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Qui est Jessie Murph, la jeune chanteuse qui scandalise les États-Unis ?

14 août 2025
Par Joséphine B.
Qui est Jessie Murph, la jeune chanteuse qui scandalise les États-Unis ?

« Je veux que tu m’aimes comme si on était en 1965 ». Repérée sur les réseaux sociaux, la chanteuse Jessie Murph se retrouve au cœur d’une vive polémique après la sortie de son titre « 1965 » en juillet dernier. Paroles controversées, clip outrancier, vision rétrograde : à seulement 20 ans, la jeune femme semble avoir un peu trop joué la carte de la provocation, au point d’en faire oublier ses réelles intentions. Explications.

Tout commence sur YouTube. En 2019, Jessie Murph n’est alors qu’une adolescente de 14 ans qui partage ses reprises de chansons, guitare ou ukulélé à la main. Ces premières performances réussies ne tardent pas à attirer l’attention du label Columbia Records, avec lequel elle signera deux ans plus tard.

Peu à peu, l’Américaine originaire de l’Alabama construit son propre univers, dont l’esthétique glamour et sexy ne passe pas inaperçue. Son style musical ? Un mélange de pop, de soul rétro et de R&B, qui convainc tout autant. Extraits de sa première mixtape Drowning (2023), ses deux singles Pray et Always Been You se voient respectivement certifiés or et platine aux États-Unis.

Un début de carrière sous le feu des projecteurs… dont la jeune femme aurait sans doute dû se méfier.

C’était mieux avant, sérieusement ?

Tendrement provocatrice, Jessie Murph sait comment faire parler d’elle – et elle en joue au maximum. Après un premier album, That Aint No Man That’s The Devil, paru en septembre 2024, elle revient le 18 juillet avec Sex Hysteria – un titre qui, d’emblée, annonce la couleur. Ce second opus s’inspire très largement de l’ambiance sixties, à commencer par le look de la chanteuse. Avec sa nuisette ajustée et ses cheveux ultra-crêpés façon Ronnie Spector, elle s’approprie les codes vintage avec brio.

Si sa coiffure XXL ne passe pas inaperçue, c’est bien son morceau 1965 qui capte toute l’attention – et pas forcément pour les bonnes raisons. Noyé sous une pluie de critiques dès sa sortie, le titre a littéralement scandalisé l’Amérique.

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Dans 1965, Jessie Murph incarne la femme des années 60, objectifiée et soumise à son mari. Un personnage qui n’a pas manqué de faire réagir, notamment sur les réseaux sociaux où l’artiste de 20 ans est accusée de glorifier la tradwife. Ce mouvement, de plus en plus populaire aux États-Unis, prône un retour aux valeurs traditionnelles et conservatrices, invitant la femme mariée à se consacrer entièrement au bien-être de son foyer. Une tendance qui divise (nettement) les internautes.

Ainsi, la jeune chanteuse l’affirme : « La cigarette est recommandée et la place de la femme est à la cuisine ». Des paroles qui effacent un demi-siècle d’avancées féministes – et ce n’est pas fini. Dans le refrain, elle se dit prête, par amour, à abandonner certains de ses droits :

« Je veux que tu m’aimes comme si on était en 1965, je pense que j’abandonnerais quelques droits si tu m’aimais comme si on était en 1965. »

Il n’en fallait pas plus pour enflammer une Amérique divisée, dans laquelle les droits des femmes régressent massivement – l’avortement, par exemple, reste interdit dans une dizaine d’États.

Le clip, lui, n’arrange rien. Dans un décor années sixties, une menace au revolver, une scène de bondage et une séquence érotique explicite s’ajoutent à la liste des controverses – la vidéo étant désormais sous le coup d’une restriction d’âge. Gloire à l’oppression et à la soumission ? Le patriarcat s’en frotte les mains… tandis que l’artiste s’enlise un peu plus dans la tourmente.

La réponse piquante de Jessie Murph

Régression manifeste de la condition féminine ? Cri de détresse d’une femme sous emprise ? Critique ouverte du mouvement tradwife ? Sur les réseaux sociaux, les interprétations se bousculent, et les critiques fusent. Face à l’ampleur de la polémique, Jessie Murph n’a d’autre choix que de prendre la parole… à sa façon. Sur TikTok, elle s’exclame : « Cette chanson est une satire, vous êtes tous stupides ou quoi ? ». De quoi faire taire les mauvaises langues.

@jessiemurphhh♬ 1965 – J E S S I E M U R P H

Dans une interview pour Teen Vogue, elle adopte un ton plus modéré, rappelant aux internautes que ce morceau n’est en réalité qu’une « blague » – ce qui, visiblement, a échappé à certains. En s’inspirant de l’ambiance romantique idéalisée des films des années 60, la chanteuse pointe du doigt l’hypocrisie véhiculée par l’industrie du 7e art.

Glorifier la tradwife ? Certainement pas : « Ça, je n’en veux pas. J’aime avoir des droits. Tout spécialement pour les femmes. Le droit sur nos corps », affirme-t-elle. Par ailleurs, elle confie au Los Angeles Time que le titre de son album, Sex Hysteria, est une référence au diagnostic d’« hystérie » établi dans les années 50-60 – une pathologie inventée pour contrôler les femmes jugées déviantes ou « trop » indépendantes.

Jessie Murph aurait pu s’arrêter aux mots… mais ce serait mal la connaître. Invitée du late-night show de Jimmy Fallon le 22 juillet, la jeune femme a livré une prestation remarquée sur 1965 – histoire de remuer davantage le couteau dans la plaie.

En minirobe et collants roses, une coiffure à la Priscilla Presley, sa performance divise à nouveau : « Je me fiche que ce soit censé être ironique ou satirique, je déteste ça », « C’est pas une parodie ? », « On dirait du mauvais Amy Winehouse », peut-on lire sous un extrait partagé sur le réseau social X.

Alors, provocation maladroite ou revendication féministe ? Quoi qu’il en soit, une femme se retrouve (encore) obligée de se justifier.

Quand l’image de la femme fait débat

Dans l’industrie musicale – comme dans bien d’autres univers –, les femmes, dès lors qu’elles osent bousculer les codes, se voient contraintes de s’expliquer.

La polémique autour de Jessie Murph rappelle étrangement celle de Sabrina Carpenter : à l’annonce de son septième album Man’s Best Friend (à paraître le 29 août), elle s’est attiré les foudres des internautes. La raison ? Une pochette montrant la star de la pop en robe courte et talons noirs, à quatre pattes, les cheveux tenus par un homme anonymisé.

Accusée de desservir la cause des femmes, de cultiver les stéréotypes, ou pire, de glorifier la domination masculine, Sabrina Carpenter revendique fièrement ses choix, son droit à disposer librement de son corps et de sa sexualité. Jouer avec le regard des hommes ? C’est devenu sa marque de fabrique.

Mais alors, comment expliquer la controverse autour des messages de Carpenter et de Murph ? Pourquoi leurs intentions sont-elles si mal interprétées ? Selon Arwa Mahdawi, chroniqueuse pour The Guardian : « À l’heure actuelle, alors que les images sexualisées sont omniprésentes, que les droits des femmes sont violemment remis en cause aux États-Unis et que les droits des femmes font l’objet d’une forte opposition dans le monde entier, la pochette de Carpenter ne renverse rien. »

Aujourd’hui, détourner des sujets tabous comme la sexualité reste source de polémiques – d’autant plus lorsqu’on est une femme. Dans une société où la condition féminine demeure fragile, rire de tout s’avère particulièrement risqué… Et ça, Jessie Murph l’avait-elle anticipé ?

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Article rédigé par
Joséphine B.
Joséphine B.
Rédactrice fnac.com
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