L’instant Lire à la Fnac : le rendez-vous de toutes les littératures à ne pas manquer. Baptiste Liger, directeur de la rédaction du magazine Lire Magazine Littéraire, partage ses conseils de lecture. Pour le mois de septembre, décryptage de La Trajectoire des confettis de Marie-Ève Thuot.
Les Québécoises
Baptiste Liger : « On parle souvent des chanteuses québécoises à juste titre, encore que… Mais la créativité du côté de Montréal est aussi littéraire. À l’occasion de la rentrée, évoquons quelques plumes locales et féminines de talent.
Il faut savoir faire son autocritique, la littérature québécoise n’est sans doute pas assez lue en France. À cela plusieurs raisons. Tout d’abord, les éditeurs québécois ne sont pas toujours très bien diffusés dans l’Hexagone et en retour, les éditeurs français, parfois, ne s’intéressent pas forcément à ce qu’il se passe outre Atlantique et c’est bien dommage.
Il n’empêche que plusieurs grands prix littéraires ont salué la littérature québécoise. Deux prix Femina, s’il vous plaît. Tout d’abord pour Gabrielle Roy et ensuite pour Anne Hébert et ses Fous de Bassan qui ont d’ailleurs été portés à l’écran.
Le prix Médicis est, quant à lui, revenu à Marie-Claire Blais dont on parle potentiellement pour le prix Nobel de littérature, pas moins, dans les prochaines années.
Et évidemment comment oublier le Goncourt ? En effet, en 1979 les jurés ont salué Antonine Maillet pour Pélagie-la-Charrette. Il faudrait peut-être quand même que je le lise ce Goncourt-là.
Au-delà de toutes ces distinctions, on peut aujourd’hui compter sur toute une série de romancières québécoises aux univers très variés et qui montrent toute la richesse de la littérature du continent, d’ailleurs leurs ouvrages sont facilement disponibles en France.
Bon, évidemment, on pourrait s’attarder sur la très charismatique Denise Bombardier dont on a beaucoup parlé en ce début d’année en raison de l’affaire Matzneff. Mais cette polémiste, essayiste et caetera, ne doit pas faire de l’ombre à d’autres femmes de lettres de talent.
Du côté du polar, citons Andrée A.Michaud dont les romans de terreur sont absolument de petits bijoux. Du côté de la fantasy très grand public il y a aussi Anne Robillard et ses Chevaliers d’Émeraude qui ont su séduire au fil des ans de très nombreux lecteurs.
Il faut également penser à toutes ces écrivaines québécoises d’origine asiatique comme Kim Thúy. Elle avait d’ailleurs reçu le grand prix RTL-Lire pour Ru. Ou bien encore, Aki Shimazaki, qui elle, année après année, a su séduire un très large lectorat.
La Trajectoire des confettis de Marie-Ève Thuot
Enfin, j’aurais tendance à vous recommander toutes ces romancières qui ont à peu près trente ou quarante ans et qui donnent du sang neuf à toutes ces littératures comme Perrine Leblanc, comme Audrée Wilhelmy ou encore Marie-Ève Thuot dont La Trajectoire des confettis est uns des événements de la rentrée littéraire.
Avec ce premier roman, car oui, c’est un premier roman de plus de six-cents pages, on tient sans doute là une des œuvres les plus ambitieuses, les plus surprenantes mais aussi les plus stimulantes de cet automne. Bon, au départ, on pourrait être face à une fresque familiale comme il y en a tant, sur plus de deux siècles. Mais au-delà d’une chronologie éclatée, virtuose et toujours compréhensible, la grande originalité et pour tout dire, le coup de force de cette Trajectoire des Confettis c’est justement cette façon d’observer tous les protagonistes sous le joug, sous le sceau de la sexualité et ce jusque dans ses moindres recoins et qui peut nous réserver bien des surprises.
Bref, pour synthétiser, imaginez une sorte de croisement entre Cartographie des Nuages, Cloud Atlas de David Mitchell et une sorte de Michel Houellebecq féminin et féministe et vous aurez une idée de ce qui est un des coups de cœur en cette rentrée de la rédaction de Lire magazine littéraire. Tabernacle, ostie, câlisse, on adore ce livre ! »