Selon Politico, Qwant chercherait à obtenir 8 millions d’euros du géant chinois Huawei. L’opération, qui permettrait au moteur de recherche français de financer son développement, donne matière à discussion.
Le français Qwant pourrait se rapprocher du géant chinois des télécoms Huawei. Selon les informations du média Politico, le moteur de recherche français souhaiterait faire appel à Huawei pour financer son développement. Jean-Claude Ghinozzi, PDG de Qwant depuis le début de l’année 2020, aurait demandé aux actionnaires d’accepter un financement de 8 millions d’euros sous forme d’obligations convertibles, via la branche capital-risque de Huawei. Cette décision aurait pour but de consolider les défenses du moteur de recherche tricolore, qui mise sur le respect de la vie privée de ses utilisateurs pour se différencier.
Soutenu par le gouvernement français et par la commissaire européenne à la Concurrence Margrethe Vestager, Qwant fait régulièrement l’objet de controverses depuis ses débuts. La jeune pousse française, qui tente de s’imposer face au mastodonte américain Google sur le marché européen de la recherche en ligne, n’a pas complètement répondu aux attentes et a connu une année 2020 mouvementée.
En plus du départ d’Éric Léandri de son poste de président-directeur général, la société a enregistré celui de Tristan Nitot (VP Advocacy), qui indiquait en mars 2020 que “le cœur n’y était plus”. Ces changements d’organisation doivent permettre à Qwant de se rapprocher de l’équilibre en 2021 et d’atteindre de nouveaux objectifs. Cela passe notamment par un déploiement plus large en Europe, comme l’expliquait début avril l’AFP.
Néanmoins, la décision de se tourner vers Huawei pour financer son développement peut surprendre. Au cœur de tensions géopolitiques, le sulfureux géant chinois est sous surveillance depuis plusieurs mois dans de nombreux pays occidentaux, y compris la France. Banni de Grande-Bretagne et de Suède dans les équipements pour les réseaux 5G – mais pas totalement en France –, Huawei est également devenu persona non grata aux États-Unis. Soupçonné d’espionnage, le géant des télécoms peine à exporter ses smartphones depuis son placement sur liste noire par les autorités américaines.
Malgré cette situation, le site Politico affirme que la Caisse des Dépôts – actionnaire de Qwant – soutient l’opération et “n’a pas vu de problème, considérant que Huawei n’avait pas la main sur la conversion en action de ses obligations”, explique Elisa Braün, reporter pour Politico Europe. Si ce soutien financier se confirme, Huawei pourrait toutefois disposer d’un droit de regard sur les activités de Qwant.
Un financement qui ne passerait pas inaperçu
Les deux firmes se sont déjà rapprochées l’an dernier en signant un partenariat inattendu. Privé de Google et de ses services, Huawei s’est tourné vers Qwant comme moteur de recherche sur ses smartphones.
Selon un porte-parole de Qwant, cet investissement ne serait qu’une nouvelle étape dans le partenariat existant : “Concrètement, avec son investissement obligataire, Huawei aide Qwant à se développer et à gagner en envergure au niveau européen pour tous les smartphones de la marque qui seront mis sur le marché en France, en Allemagne et en Italie.”
Alors que le débat fait rage autour de la souveraineté technologique, ce financement par un géant au cœur des tensions ne passerait pas inaperçu. Récemment embarqué dans la reprise de Shadow, le fondateur d’OVHCloud, Octave Klaba, qui a l’ambition de développer une alternative européenne aux solutions Microsoft Office 365 et Google G Suite, s’est fendu d’un court commentaire sur Twitter : “coucou, je suis là”.