Avec Trois mille ans à t’attendre, George Miller troque le monde chaotique de Mad Max pour une œuvre plus intimiste. Un récit porté par Tilda Swinton et Idris Elba, à découvrir dès aujourd’hui au cinéma.
On n’a peut-être pas attendu 3 000 ans le retour de George Miller derrière la caméra, mais on peut tout de même considérer que le réalisateur australien à qui l’on doit Mad Max: Fury Road (2015) a pris son temps avant de reprendre le chemin des plateaux de cinéma. Après sept ans d’absence, le cinéaste revient enfin dans les salles obscures ce mercredi 24 août pour un projet unique, adapté de la nouvelle d’A.S. Byatt, Le Djinn dans l’œil-de-rossignol (Denoël, 1999).
Présenté cette année hors compétition au Festival de Cannes et porté par Tilda Swinton et Idris Elba, Trois mille ans à t’attendre filme la rencontre fortuite d’Alithea Binnie avec un génie. Après l’avoir libéré, elle se voit offrir trois vœux. Or, cette éternelle célibataire, sans aucun désir, se trouve bien incapable d’en formuler un. S’ensuit alors une conversation passionnante entre les deux personnages – conversation loin d’être sans conséquence.
George Miller en toute intimité
La première partie du film alterne entre le huis clos prenant qui a lieu dans la chambre d’hôtel d’Alithea et les flashbacks immersifs du génie. À l’image de sa nouvelle maîtresse, il narre les anciens récits de sa captivité – et on se retrouve alors pris dans les histoires du djinn, tel un conte. Les légendes des Mille et une nuits prennent une nouvelle dimension devant la caméra de George Miller, qui s’offre une mise en scène chaude et envoûtante, à mesure que l’on découvre les péripéties du génie.
On reconnaît la filmographie du réalisateur par l’abondance d’images à l’écran, le travail sur les décors et l’architecture, les créatures fantastiques… Cette fois-ci, George Miller nous embarque dans la légende de la lampe magique pour livrer un film véritablement intimiste. La chambre d’hôtel et l’appartement d’Alithea contrastent ainsi avec les intérieurs des majestueux palais.
Selon ses propres dires, George Miller voulait réaliser « un anti-Mad Max ». Pourtant, Trois mille ans à t’attendre réunit les éléments rock’n’roll qui font le charme de sa filmographie, tout en prenant le parti de resserrer la focale sur un duo inédit.
Un conte de cinéma
Une dichotomie esthétique et scénaristique qui permet de mettre en avant la richesse et le pouvoir des histoires. Comme dans un conte philosophique, les deux personnages vont évoluer au gré de leur rencontre et de leurs discussions. Ils apprennent de leur relation et tentent de comprendre leurs désirs. Les récits du djinn permettent ici de sonder l’âme humaine et de trouver la vérité.
Mais le film se veut également un conte romantique. À travers le djinn, Alithea réalise en effet qu’elle a besoin d’amour, malgré sa force de caractère. Cependant, Miller a l’intelligence d’interroger profondément ce paramètre : est-il réel, ou s’agit-il d’une façon de contrer la solitude ?
Ce questionnement est ici personnifié par Tilda Swinton et Idris Elba : un duo de cinéma épatant, bourré d’alchimie. Si la première assume depuis toujours un éclectisme de jeu impeccable, il est intéressant de découvrir le second dans un rôle plus travaillé. Loin des blockbusters comme Fast and Furious: Hobbs & Shaw (2019), The Suicide Squad (2021) ou le prochain Beast (2022), l’acteur britannique livre ici une performance inédite et sensible, un génie atteint de spleen.
Trois mille ans à t’attendre est un film rempli de poésie, dans lequel l’esthétisme est au service de l’histoire. Plus qu’un récit métaphorique, c’est aussi un récit de cinéma dans lequel George Miller distille des références à sa filmographie, tout en offrant un long-métrage profond et inédit. Une création finalement tendre, philosophique, et portée par un duo irrésistible.
Trois mille ans à t’attendre, de George Miller. Avec Tilda Swinton et Idris Elba. 1h48. En salle depuis le 24 août 2022.
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