C’est l’un des auteurs les plus prolifiques du monde de la BD, plébiscité par le public : trois de ses albums figurent dans la sélection 2016 du prix de la BD Fnac. De la fantasy avec Thorgal au western avec Undertaker, Xavier Dorison touche à tout, avec succès. D’où vient cette énergie créatrice inextinguible ? Qu’est-ce qui fait courir le scénariste ? On lui pose la question, à l’occasion de la sortie du second tome du Chant du cygne.
La rencontre décisive
La carrière de Xavier Dorison est celle d’un autodidacte. Il passe de l’école de commerce au monde de la bande dessinée, une passion qui remonte à l’enfance. À 20 ans, il fait une rencontre décisive : « Le hasard a fait que, moi, j’ai rencontré Jean Van Hamme. J’étais étudiant, je rêvais de devenir scénariste. J’avais l’occasion de passer une journée avec lui, c’est une journée que je n’oublierai jamais ! ».
Il publie en 1997 Le Troisième Testament, en collaboration avec Alex Alice, et rencontre un succès immédiat. Aujourd’hui, 20 ans après le maître Van Hamme, Dorison reprend la série historique Thorgal, et l’un de ses spin-off, Kriss de Valnor. Il vit pleinement son rêve de gosse, les yeux grand ouverts.
Le Chant du Cygne
Le monde est son terrain d’observation, le passé, son matériau préféré. C’est qu’il a quelques obsessions, Dorison, que l’on découvre quand il évoque la genèse du Chant du Cygne : « Il y a quelques années, j’ai lu Le Roman vrai de la Troisième République et j’ai découvert cette histoire incroyable d’un groupe de soldats qui décide de quitter ses positions pendant la Bataille du Chemin des Dames et de monter à Paris… »
La Première Guerre mondiale, l’un de ses thèmes de prédilection : « Ça fait longtemps que je traite ce sujet. C’est vraiment une période que j’aime beaucoup. » Pour Le Chant du Cygne, il s’allie avec Emmanuel Herzet. À deux, ils brassent une quantité monstrueuse de documents historiques, construisent une histoire âpre et brutale et imaginent le road-trip tragique de soldats mutins. Dorison fait ainsi son entrée dans la mythique collection « Signé » des éditions Le Lombard.
« Ce diptyque, c’est l’histoire d’un groupe de gens qui vont vivre un dernier moment de grâce, et un dernier moment de justice, de beauté, dans ce printemps 1917, avant de mourir. »
Le mantra : « Ne pas emmerder le lecteur »
À travers l’exploration de terres inconnues et les récits d’évasion, il applique à la lettre le conseil de son idole : « Quand j’ai commencé, Jean Van Hamme m’a dit » ton premier devoir, c’est de ne pas emmerder le lecteur ! » L’atout de Xavier Dorison : son humour caustique, allié à une grande curiosité et à une imagination débordante.
« J’aime les histoires de genre : du western, de l’histoire de guerre, du super-héros, du polar… Ce que j’essaie de faire, c’est des histoires qui puissent divertir les gens, et faire passer une expérience et un peu de sens. »
Divertir, oui, mais divertir intelligemment. Et les projets ne manquent pas. Sa série d’anticipation, HSE, sera bientôt adaptée à la télévision. Le scénariste travaille actuellement à une nouvelle série avec Joël Parnotte. Une intrigue dans le Sud de la France, où une aristocrate désargentée se pare de fantastique… Une nouvelle série pour un nouveau genre, que l’éditeur de Dorison appelle volontiers de la « Pagnol Fantasy ».
Le bilan ?
Déjà 20 ans d’une carrière bien remplie, qui se construit au fil des rencontres : Alex Alice, Mathieu Lauffray, Fabien Nury, Ralph Meyer… « J’ai d’abord une chance démente d’avoir rencontré ces gens-là ! ». L’heure du bilan a sonné : « Je vois que je vieillis. Il y a des choses qu’on n’ose plus faire mais, ce qu’on fait, on essaie de le faire un peu mieux. La vraie difficulté, c’est de trouver des sujets pour se renouveler. » Derrière le scénariste prolifique, on devine l’éternel perfectionniste, qui saura nous surprendre à coup sûr. On attend la suite avec impatience.