Alors que la loi visant à offrir un espace numérique plus sûr pour les utilisateurs vient d’entrer en vigueur, l’Union européenne s’inquiète des changements effectués par Elon Musk sur le réseau social et au sein de l’entreprise depuis qu’il a racheté Twitter.
« En Europe, l’oiseau volera selon nos règles européennes ». C’est ce qu’a tweeté Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, en réponse à Elon Musk annonçant avoir racheté Twitter fin octobre. Il faisait allusion à la législation sur les services numériques – aussi connue sous le nom de Digital Services Act (DSA) – entrée en vigueur ce mercredi. Adoptée en avril par l’Union européenne (UE), elle vise à offrir un environnement numérique plus sûr pour les utilisateurs et impose de nouvelles obligations aux plateformes. « Chers utilisateurs de Twitter, votre liberté d’expression est votre droit fondamental. Il en va de même pour votre sécurité en ligne », a déclaré Margrethe Vestager, vice-présidente de la Commission européenne chargée de la concurrence.
Des changements inquiétants
Le réseau social, qui devra se conformer à ce règlement, suscite des inquiétudes avec les changements apportés par Elon Musk. Selon le Financial Times, les régulateurs européens sont notamment préoccupés par la nouvelle formule payante, Twitter Blue, qui permettra aux utilisateurs de payer pour être certifiés sur la plateforme. Lancée le 9 novembre, elle a été suspendue à la suite d’une utilisation abusive de cette fonctionnalité. De nombreux comptes ont en effet usurpé l’identité de célébrités ou de grandes entreprises. « Le relancement de Blue Verified est repoussé au 29 novembre pour être sûr qu’il soit béton », a annoncé Elon Musk ce mardi, ajoutant que « tout changement de nom causera la perte de la coche bleue jusqu’à ce que le nom soit vérifié par Twitter ».
Les responsables de l’UE s’inquiètent aussi du départ de plusieurs dirigeants de Twitter. Si certains, comme l’ancien PDG Parag Agrawal, ont été licenciés par le milliardaire, d’autres – en désaccord avec le nouveau patron – ont choisi de démissionner. C’est le cas de Yoel Roth, responsable de la sécurité du réseau social, Damien Kieran, en charge de la protection des données, ou encore de Marianne Fogarty, la cheffe de conformité. Ils jouaient pourtant un rôle clé dans les relations avec les régulateurs ainsi que dans la mise en application des nouvelles règles de l’UE par Twitter. Elon Musk a par ailleurs licencié des employés chargés de lutter contre la haine en ligne et mis fin aux contrats de milliers de sous-traitants s’occupant de la modération des contenus sur le réseau social.
Un test pour l’Union européenne
Pour l’eurodéputée Christel Schaldemose, qui va présider un groupe sur la mise en œuvre du DSA, l’affaire Twitter pourrait être l’occasion de tester l’application de cette loi pour la première fois. « Si l’UE ne s’assure pas que le règlement DSA s’applique à Twitter, ce serait un échec », a-t-elle affirmé auprès du Financial Times. Les représentants de l’entreprise devraient rencontrer des responsables de l’UE plus ce mois-ci afin de discuter de ce que ces nouvelles règles signifient pour la plateforme. Si elles ne sont pas respectées, Twitter risque des amendes pouvant aller jusqu’à 6% de son chiffre d’affaires mondial. Le réseau social pourrait même être banni de l’UE par la Commission en cas d’infractions graves répétées.
En attendant de rencontrer les responsables de l’UE, Twitter a tenté d’atténuer certaines inquiétudes lors d’une réunion cette semaine avec la Commission irlandaise de protection des données (DPC), l’autorité de référence pour les grandes entreprises de la tech dont le siège européen est installé dans le pays. Pour remplacer Damien Kieran, Renato Monteiro a été nommé responsable par intérim de la protection des données par l’entreprise. Graham Doyle, commissaire adjoint de la DPC, a aussi déclaré que l’autorité continuerait de surveiller la situation de Twitter.