[Rentrée littéraire 2025] Antoine Sénanque est de retour avec Adieu Kolyma, un récit aussi romanesque que politique sur l’un des lieux les plus méconnus de l’histoire russe.
Deux ans après Croix de cendre (2023, Grasset), Antoine Sénanque est de retour en librairies avec Adieu Kolyma, un récit romanesque aux confins de la Russie. Pour son nouveau roman, l’écrivain et neurologue français a, en effet, choisi d’embarquer ses lecteurs dans le Grand Est sibérien afin de raconter l’histoire de Sylla Bach. Surnommée « la tueuse de chiennes » et internée pendant neuf ans à la Kolyma, notre héroïne a longtemps été le bras droit des pires truands, notamment celui de la famille Vadas, une fratrie qui depuis la mort de Staline, en 1953, a fait fortune dans les mines d’or.
Échappée de la Kolyma vivante — une région abritant des camps de travail forcé miniers — Sylla est accusée d’avoir trahi le clan. La sortie de prison de Lazar Vadas va, par ailleurs, compliquer la situation et obliger la jeune femme à prendre les armes, à protéger celle qu’elle aime, mais surtout à traverser l’Europe de l’Est. Toutefois, ce périple va forcer Sylla — ainsi que toute cette galaxie de personnages composant l’œuvre d’Antoine Sénanque — à revenir là où tout à commencer ; à Magadan, au cœur de la Kolyma.
Avec cette nouvelle histoire, l’auteur révélé grâce Blouse (2004, Grasset), portrait aux vitriols de ses années de médecine, offre une œuvre d’envergure, peuplée de nombreux personnages, au destin quasiment « shakespearien », comme le précise la quatrième de couverture, éditée par Grasset. Selon la maison d’édition, Antoine Sénanque réunit dans Adieu Kolyma « l’amour, la mort, la guerre ; les liens du sang rompus, la loi des clans trahie et les corps désunis » dans un livre qui mêle la fiction à la réalité des camps russes.
L’enfer des goulags
Roman en forme de règlement de comptes, Adieu Kolyma apparaît comme un livre de mafieux sur l’Europe de l’Est des années 1950. Mais au-delà du genre et des personnages, Antoine Sénanque s’attache à décrire « le monstre géographique et historique ». En effet, dans un entretien accordé aux éditions Grasset, l’auteur explique avoir voulu prendre pour décor cet enfer des glaces, ce « crématoire blanc » comme il l’appelle, dans lequel « Staline a construit les pires goulags de son ère entre les années 1930 et les années 1950 ».
Ce récit a pour point de départ la rencontre d’Antoine Sénanque avec les mémoires du dissident politique, Varlam Chalamov, dans lesquelles il raconte ses 17 années de détentions dans les camps de la Kolyma. Un parcours de vie percutant qui a profondément changé la vision de l’humanité du prisonnier. « Pour Chalamov, l’expérience concentrationnaire a montré que l’homme ne valait plus rien, que l’humanité était damnée » explique Antoine Sénanque, toujours dans la même vidéo, comme pour donner une consistence à ces personnages. Toutefois, et bien qu’ils soient tous « damnés », se pose, à travers les pages, en figure d’espoir, Sylla Bach, une anti-héroïne plus humaine qu’il n’y paraît, qui va devoir revenir à la Kolyma pour accomplir son destin.
À la fois roman noir, d’aventure, mais aussi roman d’amour, Adieu Kolyma, outre sa volonté de mettre en scène la pègre post-stalinienne, est également imprégné d’un propos politique fort visant à mettre en lumière un pan oublié par l’histoire russe, mais surtout un lieu qui « n’existe aujourd’hui plus que dans la mémoire des personnages » d’Antoine Sénanque. Adieu Kolyma est à découvrir en librairies le 27 août 2025.