Pas de tempête magnétique ni d’éruption solaire en vue pour cette rentrée littéraire mais une pluie de bons romans de SF à découvrir. Aux côtés des américains chevronnés Ted Chiang et Robert Jackson Bennett, des français confirmés Philippe Curval et Laurent Genefort, on trouve entre autres pépites, un ovni téléguidé par un blogueur touche à tout, un thriller d’anticipation marseillais ou encore un premier roman prometteur…
Sélection par ordre de parution
Capitale Songe
Lucien Raphmaj (L’ogre) 20/08/20
Blogueur, critique littéraire, auteur d’essais, Lucien Raphmaj est un brillant touche-à-tout qui a choisi l’anticipation et la littérature de genre pour son premier roman. Présenté au départ de la rentrée littéraire, Capitale Songe est une plongée hallucinante dans un futur surréaliste et insomniaque où le sommeil n’existe plus et les rêves sont des marchandises de luxe prisées par une cliente aisée. Biopunk, Cli-Fi, dystopie… Ce roman baroque à la croisée des genres traduit par sa foisonnante complexité une forme de lutte des classe ultime où certains ont encore le droit de rêver quand d’autres n’ont que celui de s’user le corps et l’esprit. Sur l’île de Capitale S, le capitalisme est à son paroxysme d’inhumanité.
Vigilance
Robert Jackson Bennett (Le Bélial) 27/08 
Il y a deux ans, Robert Jackson Bennett frappait fort avec un roman puissant et tordu (American Elsewhere) dans la veine des meilleurs Stephen King. Pour faire sa rentrée estivale, il change d’éditeur français et franchit un nouveau cap dans sa définition du cauchemar américain. Violent et radical, Vigilance met en scène un jeu de la mort à balles réelles et retransmis H24 par des drones. Une obscène émission de téléréalité où la tuerie de masse est érigée en spectacle populaire. Proche de certains épisodes de Black Mirror ou de la saga American Nightmare au cinéma, le roman use des ressorts de la fiction prospective pour dresser un nouvel état des lieux sans concession des USA. Ultra-violence, voyeurisme, contrôle du peuple par l’exaltation de ses plus bas instincts… Le monde hystérisé et malade de Vigilance ressemble furieusement au notre.
Expiration
Ted Chiang (Denoël) 02/09
Spécialiste américain de la nouvelle de SF, Ted Chiang est une signature du genre bien connue des amateurs de littérature de l’imaginaire. Récompensé à plusieurs reprises par les prix les plus prestigieux (Nebula, Hugo, Locus…), on lui doit notamment la nouvelle adaptée au cinéma par Denis Villeneuve en 2016 (Premier contact). À l’heure de la rentrée littéraire 2020, le romancier qui continue par ailleurs à faire son métier de rédacteur informatique, est de retour avec Expiration, un nouveau recueil de nouvelles où il s’interroge en neuf textes courts sur le sens de la vie. Sondant, chemin faisant, notre rapport à la machine et notre adaptation aux bouleversements technologiques.
Community
Luna Joice (Hugo Roman) 03/09 
Ancienne star de la plateforme Whattpad, où elle récolte un prix avec la première mouture numérique d’une new romance qu’elle convertira un peu plus tard sur papier, Luna Joice fait elle aussi sa rentrée littéraire dans un genre où elle n’était pas forcément attendue. Récompensée par le Prix Bernard Werber de l’imaginaire 2020, elle réalise avec Community un pur roman d’anticipation solidement charpenté autour d’une intrigue parfaitement maîtrisée. En 3006, la terre est pacifiée grâce à une technologie dotant la population d’extraordinaires pouvoirs télépathiques. Libérés de leurs pires penchants, les humains se retrouvent pourtant privés de leur sens de l’empathie. Dans cette société paisible et insensible, une jeune fille plus futée que les autres cherche à comprendre ce qui se cache derrière la technologie fondatrice de ce monde sans émotions…
Cela aussi sera réinventé
Christophe Carpentier (Au diable Vauvert) 10/09
Représentant d’une SF éclairée, documentée, scientifique et politique, Christophe Carpentier fait sa rentrée littéraire avec un roman mêlant Cli-Fi post-apocalyptique et réflexion sur la reconstruction de la pensée. D’une longueur inversement proportionnelle à sa densité intellectuelle, Cela aussi sera réinventé nous entraîne sur une terre devenue invivable gouvernée dans un futur lointain par un groupe de nomades ayant développés un nouvelle philosophie de vie.
Marseille 2064
Frédéric Dubessy (L’onde) 11/09 
Dans quarante-quatre ans précisément, il y aura du rififi sur la Canebière… C’est ce que promet Frédéric Dubessy, journaliste expert en économie méridionale, avec Marseille 2064. Un second roman aux accents de thriller d’anticipation dépeignant une société française hygiénisée à outrance par les diktats de la génétique et de l’IA. Dans ce contexte aseptisé où la faconde sudiste a pris du plomb dans l’aile, une série de meurtres révèle un inquiétant trafic d’ADN… Découvrir Marseille en mode SF est une expérience originale qui se tente.
L’espace entre les guerres
Laurent Genefort (Critic) 15/09
Roman hors série à mille lieux du Cycle d’Omale, L’espace entre les guerres est un roman de hard SF structuré en deux parties par un Laurent Genefort toujours très à l’aise avec les codes du space opéra. Deux destinations et deux missions dans un même roman pour un médiateur chargé de pacifier les conflits qui éclatent aux quatre coins des galaxies. Assassinats de dignitaires et factions rebelles à gérer d’un côté, des planètes jumelles à sauver d’un désastres écologique de l’autre. La rentrée s’annonce mouvementée…
Bienvenue au paradis !
Alexis Legayet (Aethalidès) 24/09 
Alexis Legayet enseigne la philosophie et s’intéresse de près aux évolutions intellectuelles et aux transformations matérielles de l’homme. Loufoque dans la forme et très sérieux dans le fond, Bienvenue au paradis, son dernier roman, est une fable d’anticipation et une satire mordante de certaines formes de radicalité écologique d’aujourd’hui. En 2145, alors que le vivant est devenu sacré depuis un siècle, un mouvement frugivore accuse les véganes de crimes contre les plantes. Dans ce contexte tendu, une romance naît entre deux jeunes étudiants issus de chaque camp.
Le paquebot immobile
Philippe Curval (La Volte) 8/10
Vieux briscard de la SF made in France devenu depuis plusieurs romans un auteur maison des exigeantes éditions La Volte, Philippe Curval fait sa rentrée en embarquant sur Le paquebot immobile. Sur ce navire continent, étonnant bijou de recyclage construit et gouverné par des pacifistes écolos, une faction fascisante s’empare du pouvoir par la force. Pour mettre fin à l’atroce dictature qui se profile, la communauté fondatrice doit entrer en résistance. En reniant son idéal de non-violence ?
Upside down
Richard Canal (Mnémos) 9/10 
Après une parenthèse de plusieurs romans noirs et de littérature blanche, Richard Canal reprend le chemin de l’anticipation en imaginant une terre à bout de souffle quasiment désertée par les humains. Dans ce contexte bien sombre, Upside down prend de la hauteur en s’intéressant aux dirigeants des GAFAM mis à l’abris sur des îlots en orbite autour d’une planète plus vraiment bleue et aux sorts croisés d’une ex-star de cinéma et d’un artiste en pleine crise existentielle.
Visuel du post : Reimund Bertrams (Pixabay)
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