Après une première saison saluée pour son audace, Mercredi revient sur Netflix avec un second chapitre très attendu. La série tente de renouveler son intrigue sans renier son identité, mais derrière l’accumulation de mystères et le soin esthétique, cette nouvelle salve d’épisodes révèle une ambition freinée.
Tout le monde la regarde. Les élèves de Nevermore la vénèrent. Le nouveau principal s’en méfie. Un harceleur anonyme l’épie dans l’ombre. Depuis qu’elle a sauvé l’Académie, Mercredi Addams, incarnée avec toujours autant de flegme par Jenna Ortega, est devenue une figure centrale de son monde. Star malgré elle, elle cristallise les attentes tout comme la série elle-même, de retour sur Netflix depuis le 6 août.
Pour ce début de second chapitre, le défi est de taille : maintenir le cap sans se répéter. La première saison avait frappé juste, avec un ton original, un univers gothique à mi-chemin entre le teen drama et le thriller surnaturel et une mise en scène burtonienne. Pour cette suite, l’effet de découverte s’est naturellement estompé, obligeant le cinéaste à injecter de nouveaux mystères pour relancer la machine. Avec plus ou moins d’équilibre.
Un millefeuille narratif plein de promesses
L’épisode inaugural prend soin de poser les jalons d’une intrigue dense. Plusieurs pistes s’entrelacent : l’arrivée de Pugsley (le petit frère) à Nevermore, la présence renforcée de la famille Addams – avec un père et une mère (joués par Luis Guzmán et Catherine Zeta-Jones) plus impliqués –, ou encore l’hostilité ambiguë du nouveau directeur, dont les intentions restent troubles.

Mais surtout, la tension monte lorsqu’un détective privé, puis l’ancien shérif Galpin (le père de Tyler), sont retrouvés morts, les yeux arrachés par des corbeaux – clin d’œil évident et appréciable à Hitchcock. Une menace diffuse s’installe, sans que l’on en cerne immédiatement les contours.
Côté paranormal, Mercredi tente désormais de contrôler ses visions, douloureuses, mais révélatrices. Cette capacité, qu’elle apprend à canaliser, ajoute une couche de vulnérabilité à son personnage. Et comme toujours, elle ne manque pas de répondre aux situations les plus sombres avec des traits d’esprit cinglants : Ortega convainc à nouveau dans l’exercice du sarcasme et du mépris.
Fidèle, mais l’audace en moins
Visuellement, la série poursuit dans la même lignée. Teintes sombres, cadrages soignés et clins d’œil à l’univers de Burton s’invitent jusque dans quelques séquences animées, réussies, qui rappellent Les noces funèbres ou Frankenweenie.

Dans cette première moitié de saison, certains moments surnagent. On pense notamment à la confrontation entre Tyler et Mercredi dans le deuxième épisode, brève, mais intense, nourrie de ressentiment et de rancune. Un instant qui laisse entrevoir ce qu’aurait pu être la série si elle avait pleinement embrassé sa part d’ombre…

Car à force de multiplier les pistes, le show semble parfois hésiter sur la direction à suivre. L’intrigue du harceleur, par exemple, censée porter la tension principale, s’étiole rapidement, rejoignant les arcs secondaires plus ou moins consistants. Cette dispersion narrative donne le sentiment d’un récit qui cherche à contenter tous les registres, au risque de brouiller sa propre singularité.
Un potentiel freiné par la prudence
Et c’est peut-être là que réside la limite la plus flagrante de ce second chapitre : sa retenue. On nous avait promis un ton « plus sombre », mais cette noirceur annoncée reste superficielle. Encore une fois, Netflix préfère manifestement lisser les angles plutôt que de prendre le risque d’une véritable rupture de ton.

Le potentiel horrifique est esquissé, mais rarement assumé ; les idées visuellement fortes sont là, bien que souvent recyclées. Et malgré l’univers singulier que continue d’habiter Ortega, l’écriture paraît hésitante, comme prisonnière d’un cahier des charges.

En définitive, ces quatre premiers épisodes restent efficaces, agréables à suivre, portés par un rythme soutenu, un humour noir calibré et une réalisation soignée. Mais ce qui faisait le sel de la saison 1 – cette capacité à s’imposer comme un objet étrange, audacieux, résolument différent – semble s’éroder. La série, à l’image de son héroïne, est trop scrutée : cela pousse, parfois, à faire moins de vagues.