Entretien

Exposition Viva Varda ! : “C’était important de participer à la reconnaissance de son travail”

29 novembre 2023
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Photogramme de Varda par Agnès.
Photogramme de Varda par Agnès. ©2018 Ciné Tamaris

Viva Varda ! est la première grande rétrospective consacrée à Agnès Varda. La Cinémathèque française rend hommage à cette cinéaste qui n’a cessé de réinventer le 7e art. Rencontre avec Florence Tissot, commissaire de l’exposition, qui a trié sept décennies d’archives, de travail et de moments de vie.

Quand ce projet d’exposition est-il né ?

Il y a environ trois ans, dans le sillage de la disparition d’Agnès Varda en 2019. C’est la rencontre d’un désir commun, à la fois de la Cinémathèque française, qui voulait rendre hommage à cette réalisatrice, et puis de Rosalie Varda et Mathieu Demy, ses enfants. Le but était de réaliser la première grande rétrospective consacrée à Agnès Varda. De son vivant, il y avait bien sûr eu des expositions, mais aucune ne reprenait la totalité de sa vie et de son œuvre.

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L’exposition retrace plus de sept décennies, à travers des extraits de films, des photos, des documents de tournage, des coupures de presse… Comment faire le tri parmi toutes ces archives ?

L’enjeu était de savoir comment raconter Agnès Varda sur 600 m2. Sa vie a été longue et elle gardait tout ! Donc, avant de nous immerger dans cette montagne d’archives, il a fallu imaginer un découpage préalable, choisir les éléments que nous voulions mettre en avant. Pour cette exposition, il nous semblait cohérent d’envisager un parcours thématique, car Agnès Varda n’avait de cesse de se balader dans sa filmographie.

Agnès Varda sur le tournage des Créatures.©1965 ciné tamaris

Puis, comme l’exposition se tient à la Cinémathèque française, on a mis le cinéma au cœur, tout en mettant en lumière ses photographies ainsi qu’une partie de ses œuvres en tant que plasticienne. Il y a beaucoup d’inédits dans l’exposition.

Quelle relation Agnès Varda entretenait-elle avec la Cinémathèque française ?

C’est un lieu qui comptait beaucoup pour elle. Elle la côtoyait régulièrement, d’autant plus lorsqu’il y a eu l’exposition Le Monde enchanté de Jacques Demy en 2013. Puis, au gré de nos programmations, elle est souvent venue, pour célébrer l’œuvre de Chris Marker et bien d’autres. C’est la première fois que la Cinémathèque française consacre une grande rétrospective à une réalisatrice. C’était important pour nous de participer à la reconnaissance de son travail. D’autant qu’elle ne l’a pas toujours obtenue de la part de l’industrie du cinéma.

Entre avant et après l’exposition, votre regard personnel sur Agnès Varda a-t-il changé ?

Je connaissais déjà son œuvre. Elle me touche beaucoup, parce qu’elle aborde des sujets comme l’amour, la curiosité pour les autres, elle pose des réflexions sur les stéréotypes et ses contributions au féminisme m’intéressent. Elle a toujours pris les films comme une expérimentation et jamais comme une carrière.

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Son but était de réinventer le langage cinématographique, tout en étant ancrée dans son temps, toujours curieuse des bouleversements de la société. Cette double dimension chez elle me passionnait déjà. Mais travailler sur cette exposition m’a fait découvrir énormément de choses, notamment son travail de photographie.

L’exposition est dense sans pour autant perdre le visiteur non initié. Est-ce ainsi que vous l’avez voulue ?

Je suis très sensible aux expositions qui accompagnent le visiteur. On a porté une attention particulière à la pédagogie et on a même imaginé un parcours adapté au jeune public. Cela permet à ceux qui connaissent peu Agnès Varda d’avoir une première approche.

Agnès Varda, Oncle-Yanco©1967 ciné tamaris

Néanmoins, là où l’exposition est intéressante, c’est qu’elle s’adresse aussi bien à ceux qui veulent la découvrir qu’aux grands connaisseurs. Plusieurs spécialistes de Varda m’ont d’ailleurs raconté avoir découvert beaucoup de nouvelles choses. Il y a un grand nombre de documents et de photos qui n’ont jamais été montrés au public.

Comment définiriez-vous Agnès Varda ?

Pour moi, Agnès Varda est une précurseure, une femme audacieuse, endurante et persévérante. Elle a traversé le XXe siècle et un milieu du cinéma hostile aux femmes. Elle a d’ailleurs été surnommée « la mère de la Nouvelle Vague », puis « la grand-mère », alors même qu’elle n’était que trentenaire… Cela reflète bien le sexisme présent dans le monde du cinéma à cette époque.

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Il est vrai qu’elle a introduit les concepts constitutifs du mouvement de la Nouvelle Vague, comme le tournage dans des décors naturels et les acteurs amateurs. Il y a eu d’autres précurseurs, comme Jean-Pierre Melville, qui étaient bien plus âgés qu’elle, sans pour autant être appelés « grand-pères »…

Disparue depuis 2019, la réalisatrice continue d’inspirer les jeunes générations. Elle s’est élevée au rang d’icône. En avait-elle conscience ?

Agnès Varda a consacré beaucoup de temps et d’énergie à faire de la transmission. Elle a participé à des masterclasses et des tables-rondes, souvent suivies par les jeunes générations. Elle se voulait très accessible et avait une image de cinéaste très proche de son public. D’ailleurs, elle s’était un peu créé un personnage, avec cette coiffure bicolore.

Elle aimait bien contrôler le récit qui se faisait autour d’elle. D’ailleurs, on le voit bien dans son documentaire Varda par Agnès (2019). Toute sa vie, elle a été très sollicitée et interviewée, donc je pense qu’elle devait avoir conscience de ce qu’elle représentait et de la postérité qu’elle commençait déjà à mettre en récit.

Info pratique

Viva Varda !, à la Cinémathèque française (Paris 12e), jusqu’au 28 janvier 2024. Ouvert le lundi, du mercredi au vendredi (de 12h à 19h), et le week-end (de 11h à 19h). 6€-12€.

Pour la billetterie, c’est par ici !

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