Il est l’écrivain contemporain français le plus lu à l’étranger. Ici, on l’honore d’une distinction habituellement réservée aux figures du passé : son œuvre et sa personne sont décortiquées dans un prestigieux Cahier de l’Herne. Retour sur le parcours de Michel Houellebecq, un auteur pas comme les autres.
Hors-norme
« J’ai décidé d’arrêter de faire de la fausse modestie parce que ça se verrait… » disait Michel Houellebecq en 2005 à la sortie de La Possibilité d’une île. Si l’écrivain regarde aujourd’hui dans le rétroviseur, nul doute qu’il ne doit pas ressentir le besoin de jouer les modestes : des romans à très grand succès, plusieurs recueils de poèmes salués, une monographie sur Lovecraft, une étude sur Schopenhauer et de nombreuses expériences hors-texte (film, album de chanson, exposition) ont émaillé la carrière de celui que l’on classe désormais parmi les géants.
Romans polaires
Dès 1994, avec Extension du domaine de la lutte, le natif de Saint-Pierre de La Réunion avait trouvé une voie singulière : il allait dépeindre avec vigueur le désarroi profond du cadre moyen, de l’homme banal, rejeté à la fois par l’économie libérale et par l’économie du corps. Avec son deuxième roman, couronné de succès, Les Particules élémentaires, Houellebecq prolongeait ses problématiques existentielles d’une virulente critique de la société post-soixante-huitarde. Il allait égrener dans ses romans suivants, des polarités thématiques passionnantes à chaque fois : tourisme sexuel/terrorisme (Plateforme), réincarnation/clonage (La Possibilité d’une île), monde de l’art/amour filial (La Carte et le territoire), islamisme politique/christianisme médiéval (Soumission)…
Artiste total
Houellebecq est devenu un personnage médiatique incontournable, très à l’aise dans le rôle rieur de l’écrivain en promotion qui vend des best-sellers, mais plutôt rare, car il a réussi à se placer au-dessus de la mêlée, à susciter l’attente. Que ce soit sa prose, ses rôles au cinéma (comme dans le surréaliste Near Death Experience), ou à l’occasion d’une exposition, les éclairages sur le monde que nous offre ce pessimiste patenté (influencé par Comte, Schopenhauer, ou Tocqueville) semblent toujours trouver un écho dans ce que nous ressentons chaque jour. En le consacrant dans un recueil dédié, avec des textes signés Rushdie, Carrère, Reza, des entretiens inédits et de nombreux textes, les Cahiers de l’Herne font entrer au panthéon livresque cet ancien ingénieur agronome, diplômé en réalisation de l’école de cinéma Louis Lumière, devenu par son style travaillé mais concis, son acuité particulière, son sens de l’humour dévastateur, l’un de nos plus grands écrivains. Le dernier ?
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Sérotonine, le nouveau roman de Michel Houellebecq, est disponible en librairie depuis le 4 janvier 2019
