Direction la Lybie pour Le Passeur, le tout premier roman de Stéphanie Coste qui s’aventure sur la thématique de la traite des migrants. Pour ce faire, elle se place dans la tête d’un de ces hommes qui vend de l’espoir à celles et ceux qui voudraient tenter leur chance ailleurs, souvent en vain. Un livre courageux et documenté.
Un livre coup de poing sur les migrants
Des films sur des migrants qui tentent leur chance, en bateau ou à pied, pour trouver une terre meilleure et plus hospitalière, il y en a beaucoup. De Samba à Welcome, en passant par Va, vis et deviens, le tragique de ces situations insoutenables désormais quotidiennes, s’invite sur pellicule. Avec Stéphanie Coste, elle est également couchée sur le papier. Avec aplomb et originalité : car elle ne traite pas ce sujet du point de vue des victimes, ces migrants dont la vie se joue contre de l’argent, mais d’un de ces hommes qui leur permettent (ou non) de traverser les frontières.
Dans Le Passeur, Seyoum se confie. Nous sommes en Libye, en octobre 2015. Il avoue faire de l’espoir des autres son fonds de commerce, les migrants sont pour lui des poules aux œufs d’or. Il le dit avec cynisme, sans aucune once de pitié. C’est son métier. Un métier qui le ronge toutefois, lui qui abuse de la drogue et de l’alcool pour pouvoir tenir. Car finalement, Seyoum ne serait-il pas lui aussi victime de ce système qui broie les âmes ?
Un roman tout sauf manichéen
Tel est le talent de Stéphanie Coste : celui de parvenir à raconter l’indicible, tout en donnant presque des circonstances atténuantes à ce passeur sans foi ni loi. Car lui aussi a souffert. Au fil des pages, il confie son désarroi, son passé meurtri par la dictature en Érythrée, sa vie dans un camp, la torture et la perte de l’amour de sa vie.
Dans un roman court et nerveux, Stéphanie Coste fait se croiser bien des destins et dépeint le terrible quotidien d’un continent africain continuant de survivre au gré du terrorisme, de la famine et des guerres civiles et punitives. Un roman sombre et précis qui, paradoxalement, donne envie de croire en l’humanité et en la rédemption.
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Parution le 7 janvier 2021 – 136 pages
Le Passeur, Stéphanie Coste (Gallimard) sur Fnac.com
