Alice Ferney est de retour. Deux ans après Les innocents (Actes Sud, 2023), l’autrice présente Comme en amour. Un récit philosophique sur les ressorts de l’amitié personnifiée par Marianne et Cyril.
Marianne est une créatrice de mode et une épouse dévouée à son foyer. Cyril est un journaliste indépendant et voit dans le couple un véritable carcan. De prime abord, rien ne destinait ces deux êtres à devenir amis. Pourtant, le jour où Cyril est chargé de faire le portrait de Marianne pour les colonnes d’un magazine, le coup de foudre amical est instantané.
Au fil des pages, Alice Ferney (L’intimité, Les bourgeois, Grâce et dénuement…) nous invite dans cette amitié inédite : celle d’une mère comblée sur qui va bientôt s’abattre le divorce avec cet oiseau de nuit ; un bachelor convoité dans tout Paris, cynique et féru de littérature. Avec Comme en amour (Actes Sud), l’un des romans les plus attendus de la rentrée littéraire 2025, l’écrivaine de La conversation amoureuse renoue avec la démonstration qui a fait le succès de son chef-d’œuvre. Sauf qu’ici, aux tribulations de l’amour, Alice Ferney oppose une réflexion sur l’amitié.
L’amitié au microscope
Comment naît-elle ? Que doit-on faire pour la solidifier ? Par quels moyens peut-elle être détruite ? Alice Ferney, plutôt que de répondre directement à la question, propose de suivre les conversations de ses deux personnages. Ainsi, à travers de courts chapitres, dont les titres rappellent presque des commandements, l’autrice donne à lire un cas pratique sur l’amitié. Cependant, ses rats de laboratoire ne sont plus Pauline et Gilles, le couple de La conversation amoureuse, mais Marianne et Cyril.
À la lisière de l’essai philosophique, Comme en amour use de la fiction pour poser de véritables questions sur la vie. On se surprend alors à comprendre les confessions de Cyril sur son envie de liberté ou encore le constat de Marianne sur la création ou le travail. En dessinant les pensées et les conversations de ses personnages, Alice Ferney interroge aussi notre propre rapport à l’autre. Un exercice qui permet de cultiver l’attachement à Marianne et à Cyril. Comme si, chapitre après chapitre, on devenait, nous aussi, un ami, dépourvu de jugement sur ces deux personnages.
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L’amitié is the new amour
Malgré quelques passages balbutiants au début et des « clichés » attendus de la part des protagonistes, Alice Ferney offre une réflexion moderne sur l’amitié. À la romance grandiloquente de la littérature classique, préférerait-on désormais ce lien indéfectible et platonique ?
En tout cas, si ce thème n’est pas nouveau – et a traversé déjà les œuvres de philosophes comme La Boétie ou Montaigne –, Alice Ferney y apporte, par son ton et sa construction, une certaine comtemporanéité. Le dialogue étant la membrane principale du texte, il permet d’apporter du rythme au roman. Un jeu de ping-pong se met alors en place entre l’homme et la femme que tente d’appréhender Alice Ferney.
Autre challenge du roman, d’ailleurs : l’exercice double auquel l’autrice a dû se plier. En donnant la parole à Marianne et Cyril, elle se place de facto dans leur psyché et offre un spectacle quasi-schizophrénique. Sans jamais porter de jugement sur ses personnages, Alice Ferney parvient à se mettre à leur place, mais surtout à en dresser un portrait fidèle et solide au fil des pages.
Enfin, si l’étude de Marianne et de Cyril permet de comprendre les ressorts intimes de l’amitié, le cœur du roman concerne souvent l’amour, le désir ou encore la notion de couple. Sous cet angle, Comme en amour pourrait s’appréhender comme « la suite » de La conversation amoureuse. Alice Ferney offrant un diptyque passionnant sur les relations humaines dans ce qu’elles ont de plus viscéral, honnête, tumultueux, mais surtout de plus beau.
Comme en amour, d’Alice Ferney, Actes Sud, 304 pages, le 20 août en librairie.
