roman Fnac 2024, le livre raconte le désir d’émancipation d’une adolescente iranienne de 16 ans bien décidée à se libérer des carcans que lui impose le pays. Une parution qui fait forcément écho à la révolution qui se joue actuellement au Moyen-Orient.

Des questions de société importantes

Nicolas Martin imagine dans Fragile/s, une proposition pas si dystopique que ça, un récit féministe sur l’eugénisme et la maternité, tandis que dans La Petite Bonne (Les Avrils), Bérénice Pichat dresse le portrait d’une assistante de vie dont le patient lui demande une aide à mourir. Deux récits qui prennent en considération la place de l’être humain, la question du corps (notamment celui des femmes), ou encore la problématique de l’euthanasie, souvent évoquées dans le débat social français.

De son côté, Carole Martinez utilise, dans Dors ton sommeil de brute (Gallimard), la fiction et plus particulièrement le conte, pour offrir une métaphore écologique. Enfin, Maud Ventura, en s’attaquant au star-system à travers l’ascension de Cléo, dans Célèbre (L’Iconoclaste), trouve une façon originale d’aborder la société de l’image et le culte de la célébrité à l’ère des réseaux sociaux.

Corps, guerre, écologie, liberté… La rentrée littéraire est donc l’occasion idéale pour les auteurs et autrices d’offrir leur réflexion et leur regard sur le monde. À travers différents procédés d’écriture, chacun se saisit, à sa manière, de l’actualité et de problématiques sociétales. Preuve, s’il en fallait une, de l’importance du récit, du témoignage, mais surtout de la littérature !

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Article rédigé par
Lisa Muratore
Lisa Muratore
Journaliste