Cette instance consultative indépendante vient de publier une note dans laquelle elle émet des recommandations pour compléter le projet de loi de régulation du numérique.
Le mois dernier a été présenté un projet de loi « visant à sécuriser et réguler l’espace numérique ». Alors qu’il sera déposé sur le bureau du Sénat dans les prochains jours, le Haut Conseil à l’Égalité (HCE) – instance consultative indépendante – considère qu’il est incomplet concernant la pornographie en ligne. Raison pour laquelle il a publié une note lundi, dans laquelle il émet des « recommandations concernant les violences en ligne contre les femmes et les filles, grandes oubliées du projet de loi, afin d’inspirer des amendements au gouvernement et au Parlement ».
Le HCE prévoit de publier un rapport sur les violences sexistes et sexuelles dans l’industrie pornographique, mais il considère qu’il ne faut pas attendre pour participer au débat. « On ne plus tolérer qu’en 2023, alors que les droits des femmes constituent pour la seconde fois la grande cause du quinquennat, l’industrie pornographique prospère sur la haine et la violence contre les femmes, dans l’indifférence et l’impunité la plus totale », a déclaré l’instance.
De nouvelles compétences pour mieux réguler la pornographie
Pour le HCE, il est nécessaire que les contenus illégaux soient éliminés au plus vite, ce qui ne rendrait plus possible – ou intéressant financièrement – de se lancer dans la production, la diffusion ou l’hébergement de vidéos pornocriminelles. Il propose ainsi que « la diffusion et l’hébergement des vidéos criminelles présentant, de manière non simulée, des actes de torture et de barbarie, des traitements inhumains et dégradants ou des viols, soient illicites ». Selon l’instance, il faudrait aussi que les diffuseurs et les hébergeurs de ces contenus soient sanctionnés avec des amendes pouvant aller jusqu’à 6% de leur chiffre d’affaires.
Le HCE recommande également d’étendre les compétences de PHAROS, site permettant de signaler les contenus illicites, et de l’Arcom, régulateur de l’audiovisuel. Actuellement, le premier peut uniquement retirer, bloquer et déréférencer des contenus terroristes et pédopornographiques. Le HCE souhaite étendre ces capacités aux contenus « présentant des actes de torture et de barbarie, des traitements inhumains et dégradants, et des viols ».
Doté de nouvelles compétences, l’Arcom pourrait, lui, prendre le relais de PHAROS lorsque des signalements effectués sont restés sans suite. L’autorité pourrait ainsi « être saisie afin de contrôler également la conformité des refus de blocage et ordonner à PHAROS le retrait, le blocage, ou le déréférencement ». Elle serait aussi chargée, en concertation avec le HCE, de mettre en place une nouvelle obligation pour les plateformes. Ces dernières seraient tenues de « mesurer le sexisme de leurs contenus les plus vus en France grâce à une batterie d’indicateurs (ou à un outil algorithmique) ».
Un « droit de retrait effectif » pour les victimes
Pour mieux protéger les femmes et les filles dans l’industrie pornographique, le HCE propose en outre que « toute image, représentation d’un·e mineur·e ou d’une personne dont l’aspect physique est celui d’un·e mineur·e à caractère pornographique soit interdite, quel que soit l’âge de la personne filmée ». Autrement dit, cela reviendrait à supprimer la phrase « sauf s’il est établi que cette personne était âgée de dix-huit ans au jours de la fixation et de l’enregistrement de l’image » de l’article 227-3. L’instance accuse PHAROS de s’en servir pour justifier son refus de retirer des contenus pédopornographiques.
Enfin, le HCE souhaite un « droit de retrait effectif » de tout contenu à caractère sexuel si la personne filmée ou photographiée l’exige. Cela, à tout moment et sans justification. Selon lui, les victimes devraient être en mesure d’obtenir un retrait rapide de ces contenus, même si elles ont préalablement donné leur accord. « Ce contenu manifestement illicite doit pouvoir faire l’objet d’un signalement, et d’un retrait en 48h par la plateforme, sous peine de sanctions financières lourdes », a indiqué l’instance.