
Scandale d’ »Emilia Pérez », vidéo virale sur la déportation des migrants, backlash réactionnaire orchestré par l’administration Trump… L’actualité récente de Selena Gomez a été compliquée. Mais son album, « I Said I Love You First », enregistré avec son fiancé Benny Blanco, signe le retour d’une teen idol qui a su se réinventer.
Une vidéo selfie au format portrait, enregistrée dans une chambre à coucher. On y voit Selena Gomez, tout sourire, faire un play-back sur son nouveau titre Call Me When You Break Up, en compagnie de la chanteuse pop Gracie Abrams. Cheap et amusant, ce clip dévoilé en février contraste avec une vidéo (devenue virale) de Selena Gomez.
Fin janvier, la chanteuse et actrice partageait une story Instagram émouvante : elle y pleurait (littéralement) le sort des Mexicains déportés par les décrets anti-immigration de l’administration Trump, le président américain nouvellement réélu. Nombre d’internautes l’ont soutenue, quand l’équipe de communication de la Maison-Blanche a dégainé une vidéo parodique pour tenter de la ridiculiser. D’autres ont aussi critiqué la mise en scène de ces pleurs, jugés artificiels.
Autre « shitstorm » : quelques jours plus tard, l’affaire Emilia Pérez (des tweets racistes de l’actrice principale du film de Jacques Audiard, Karla Sofía Gascón, ont été exhumés) éclaboussait la campagne promotionnelle du long-métrage multi-nommé, l’équipe – dont Selena Gomez – se désolidarisant de leur camarade de tournage.
Un début d’année compliqué donc alors même que l’ancienne star Disney se voit reconnue par les institutions les plus prestigieuses (nomination comme Meilleure actrice dans une série musicale ou comique pour son rôle dans la série Only Murders in the Building, Meilleure actrice dans un second rôle pour sa performance dans le film Emilia Pérez de Jacques Audiard aux Golden Globes 2025). Et que l’actrice-chanteuse-entrepreneuse bénéficie toujours d’un soutien indéfectible, à la fois générationnel – ses premiers fans – et spontané.
Casser son image
« Je pense que les personnages féminins sur Disney Channel ont beaucoup de force », déclarait Selena Gomez, alors âgée de 28 ans, au magazine Allure en 2020. La jeune femme attribuait ce soutien public dont elle bénéficie à son rôle dans Les Sorciers de Waverly Place, série teen dans laquelle elle a explosé à l’âge de 15 ans.
C’était à la fin des années 2000. Et déjà certains médias ne manquaient pas une occasion de scruter ses fluctuations de poids, ses amours (et notamment sa relation avec un certain Justin Bieber), ses choix de vie… Une curieuse cabale contre une enfant-star, à l’époque mineure, adulée par des pré-adolescents et plus jeune ambassadrice de l’histoire de l’Unicef. Mais face aux « hater », Selena Gomez a agrégé une vraie communauté de fans (les « Selenators »), qui la voient comme une artiste à part entière, un modèle et la soutiennent contre vents et marées.
Au début des années 2010, « Sel » commence à changer de trajectoire. Il y a d’abord sa participation au film indépendant très remarqué, Spring Breakers (2013), signé du très hype Harmony Korine. Elle y apparaît aux côtés d’autres stars Disney comme Vanessa Hudgens, en maillot de bain, dans un univers pop et déjanté, mettant en scène drogue, alcool, sexe et violence. Exit la petite fille sage : la teen-idol casse son image.
Comme l’explique Morgane Giuliani dans son essai Féminisme et musique, son passage à l’âge adulte passera par une certaine sexualisation : tout comme Miley Cyrus et Ariana Grande, Selena Gomez commence à parler de sexe dans ses chansons, et pose nue sur la pochette de son disque Revival en 2015.
Une époque qu’elle regrette rétrospectivement : « J’ai fait des choses qui ne me correspondent pas », avouait-elle à Allure cinq ans plus tard, reconnaissant des pressions « pour apparaître plus adulte ».
Sa part d’ombre
Pourtant, le public, qui grandit en même temps qu’elle, reste fidèle : elle devient la personne la plus suivie du monde sur Instagram en 2016. C’est à cette époque que Selena Gomez prend du recul. Le temps de se concentrer sur le combat d’une vie, qui a fait d’elle l’un des chouchous des internautes : la santé mentale.
En novembre 2022, Selena Gomez met en lumière ses angoisses, ses luttes et ses doutes dans un documentaire poignant My Mind & Me, diffusé sur Apple TV. Six ans d’archives, de petites vidéos du quotidien, de moments émouvants qui permettaient de mieux comprendre la trajectoire à la fois tragique et édifiante d’une artiste qui s’écroulait en pleine tournée, en 2016, et se faisait admettre en clinique psychiatrique.
En 2017, Selena Gomez avait promu 13 Reasons Why, série Netflix impactante dont elle assurait la production exécutive. Ses thèmes ? Le harcèlement scolaire, les atteintes sexuelles, le slut-shaming, et le suicide d’une adolescente victime de harcèlemenbullying et de revenge porn. À l’époque, le traitement « graphique » de ces sujets avait fait polémique. Mais celle qui avait défendu cette série est devenue l’emblème d’une génération de stars qui assume sa santé mentale, et sert d’exemple à toute une communauté qui connaît l’hypersensibilité et l’empathie d’une star touchée elle-même par le bashing et les idées noires.
Star accessible, Selena Gomez est passée par bien des épreuves qui ont participé à la rendre encore plus proche de sa communauté de fans : un lupus envahissant, sa dépression, des problèmes de rein, et, révélé plus récemment, un trouble bipolaire, ont été autant d’obstacles que la jeune femme a réussi à surmonter. La voilà de retour avec un album (Rare en 2020), des apparitions chez Jim Jarmusch ou Woody Allen… Et une entreprise de cosmétiques adossée à un fonds pour la santé mentale (« Rare Impact Fund »), qui utilise une partie des bénéfices des produits commercialisés pour soutenir différentes initiatives dans le secteur.
Cible privilégiée de critiques en ligne, Selena Gomez choisit régulièrement de désactiver ses comptes sur les réseaux sociaux. Des pauses qui lui permettent de se recentrer, de se ressourcer et de se protéger des pressions négatives.
Dans l’intimité de la star
Malgré ses coups de mou et les polémiques, les internautes continuent de soutenir cette jeune femme qui parle à coeur ouvert de cette époque si particulière à travers ses réseaux sociaux et ses chansons. Plus engagée que jamais, Selena Gomez a soutenu, entre autres, le mouvement Black Lives Matter et réfléchit beaucoup à la question de l’immigration, elle qui a des origines mexicaines du côté de son père et italiennes du côté de sa mère. Et elle ne fait pas mystère non plus de l’évolution positive de sa vie privée.
Selena Gomez au festival de Cannes 2019
Son nouvel album, I Said I Love You First (qui sort ce 21 mars 2025) , est réalisé en collaboration avec son fiancé, le producteur Benny Blanco, et a été enregistré en parallèle de l’organisation de leur mariage.
A 32 ans, la star s’y dévoile une fois de plus et nous parle des peurs et de la vulnérabilité liées à la relation amoureuse. Dans son premier single, Scared of Loving You, dévoilé mi-février, elle partageait des moments intimes de son couple. Et la chanson Sunset Blvd revenait sur leur premier rendez-vous sur Sunset Boulevard. Un nouveau projet introspectif qui marque ainsi une nouvelle étape artistique et personnelle pour la chanteuse. Et compte embarquer une nouvelle fois sa communauté de fans.