LE CERCLE LITTÉRAIRE – Le coup de cœur de Sylvette C. (Castelnau). Comment parler de l’imprégnation des médias et des réseaux sociaux dans nos vies sinon en rapportant des faits plausibles et coutumiers dans nos habitudes contemporaines ? Delphine de Vigan se penche sur la question dans Les enfants sont rois.
Les enfants sont rois
Le coup de cœur de Sylvette C. (Castelnau)
Comment parler de l’imprégnation des médias et des réseaux sociaux dans nos vies sinon en rapportant des faits plausibles et coutumiers dans nos habitudes contemporaines ? Delphine de Vigan se penche sur la question dans Les enfants sont rois.
Deux destins contraires
Deux femmes vont se croiser : Mélanie, happée dans sa jeunesse par le Loft Story et mettant régulièrement en scène ses enfants sur YouTube ou Instagram, et Clara, flic volontaire et efficace, procédurière dans sa brigade. Elles se rencontrent alors que la fille de Mélanie a été enlevée. Kimmy était très connue, et de ce fait, la famille Diore avait gagné beaucoup d’argent. Une enquête minutieuse commence : le voisinage, les témoins, la téléphonie, les réseaux sociaux. Clara reste aux aguets, cherchant la faille dans cette disparition, tandis que Mélanie, terrifiée, se rend peu à peu compte des dommages qu’elle a cré en jetant ainsi ses enfants en pâture sur la toile. Car Kimmy était plus ou moins forcée par sa mère à tourner ces vidéos, devenues le gagne-pain de la famille : publicités incorporées, promotion des marques et des produits dérivés. Le vide juridique des enfants youtubeurs permettant en effet aux parents d’encaisser les recettes. Les lanceurs d’alerte sur les enfants esclaves des chaînes familiales, et leur intimité bafouée mettent alors l’accent sur « l’adhésion sans réserve et sans discernement à la consommation ou à l’acte d’achat, la malbouffe accueillie avec extase. »
Tout se montre, même le quotidien familial
Delphine de Vigan nous montre sans complaisance comment les réseaux sociaux comblent le vide d’une vie, et deviennent le moteur factice, sublimé, et remplacent ainsi tout le reste : « Un monde généreux, providentiel et accessible à tous. » Mais aussi l’échéance sadique et sordide qu’il en découle lorsque le piège se referme sur la famille.
Du mal-être et de la solitude partout
Des années après, lorsque le numérique a pris son envol, les pathologies liées à l’addiction sont devenues traumatisantes et irréversibles. C’est là que l’auteur, sans effets de manche, prouve que la lutte pour un futur apaisé sera difficile et sans merci.
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Parution le 4 mars 2021 – 352 pages