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Cette influenceuse qui gagne 10 000 euros par mois n’existe pas

30 novembre 2023
Par Kesso Diallo
Aitana est un robot imaginé par le designer espagnol Rubén Cruz et l’agence de mannequins artificiels The Clueless.
Aitana est un robot imaginé par le designer espagnol Rubén Cruz et l’agence de mannequins artificiels The Clueless. ©Capture d'écran / Clueless

Appelée Aitana Lopez, cette influenceuse espagnole a été générée par l’intelligence artificielle.

Mannequin espagnol de 25 ans, Aitana Lopez s’est fait un nom sur les réseaux sociaux grâce son apparence parfaite, très sexualisée et ses cheveux roses. Comptant 172 000 abonnés sur Instagram, cette influenceuse n’est pourtant pas réelle. Comme d’autres, elle a été créée à partir de l’intelligence artificielle (IA). Il s’agit en réalité d’un robot imaginé par le designer espagnol Rubén Cruz et l’agence de mannequins artificiels The Clueless.

« Aitana est une femme forte et déterminée, indépendante dans ses actions et généreuse dans sa volonté d’aider les autres », indique l’agence sur son site. Dépeinte comme une influenceuse passionnée de fitness, elle peut gagner jusqu’à 10 000 euros par mois, mais la moyenne se situe autour de 3 000 euros, selon son créateur. « Nous l’avons fait pour pouvoir mieux gagner notre vie et ne pas dépendre d’autres personnes qui ont des egos, des manies ou qui veulent juste gagner beaucoup d’argent en posant », a expliqué Rubén Cruz à Euronews.

Plus qu’une image

Aitana a en effet été créée alors que l’agence traversait une période difficile, n’ayant pas beaucoup de clients. « Nous avons commencé à analyser notre façon de travailler et avons réalisé que de nombreux projets étaient suspendus ou annulés en raison de problèmes indépendants de notre volonté. Souvent, c’était la faute de l’influenceur ou du mannequin et non à cause de problèmes de conception », a déclaré le designer. Ils ont ainsi décidé de créer leur propre influenceur.

La vie d’Ataina est créée par l’équipe de l’agence, qui décide ce qu’elle fera dans la semaine, des endroits qu’elles visitera et des photos qui seront publiées. Les gens « suivent des vies, pas des images », a expliqué Rubén Cruz, raison pour laquelle ses créateurs ont été chargés de « raconter une histoire »« Aitana a fait l’objet de beaucoup de réflexion. Nous l’avons créée en fonction de ce que la société aime le plus. Nous avons réfléchi aux goûts, aux passe-temps et aux niches à la mode ces dernières années », a-t-il ajouté.

Une initiative réussie, mais critiquée

Outre ses fans en ligne, Aitana gagne un peu plus de 1 000 euros par annonce et est récemment devenue l’égérie de Big, une société de suppléments sportifs. Une part de ses revenus provient aussi des photos d’elle en lingerie publiées sur Fanvue, une plateforme similaire à OnlyFans. Bien que son profil précise qu’il s’agit d’un modèle artificiel, certains ignorent qu’elle n’est pas réelle et lui envoient des messages privés pour l’inviter à sortir avec eux. C’est par exemple ce qu’a fait un acteur latino-américain suivi par 5 millions de personnes, a révélé Rubén Cruz, sans dévoiler son identité. 

Après un tel succès, les designers ont créé un deuxième modèle artificiel « un peu plus timide » appelé Maia. À noter que leurs noms n’ont pas été choisis au hasard, contenant tous les deux l’acronyme d’intelligence artificielle en anglais (AI).

L’agence a par ailleurs reçu des demandes de marques souhaitant avoir leur propre modèle personnalisé. « Elles veulent avoir une image qui n’est pas une personne réelle et qui représente les valeurs de leur marque, afin qu’il n’y ait pas de problèmes de continuité si elles doivent licencier quelqu’un ou s’ils ne peuvent plus compter sur eux », a déclaré Rubén Cruz. L’utilisation de ces modèles virtuels permet également aux entreprises de réduire leurs coûts en n’employant pas des célébrités qui demandent beaucoup d’argent pour leur contrat de sponsoring, telles que Kim Kardashian. The Clueless estime que sa stratégie pourrait faire baisser les prix du marché et donner aux petites entreprises la possibilité de créer des campagnes publicitaires qu’elles n’auraient pas pu s’offrir autrement.

L’initiative de l’agence a cependant fait l’objet de critiques, beaucoup craignant que les jeunes cherchent à atteindre la perfection irréaliste des influenceuses. Leur image très sexualisée a aussi été critiquée. « Si on ne suit pas cette esthétique, les marques ne seront pas intéressées. Pour changer ce système, il faut changer la vision des marques. Le monde en général est sexualisé », a répondu l’agence.

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Article rédigé par
Kesso Diallo
Kesso Diallo
Journaliste