Yoann Lemoine, alias Woodkid, entame sa tournée des zéniths avec dans la poche son dernier album, S16, sorti en 2020. Un retour sur scène d’une rare puissance musicale et visuelle.
Il court, il court le garçon… Voilà sept ans que The Golden Age est sorti et Woodkid continue son chemin, poursuit son itinéraire créatif, sans se soucier de la temporalité de l’industrie du disque. Après l’album qui lui a fait parcourir le monde sous les cuivres triomphants d’Iron et de Run Boy Run, Yoann Lemoine, 38 ans, revient avec S16. Un album plus électronique, sorti en octobre 2020 – en pleine pandémie. D’abord orphelin des scènes, S16 vibre enfin sur le terrain de jeu de son créateur, celui où il exprime son art total, musical et visuel. Après un été de festivals, Woodkid plonge dans une tournée vertigineuse des zéniths, avant une série de dates internationales, de l’Europe aux États-Unis.
Planète Woodkid, décollage imminent
Si la réalisatrice Julia Ducournau a su changer le titane en or, Woodkid, lui, joue avec le soufre. S16 est en effet la signature de l’élément chimique et le titre d’un album éruptif, dans lequel les sentiments se heurtent aux coups de marteau sur le métal et aux vrombissements des machines infernales. Bienvenue dans un monde de l’industrie et de la désolation. Il suffit de voir le clip de Goliath pour comprendre que Woodkid a construit, comme à son habitude, un univers aussi visuel que musical. Et a imaginé ses concerts comme un décollage vers sa planète.
Une scénographie impressionnante
Début octobre, en donnant le premier concert de sa tournée à Annemasse, en Haute-Savoie, il a une nouvelle fois prouvé qu’il était un homme de musique aussi bien que d’images. La scénographie est simple : des percussions et claviers de chaque côté de la scène, un quintet de violons, violoncelle, clarinette basse et trombone au centre. C’est au-dessus des musiciens que tout se joue, où un écran ingénieusement doté d’une estrade permet au chanteur de s’intégrer totalement dans la scène. Woodkid devient le héros dans ces paysages qui défilent, habillé d’une combinaison d’astronaute façon science-fiction des années 1980. Il est alors happé, et nous avec, dans un monde d’éruptions, d’explosions, où l’on s’engouffre dans un moteur de fusée avant de se retrouver sous un ciel étoilé…
Space-cabaret
Fortement inspiré par le genre vidéoludique – il vient de collaborer avec le géant du jeu vidéo japonais, Hideo Kojima – Woodkid a construit son live comme une montagne russe dans les rouages de l’intime, entre violence rythmique et douce mélancolie. Des scènes très cinématographiques et des jeux de lumières intenses succèdent à des instants très dépouillés. Les sonorités sont très industrielles, métalliques, puis s’évanouissent en laissant place au piano. Quand les chœurs se taisent, le chanteur se tient droit devant son micro, éclairé par un seul spot : on passe du voyage intergalactique à une ambiance très intimiste.
Entre deux éruptions et martèlements, Brooklyn – un de ses premiers titres – nous ramène un temps sur terre, à la table d’un café new-yorkais, avant de redécoller de plus belle. Bienvenue dans le space-cabaret. Avec une alchimie dont il garde le secret, Woodkid intègre de sa voix grave et posée ses créations passées à celles du nouvel album pour créer un puissant alliage. Inoxydable.