En ces temps de déluge vocalistes féminins dans le jazz, l’arrivée de ce jeune homme à la démarche personnelle mais accessible est un bonheur…
En ces temps de déluge vocalistes féminins dans le jazz, il est doux de voir enfin apparaitre un homme ! Car ils se font rares les hommes dans ce domaine et il faut bien avouer qu’ils ont du mal à avoir du succès si ils ne font pas dans le cross-over pop façon Michaël Bublé. Pourquoi des chanteurs exceptionnels comme David Linx ou Kurt Elling n’obtiennent-ils pas le succès qu’ils mériteraient pourtant ? Une alchimie avec l’époque qui ne prend pas… ou les mystères du succès qui vient ou qui ne vient pas…
Alors donc, cet homme de 30 ans qui apparait se nomme Raphael Gualazzi et c’est un italien, vous l’auriez deviné. Grosse surprise pour moi dès le premier titre car la voix n’est pas du tout du type jazz, et le style de chant non plus. Pas de ces articulations bien liées ou les accents que l’on retrouve en général en jazz vocal mais plutôt un style plus proche de la pop ou de la variété italienne MAIS QUI SONNE JAZZ QUAND MEME ! Eberlué j’étais… c’est peut-être l’environnement musical avec beaucoup de piano qui contribue à cela, Gualazzi étant aussi très bon pianiste ayant étudié le classique et pratiqué le piano stride façon Jerry Roll-Morton.
En fait deux noms me viennent à l’esprit quand j’écoute l’album de ce monsieur : Paolo Conte et puis aussi un groupe du nom de Ben Folds Five, petit trio (comme son nom ne l’indique pas) rock indé dans lequel le leader était pianiste chanteur. Ce groupe très intéressant a splitté en 2000, malheureusement. Concernant la filiation avec Paolo Conte, on retrouve le flux vocal très généreux italien qui a comme l’angoisse du silence et ce coté nonchalant très méditerranéen. Mais on sent que Raphael Gualazzi a aussi écouté le grand Stevie Wonder qui reste une influence majeure pour tout ce qui touche aux musiques noires, jazz y compris.
Tous les titres sont des compositions de très bonne facture, autre aspect qui m’a impressionné car faire de bonnes chansons avec des mélodies qui tiennent debout toutes seules n’est pas à la portée du premier venu. Certains sont en anglais, d’autres en italien. Une exception : Caravan, un standard d’Ellington tout à la fin de l’album et qui reste instrumental. La plage 6 est une merveille dans laquelle chante la jeune Rox, excellente jeune chanteuse soul grande-bretonne dont je vous recommande le très bon premier album.
Bienvenue donc à cet inclassable qui sonne déjà classique et qui est la meilleure surprise vocale de ce début d’année car ce premier album n’est pas la résultante de l’application d’une recette mais un travail personnel passionnant et pourtant accessible à tous. Bravo !