Après un trop long moment d’absence, Julien Doré revient avec un nouvel album faisant écho à la manière dont il s’est fait connaître à la Nouvelle Star en dévoilant chaque semaine des reprises plus originales les unes que les autres. « L’imposteur » (on reconnaît son humour) est composé de reprises très variées et très inventives. On vous explique pourquoi cet album est l’oeuvre d’un véritable artiste et non d’un imposteur.
Nouvelle star : génie ou imposteur ?
Nous sommes en 2007 et Julien Doré participe à la sélection de Marseille pour l’émission La Nouvelle Star. Au départ, il ne souhaite pas forcément être retenu, voulant simplement faire un peu de pub à son groupe à une heure de grande écoute. Pour ce faire, il se présente avec son ukulélé où le nom de son groupe apparaît. D’ailleurs, il est d’abord refoulé car le jury ne veut pas qu’il chante en s’accompagnant. Après insistance de Virginie Efira, Julien Doré chante a capella et est sélectionné. La suite, c’est une succession de reprises qui fascine le public, séduit et intrigué par l’artiste. Il ressort gagnant de cette saison. Le tourbillon se met en marche et, comme dans tout succès fulgurant, les critiques affluent : les uns crient au génie, notant le côté décalé et original de ses reprises, les autres parlent de l’artiste d’un seul titre ? Doué pour les reprises mais après ? Finalement, Julien Doré n’est-il pas un imposteur ? L’intéressé a douté lui-même.
Pendant la tournée de l’album Aimée, Julien Doré a une idée qui lui trotte dans la tête. Cela fait 15 ans qu’il a gagné La Nouvelle Star. S’il faisait un album de reprises… L’idée germe et devient, au fil des mois, réalité.
Imposteur ou l’exercice de la reprise
Quelles chansons choisir ? Il y en a tellement qui lui arrivent à l’esprit ! Trop peut-être. Après une première sélection, une liste de 100 chansons apparaît. C’est encore trop. Au final, 24 chansons sont retenues, 17 qu’on retrouvera sur l’album et 6 de plus réparties sur les versions alternatives.
Si les choix semblent assez éclectiques, c’est que l’intéressé a des goûts pluriels. En revanche, ces chansons ont un point commun: elles occupent toutes une place importante dans le cœur de Julien Doré. On retrouve d’abord l’amour et le respect qu’il porte à certains artistes comme Mylène Farmer dont il est fan (Pourvu qu’elles soient douces). On reconnaît l’humour de l’artiste avec le choix d’un titre comme Cuitas les bananas de Philippe Risoli, morceau qui n’est pas resté dans la mémoire collective. Il y a aussi les chansons qui lui rappellent son adolescence comme Toutes les femmes de ta vie des L5, Les démons de minuit d‘Images ou Femme like U de K-Maro. Certaines ont une résonance personnelle comme Les yeux de la mama de Kendji Girac qu’il dédie à sa mère ou Ah, les crocodiles qu’il reprend pour son fils.
Des duos partagés
Cet album de reprises est avant tout un album de duos. Julien Doré a par exemple fait appel à Francis Cabrel pour reprendre Un homme heureux de William Sheller. Une collaboration qui prend tout son sens quand on sait que ces deux hommes partagent une même vision de la vie, loin du tumulte de la ville, du showbusiness et aux côtés des leurs. Pour la reprise de Sara Perche ti amo, il a choisi une artiste pétillante comme Hélène Ségara aux racines latines. Enfin, l’invitée de prestige est l’actrice Sharon Stone. Ils s’étaient rencontrés il y a quelques années à Cannes, alors que le chanteur n’était pas encore si connu. La star américaine s’était néanmoins arrêtée devant le piano de Julien Doré et l’avait écouté. Lorsqu’il décide de reprendre Paroles, Paroles, célèbre chanson de Dalida et Delon, il appelle l’actrice. D’abord fébrile car non chanteuse et pas très à l’aise dans la langue de Molière, elle accepte de relever le défi, l’un des plus grands de sa carrière, à ses dires. Enfin, on retrouve aussi des titres qu’il avait déjà re-créés lors de l’émission et qui avaient été remarqués, tels Moi Lolita d’Alizée et Mourir sur scène de Dalida.
Tout cela semble alléchant, me direz-vous, mais est-ce que cet album vaut vraiment la peine d’être écouté ? Ne s’agit-il pas pour Julien Doré d’une énième imposture ? Ma réponse est catégorique. Oui cet album vaut vraiment le détour car l’intéressé s’est vraiment investi dans la recherche d’arrangements nouveaux, de nouvelles manières d’aborder des titres mille fois entendus.
Non, Julien Doré n’est aucunement un imposteur. En décortiquant ces morceaux, il remet en avant des textes dont on n’avait pas forcément retenu l’éventuelle valeur, plus happé par le rythme que par le verbe. Le travail est minutieux, recherché et donne un éclairage nouveau à des chansons auxquelles on n’avait pas forcément porté attention. On pourrait même dire que Julien Doré redonne à la chanson populaire française quelques lettres de noblesse que l’histoire lui a parfois retirées.
De fait, Imposteur est l’œuvre d’un artiste qui n’a plus peur de rien. Plus peur d’oser encore et encore les mélanges et réussir à faire se côtoyer Un homme heureux et Sous les sunlights des tropiques. C’est un vrai album, avec tout son sens créatif. Au-delà des reprises, on y trouve une véritable conception, une invention artistique au même niveau que la production d’un album de chansons originales. Que cela soit gravé dans la pierre, à jamais : Julien Doré est un inventeur, un novateur. L’artiste, dont certains appréciaient le côté décalé et profondément sincère dès La Nouvelle Star, prouve une nouvelle fois toute la légitimité qu’il a acquise depuis.