La cultissime hexalogie a pris fin il y a six ans, mais le monde de Resident Evil n’a jamais été aussi « vivant ». Après le reboot et la série d’animation sortis l’année dernière, la franchise s’enrichit d’une nouvelle série produite par Netflix. De quoi étendre un peu plus ce vaste univers, même si on peine à retrouver l’identité des films et des jeux qui ont fait son succès.
2036. La planète est ravagée. Le virus T, mis au point par l’entreprise Umbrella Corporation, a réduit l’humanité à quelques centaines de millions de survivants… et à 6 milliards de morts-vivants. Ce qui reste de l’humanité vit dans des cités-États fortifiées, le plus souvent protégées par l’entreprise à l’origine même de ce carnage. Car l’arsenal militaire et technologique disponible est entre les mains d’Umbrella, lui conférant un pouvoir sans limite. Dans ce monde post-apocalyptique, Jade (jouée par Ella Balinska), une scientifique, étudie les infectés dans l’espoir de découvrir un remède.
Une chronologie sans connexion avec l’hexalogie et le reboot
Quatorze ans plus tôt, Jade (incarnée jeune par Tamara Smart) emménage avec sa sœur Billie (Siena Agudong) à New Raccoon City, cité détenue par Umbrella Corporation, en Afrique du Sud. La ville est une version aseptisée, coupée du monde et ultrasurveillée de la première Raccoon City, détruite mystérieusement 20 ans plus tôt. « Tout le monde sait qu’elle a été détruite dans un accident tragique, mais peu de personnes savent vraiment ce qu’il s’est passé. Ce qui n’est pas étonnant, étant donné que cela a été complètement caché par le gouvernement des États-Unis », raconte Andrew Dabb, le showrunner de la série, au magazine Entertainment Weekly.
Mais, peu à peu, les deux sœurs, qui se trouvent être les filles d’un personnage clé de l’univers, Albert Wesker (joué par Lance Reddick), vont se rendre compte que l’endroit où elles vivent a beaucoup de choses à cacher. Tout comme leur père.
Andrew Dabb, qui a travaillé pendant 15 ans sur la série Supernatural, nous entraîne alternativement dans ces deux timelines. Les événements des deux époques se croisent et se complètent, étendant un peu plus l’univers de la franchise. Car la chronologie de cette première série en prises de vue réelles est totalement indépendante des événements des films de la célèbre et culte hexalogie, sortis entre 2002 et 2016. Aucun lien non plus avec la série d’animation Resident Evil: Infinite Darkness, ni avec le reboot Welcome to Raccoon City, produits l’année dernière et diffusés, déjà, par Netflix.
La série s’inspire en fait des jeux-vidéo Capcom, antérieurs aux films (ils ont été produits dès 1996). Andrew Dabb le confirme : « Les jeux sont notre trame de fond. Tout ce qui se passe dans les jeux existe dans ce monde, jusqu’à la dernière production, Resident Evil: Village [sorti l’année dernière, ndlr]. » On retrouve donc certaines créatures bien connues de la fanbase, comme les chiens zombies ou les araignées géantes des premiers jeux. Certains retournements scénaristiques semblent aussi avoir été empruntés aux jeux, comme la possibilité d’une mutation du virus.
Dans les jeux Resident Evil 4, 5 et 6, les populations déjà infectées peuvent propager une nouvelle sorte de virus, conférant une sorte de conscience sectaire et communautaire aux zombies, qui deviennent capables de communiquer entre eux et de se déplacer plus rapidement. « C’est un nouvel organisme, confirme Andrew Dabb. Nos zombies ne sont pas des morts ressuscités. Ils sont infectés par un virus. Nous avons tous eu un cours intensif sur les virus ces dernières années. Ce virus change. Il évolue et il a son propre plan. »
Les jeux, supports d’une toute nouvelle histoire
Autre clin d’œil aux jeux : le retour de certains personnages bien connus. C’est le cas de Lisa Trevor. Victime des expériences biologiques illégales menées par l’abjecte multinationale pharmaceutique, la fillette, transformée en une monstrueuse mutante, fait une rapide apparition dans la série. Mais le plus notable est bien sûr la présence d’Albert Wesker, employé d’Umbrella Corporation, et un des protagonistes principaux de la nouvelle production. « Si vous connaissez les jeux, Wesker est mort. Il a été explosé par un lance-roquettes dans un volcan – la façon dont, je pense, nous aimerions tous partir », s’amuse Andrew Dabb.
Mais Albert Wesker est de retour – on ne dévoilera pas les raisons de sa survie –, et c’est bien ce qui prouve que la série n’est pas qu’une adaptation des jeux. Ils sont en fait utilisés comme trame de fond, le support d’une toute nouvelle histoire. Certaines libertés ont même été prises par rapport au personnage d’origine : blanc dans les jeux, Wesker est incarné par un acteur noir dans la série, Lance Reddick. On découvre aussi qu’il a deux filles, nées dans de mystérieuses circonstances.
De nouveaux personnages donc, à défaut de retrouver les cultissimes Leon Kennedy et Claire Redfield. Fait également son apparition Evelyn Marcus (incarnée par la géniale Paola Nuñez), la nouvelle PDG d’Umbrella Corporation. Fille du fondateur de la firme, James Marcus, elle tente de lui racheter une image, après les nombreux scandales l’ayant éclaboussée.
Un univers étendu, mais bien moins horrifique
Mais ces nouveaux détails ne concernent pas uniquement les personnages. Face à un virus planétaire, le monde entier a changé, et la série en dit un peu plus sur la façon dont le globe s’organise après l’apocalypse. Andrew Dabb explique qu’« une nouvelle nation, “Umbrella”, occupe la côte ouest des États-Unis. Quelque chose appelé “Fortress Scandinavia” couvre la Suède, la Norvège et la Finlande… Le Brésil et les pays qui l’entourent sont devenus “Amazonia”, l’Inde est maintenant “The Faith”, alors que la Chine et des parties de la Sibérie sont simplement connues sous le nom de “Sihai”. Dispersées entre ces énormes nations, il y a de petites cité-États libres (Boston, Paris, Capetown, Mumbai), et les espaces vides sont les “Terres Mortes”, le foyer des Zéros [les infectés, ndlr] ».
Un monde entièrement intégré dans notre réalité. Et c’est bien ce qui diffère le plus des jeux vidéo. Évocation du changement climatique et des problèmes dû au racisme, utilisation presque constante des réseaux sociaux et de Google par les personnages… De grandes entreprises comme Apple ou Facebook sont même mentionnées. Le scénario s’appuie sur des problématiques actuelles, comme la diffusion de fake news ou de théories du complot… Et même sur la pandémie de Covid 19, quand Wesker déclare à sa fille, infectée par un « étrange » virus que « ce n’est pas comme le Covid ».
Conséquence : l’atmosphère est beaucoup moins horrifique que dans les productions précédentes. D’autant plus que la musique, très actuelle (on peut y entendre du Billie Eilish, par exemple), n’aide en rien à provoquer le stress et l’angoisse que recherche le public habituel de la saga. Alors oui, les touches d’humour (surtout portées par le personnage de Richard Baxter, méchant cruel, mais légèrement maladroit campé par Turlough Convery), apportent de la fraîcheur au scénario.
Il n’en reste pas moins alourdi par de longs épisodes, pas toujours très bien rythmés, et surtout très – très – prévisibles. Les évolutions, personnages et détails apportés par la série vont, sans nul doute, attirer et plaire à la fanbase. Pas certain, cependant, qu’elle soit convaincue par cette vision très adolescente de l’univers. Mais, après tout, attirer un nouveau public, n’est-ce pas cela le véritable but d’un remake ?
Diffusion dès le 14 juillet 2022 sur Netflix.