La provocation ? Elle en a fait sa signature. En juin, Madonna annonçait la sortie de « Veronica Electronica », album de remix et d’inédits extraits de l’emblématique « Ray Of Light », paru en 1998. Un retour ultra-attendu par ses fans, qui n’a pas manqué de faire parler. Icône de la pop, pionnière du féminisme, figure de l’excès : à 66 ans, la star reste une source inépuisable de fascination… et de scandales. Pour l’occasion, retour sur un parcours unique, aussi admiré que controversé.
À 20 ans déjà, elle affichait une ambition à toute épreuve. Fraîchement débarquée à New York, Madonna n’a qu’un seul rêve : mener une brillante carrière de danseuse professionnelle. Rayonner sur scène ? Elle semble défintivement faite pour.
Audacieuse, talentueuse et ultra-provocatrice, celle que l’on surnomme « Reine de la Pop » a marqué d’une empreinte singulière la sphère musicale. Avec son album surprise Veronica Electronia, elle satisfait l’impatience d’un public qui ne souhaitait qu’une chose : le retour de la Madone.
Une performeuse qui ose (vraiment) tout
Depuis la sortie de son premier album Madonna en 1984, la chanteuse voit les succès s’enchaîner à vitesse grand V : Like a Virgin (1984) et True Blue (1986) s’écoulent à plus de 20 millions d’exemplaires chacun, tandis que Ray of Light (1998) ou Confessions on a Dance Floor (2005) décrochent de précieux Grammy Awards.
Les écoutes explosent, les salles de concert affichent complet, et les récompenses pleuvent. L’ingrédient de sa réussite ? L’audace, sans hésitation. Dès ses débuts, Madonna affirme ses choix et sa personnalité, désireuse d’incarner, au cœur de ses chansons, une femme libre et puissante. À son image.
Sur scène, elle surprend, provoque, choque. En 1984, son titre Like a Virgin – au nom plus qu’évocateur – est choisi pour être interprété sur la scène des tout premiers MTV Video Music Awards. Une inauguration que la reine de la pop prend particulièrement à cœur.
Cachée à l’intérieur d’un gâteau géant, Madonna surgit vêtue d’une robe de mariée… bien loin des conventions : corsage en dentelle, jupe en tulle à pois en forme de cœurs et ceinture à l’inscription « Boy Toy » – littéralement jouet de garçon – remplacent la traditionnelle robe blanche.
Dans ce costume censé symboliser l’union, la fidélité et la pureté, l’artiste laisse entrevoir une tout autre image : celle d’une femme indépendante, tant sur le plan amoureux que sexuel. Un look emblématique qui s’imposera comme une référence de la sphère pop.
Lors des MTV Vidéo Music Awards de 2003, elle s’entoure de deux pop stars au sommet de leur popularité : Britney Spears et Christina Aguilera ; chacune portant la fameuse robe de mariée. Dans un show électrisant sur Like a Virgin, Madonna se laisse même aller à un baiser langoureux avec Britney – moment d’anthologie, objet de tous les scandales.
L’influence de cette scène est telle qu’elle marquera plusieurs générations d’artistes. À l’image de J-Lo qui, des années plus tard, rend hommage à ce look iconique en le reprenant lors de sa fête d’Halloween. Bien plus qu’une simple robe, un emblème de la culture pop.
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Désormais, Madonna se prête avec plaisir au jeu de la chanteuse qui ose (tout). En 1989, la nouvelle « Reine de la Pop » offre une première performance live de son titre Express Yourself. Dans un corset noir sexy et sophistiqué, elle porte le message de cet hymne à l’émancipation féminine : soyez vous-même, tout simplement.
Un an plus tard, elle enfile le costume de Marie-Antoinette – inspiration du mouvement de la communauté LGBT américaine à la fin du XIXe siècle – pour interpréter Vogue, dans des poses lascives et exagérées. Grâce à son attitude sulfureuse et audacieuse, Madonna s’empare de combats qui lui sont chers, tels que l’émancipation des femmes ou la défense des droits des personnes queer.
Des shows ultra-osés qui nourrissent son statut d’icône de la scène pop, mais qui la plongent également au cœur de sérieuses controverses. Parce qu’il faut bien le rappeler : sans limites franchies, Madonna ne serait plus Madonna.
Sexe, politique, religion : place aux scandales
Une chose est certaine : la reine de la pop n’a que faire des polémiques. Il semble même qu’elle les provoque délibérément – comme lorsqu’elle s’attaque à un sujet aussi sensible que la religion.
Son bras de fer avec le Vatican commence en 1989, avec la sortie de Like a Prayer. Dans son clip, elle danse en tenue légère au milieu de crucifix en feu – rappel des actes odieux du Ku Klux Klan – et embrasse un saint (interprété par certains comme un « Jésus noir »), le tout sur fond d’allusions ouvertement sexuelles.
Scandale au sein de l’Eglise – inutile de le préciser. Profondément choqué par cette offense à la foi chrétienne, Jean-Paul II appelle publiquement au boycott du titre, qualifié de blasphématoire. Madonna, elle, ne se démonte pas. Au contraire, elle revendique fièrement ses choix de mise en scène : Like A Prayer dénonce fermement le racisme et l’hypocrisie religieuse.
Si la polémique entraîne la fin de son contrat avec la marque Pepsi – qui venait de publier une publicité liée à sa chanson –, ce premier affront n’arrête pas la chanteuse. Lors de sa tournée Confessions Tour en 2006, elle récidive en se présentant crucifiée sur une croix géante argentée, une couronne d’épines sur la tête.
Benoît XVI, qui lui ordonne dès lors de cesser ses provocations envers les instances religieuses, se voit gratifié d’une chaleureuse dédicace… sur le titre Like a Virgin, en direct devant le public romain. Ironie du sort.
Côté politique, la star fait également des siennes. En 1987, elle réussit à obtenir les autorisations nécessaires pour se produire en France, notamment grâce à Jacques Chirac, alors maire de la ville de Paris et Premier ministre. Sa façon de le remercier ? En plein concert, Madonna jette sa culotte sur la foule – qui d’après la légende, serait apparue sur les genoux de l’homme politique. Mythe ou réalité ? Difficile à dire, tant l’artiste aime jouer la carte du mystère.
Et puis, que serait la Madone sans son éternelle provoc’ sexuelle ? Les références érotiques sont devenues sa marque de fabrique, symbole d’une liberté sexuelle qu’elle assume entièrement.
Blond Ambition Tour, 1990. Madonna arbore le célèbre corset aux bonnets coniques, conçu sur mesure par le grand Jean-Paul Gaultier. Sur un lit en velours rouge, entourée de deux danseurs, elle livre une performance ultra-sexy sur Like a Virgin – loin de faire l’unanimité.
A la fin du morceau, elle simule une scène de masturbation. Un choc immense pour les médias conservateurs, qui qualifient cet acte d’obscène. Menacée d’arrestation à Toronto pour « atteinte à la pudeur », Madonna refuse d’obtempérer. Derrière cette énième provocation, la volonté de briser les tabous autour de la sexualité féminine. Une cause pour laquelle la star de la pop s’investit pleinement – c’est le moins qu’on puisse dire.
En 1992, elle publie SEX, un ouvrage photographique qui accompagne son cinquième album Erotica – deux titres qui annoncent d’emblée la couleur. Son contenu ? 128 pages de mises en scènes sexuelles crues et BDSM. Un projet qui, dans une Amérique puritaine, choque profondément, tant par sa violence extrême que par son male gaze évident (les photographes étant uniquement des hommes).
Bien loin de n’être qu’un vulgaire bouquin de photos érotiques, SEX tient à libérer le corps et la sexualité des femmes : « Nous vivons dans une société de répression et je parle de thèmes érotiques. Pourquoi devons-nous nous sentir honteux de notre sexualité ? » s’indigne Madonna.
Si certains artistes affirment regretter leur participation au projet, Naomi Campbell, elle, se dit admirative de cette « détermination à sortir un livre aussi audacieux sur le sexe. » L’audace, c’est précisément ce qui définit la Madone, prête à tout pour choquer, interloquer… et faire réagir.
Madonna, éternelle et indomptable
Dans une société où les femmes de plus de 30 ans sont souvent considérées comme trop vieilles pour les milieux artistiques – entre autres –, Madonna refuse catégoriquement les injonctions liées à l’âge. À 66 ans, elle arbore un style aussi sexy et excentrique qu’à ses débuts, qu’elle affiche fièrement sur les réseaux sociaux. Une liberté qui dérange – et certains ne se privent pas de le faire savoir.
Lors de son apparition à la 65e cérémonie des Grammy Awards en 2023, la chanteuse devient la cible de critiques virulentes… pour de simples gros plans sur son visage. Son discours sur la condition des personnes trans ? Complètement éclipsé par son physique, objet de toutes les attentions.
Apparence méconnaissable, chirurgie excessive, visage figé… Autant de commentaires sexistes et âgistes qui envahissent massivement les réseaux sociaux, poussant Madonna à réagir sur Instagram :
« Une fois de plus, je suis prise dans l’éblouissement de l’âgisme et de la misogynie qui imprègnent le monde dans lequel nous vivons. […] Un monde qui refuse de célébrer les femmes après 45 ans et qui ressent le besoin de la punir si elle continue d’avoir une forte volonté, de travailler dur et d’être aventureuse. »
Et même si la chanteuse de 66 ans dénonce haut et fort cette stigmatisation des femmes qui vieillissent, cela ne semble pas suffire.
En juin 2025, à l’occasion du Mois des fiertés, elle poste une série de clichés sulfureux où elle apparaît en culotte. À nouveau, les âgistes dégainent leur clavier : « Elle attend son infirmière » ou « Grand-mère allongée en sous-vêtements », peut-on lire sous sa publication.
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Si sa liberté sexuelle et ses performances provocatrices interpellaient déjà il y a trente ans, Madonna se heurte aujourd’hui à un obstacle supplémentaire : l’âge. Mais loin de reculer, elle persiste : fidèle à elle-même, libre de ses choix, elle continue d’agacer – et c’est peut-être finalement pour ça qu’elle dérange encore.