Récits de voyages, voyages dans le temps, dans l’histoire, dans l’espace, ou encore voyages à la découverte de soi ou de l’autre… La bande dessinée se prête bien à ce motif narratif central à la littérature occidentale, qui ne se cantonne heureusement pas aux écrivains-voyageurs. Sélection.
1 Ne m’oublie pas, d’Alix Garin
Marie-Louise souffre de la malade d’Alzheimer. Refusant de la laisser dépérir à l’Ehpad dans lequel elle a été placée, sa petite-fille Clémence décide sur un coup de tête de la kidnapper. Commence alors une cavale mouvementée pour emmener une dernière fois Marie-Louise à sa maison d’enfance, à l’autre bout de la France. Première BD d’Alix Garin, Ne m’oublie pas aborde de manière aussi juste que poignante la question de la dignité dans la fin de vie. Magnifique.
Ne m’oublie pas, d’Alix Garin, Le Lombard, 2021, 23,50 €.
2 Le Droit du sol, d’Étienne Davodeau
Juin 2019. Étienne Davodeau entame une marche de 800 km depuis la grotte préhistorique de Pech Merle à Bure, zone de lutte contre un projet d’enfouissement de déchets nucléaires. La question du sol guide les pas de Davodeau. Que laisse-t-on aux générations futures ? Comment mettre en garde contre les dangers que fait peser le nucléaire sur l’ensemble du vivant ? Récit hybride vertigineux, à cheval entre le témoignage et l’enquête journalistique, Le Droit du sol raconte l’histoire de notre sol commun – et nous invite à le défendre.
Le Droit du sol, journal d’un vertige, d’Étienne Davodeau, Futuropolis, 2021, 25 €.
3 Les Étoiles s’éteignent à l’aube, de Vincent Turhan et Richard Wagamese
Frank a 16 ans. Lorsque son père l’appelle à son chevet pour lui demander de l’aider à accomplir un dernier voyage afin d’être enterré en guerrier dans la montagne selon la tradition du peuple premier Ojibwé, Frank accepte. La longue route qui les attend permettra à Frank de comprendre qui il est et de faire la paix avec ce père alcoolique et absent. Une magnifique adaptation du roman éponyme de Richard Wagamese, qui nous embarque aux confins des terres amérindiennes spoliées et du lien qui unit un père à son fils.
Les Étoiles s’éteignent à l’aube, de Vincent Turhan et Richard Wagamese, Sarbacane, 2022, 24 €.
4 La jeune femme et la mer, de Catherine Meurisse
Au Japon pour une résidence artistique, une jeune femme se heurte au fossé ontologique qui sépare son regard occidental de la nature nippone qu’elle est venue peindre. « Vous ne comprendrez sans doute jamais, puisque vous n’êtes pas d’ici ! », résume d’ailleurs un tanuki croisé au détour d’un chemin. Flirtant avec le cliché sans jamais tomber dedans, Catherine Meurisse dépeint avec beaucoup d’humour et de tendresse cet enchantement de la nature qui échappera toujours aux occidentaux.
La Jeune Femme et la mer, de Catherine Meurisse, Dargaud, 2021, 24 €.
5 Sprague, de Rodolphe et Olivier Roman
L’épopée de deux frères, Niels et Vivian, à travers le désert de boue et de vase, à la recherche de l’or bleu. Car l’eau, tout comme la seconde lune de leur ciel, a mystérieusement disparu de la baie de Sprague où se trouve Goëm, le village de pêcheurs dans lequel ils ont grandi et qui tire toute ses ressources de la mer. Des deux expéditions envoyées en reconnaissance, aucune n’est revenue. Niels et Vivian parviendront-ils à percer ces mystères ? Une très belle adaptation du roman de science-fiction éponyme de Rodolphe paru en 2004.
Sprague, de Rodolphe et Olivier Roman, Daniel Maghen, 2022, 19 €.
6 Sermilik, de Simon Hureau
À 18 ans, Max quitte la France pour s’installer sur la côte est du Groenland, dans le village isolé de Tiniteqilaaq. Le peuple inuit l’accueille et lui enseigne sa langue, ses us et ses coutumes, son art de (sur)vivre sur la glace. Trente ans plus tard, Max habite toujours un Tiniteqilaaq confronté aux menaces de la mondialisation et des dérèglements climatiques. De son trait vif et mouvant, Simon Hureau couche en couleurs pastel la biographique de Max Audibert.
Sermilik, là où naissent les glaces, de Simon Hureau, Dargaud, 2022, 24 €.