Le nouveau roman de Serge Joncour se joue de nos élans contraires, à travers l’attraction amoureuse d’un homme et d’une femme qui n’ont rien en commun. Pas de panique : on reste en terrain connu ! Entre ville et campagne, ce récit irrésistible s’inscrit dans la veine tendre et taquine de la fable, chère à son auteur… Paru le 17 août chez Flammarion, il fait partie des 30 sélectionnés au Prix du Roman Fnac 2016.
La campagne à Paris
On connait le penchant de Serge Joncour pour la fable en milieu rural (comme L’Écrivain national, son précédent et savoureux roman). Mutin, il brasse les mêmes ingrédients dans Repose-toi sur moi – un personnage déplacé, en situation d’exil provisoire donc d’isolement et de fragilité – mais en les inversant. Après l’écrivain parisien débarquant dans un bourg (imaginaire) du Morvan, voici Ludovic, un agriculteur reconverti dans le recouvrement de dettes, qui a dû quitter sa province pour vivre à Paris.
Le bon gros géant
Joncour n’a pas son pareil pour faire pénétrer ses lecteurs dans l’intimité de ses personnages. Et donc pour nouer une forte complicité avec eux, chacun pouvant se projeter dans les aspirations ou les tendres désordres de ces héros ordinaires. Une proximité d’autant plus immédiate qu’il affiche lui-même un lien évident avec son protagoniste masculin. Lui prêtant sinon sa vie (comme dans son roman précédent), en tout cas son allure et son physique. Ludovic, en effet, est un homme massif et doux : raccord avec son créateur. Un bon gros géant, qui dégage une force à la fois tellurique et réconfortante, comme l’écriture de Serge Joncour.
Les feux de l’amour
Autre motif familier de l’œuvre romanesque de cet écrivain prolixe : l’amour. Inattendu cette fois, voire inespéré. Un élan qui s’incarne, ici, en la personne d’Aurore, styliste reconnue dont la vie apparemment idéale va croiser celle de Ludovic, au détour d’une cour d’immeuble envahie par d’inquiétants corbeaux. Une collision improbable entre deux adultes aux antipodes, qui permet à Serge Joncour de mettre en scène, dans la veine à la fois réaliste et espiègle qui lui est chère, les aspirations éternellement contraires de l’espèce humaine. Entre solidarité et égoïsme, être et paraître, féminin et masculin. Tout cela en déjouant finement les stéréotypes. De la belle ouvrage, en somme.
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Prix Interallié 2016
Paru le 17 août 2016 – 432 pages