Œuvre monumentale nourrie de mysticisme et d’audace, Lux marque un tournant dans la carrière de Rosalía. La chanteuse catalane y déploie un langage universel mêlant orchestre symphonique, polyphonie et ferveur spirituelle, pour un résultat unanimement encensé par la critique.
Trois ans après Motomami, manifeste pop polymorphe qui l’avait consacrée artiste mondiale, Rosalía Vila Tobella est de retour avec Lux, un tout nouvel album dont la sortie est prévue ce 7 novembre. Dix-huit titres, 13 langues, un orchestre symphonique : la Catalane signe ici une œuvre liturgique et radicalement personnelle.
« J’ai toujours entretenu une relation très personnelle avec Dieu, mais ce n’est qu’aujourd’hui que je me suis sentie suffisamment armée pour lui consacrer un album », a-t-elle confié dans un entretien au Monde. Inspirée par les figures de Jeanne d’Arc, Olga de Kiev ou Rosalie de Palerme, elle mêle mysticisme et féminité dans un disque aux accents d’oratorio contemporain.
Un album total
Enregistré avec le London Symphony Orchestra, Lux marque une rupture assumée avec les expérimentations électroniques de Motomami. « Un disque liturgique en forme de geste d’émancipation et d’une puissance sidérante », décrit Les Inrocks, qui évoque également « une œuvre à la gloire des saintes, où chaque morceau devient mini-ballet ».
L’album, presque entièrement acoustique, conjugue chœurs d’enfants, arrangements classiques et envolées polyglottes, du sicilien au mandarin. Rosalía y convoque Björk, Estrella Morente ou encore Sílvia Pérez Cruz.
Le pari du sacré dans la pop
Les critiques saluent unanimement le courage d’une artiste qui refuse la facilité. The Guardian, qui lui octroie cinq étoiles, parle d’un « album qui exige de la concentration », une réaction à « la décharge de dopamine éphémère » des réseaux sociaux.
La chanteuse, désormais âgée de 33 ans, assume cette exigence. « Si je le pouvais, j’aurais chanté dans toutes les langues du monde », ajoute-t-elle à l’Associated Press. Cette approche maximaliste, à la croisée du classique et de l’avant-garde, traduit sa volonté de « créer un lien avec le monde par les mots et les mouvements sonores ».
Voix divine et sensualité
Derrière la ferveur spirituelle, la passion demeure. Une tension entre colère et transcendance nourrit l’émotion du disque. Rolling Stone salue une « voix remarquable, plus forte que jamais, même au cœur d’un accompagnement foisonnant ». The Guardian souligne ces « feux d’artifice de talent », capables de passer « du fado au rap, du Royal Opera House à la rue ».
Pour Le Monde, Lux est « une œuvre éminemment européenne », un disque qui « propose une musique radicale, mais qui reste accessible », selon Xavier de Rosnay, membre du duo Justice, interrogé par le quotidien français.
À l’opposé du formatage algorithmique, Rosalía ose l’ampleur et la lenteur. Ses 13 langues deviennent autant d’instruments, ses collaborations des phares éclairant un parcours d’indépendance et de foi. « Yo me transformo », chantait-elle sur Motomami note Les Inrocks. Avec Lux, elle ne se conforme toujours pas : elle s’élève.