L’instant Lire à la Fnac : le rendez-vous de toutes les littératures à ne pas manquer. Baptiste Liger, directeur de la rédaction du magazine Lire Magazine Littéraire, partage ses conseils de lecture. Les créateurs des grands personnages de la bande dessinée n’ont pas forcément le monopole de leurs héros. C’est parfois regrettable, mais parfois ça peut être formidable, la preuve.
L’instant Lire à la Fnac : le rendez-vous de toutes les littératures à ne pas manquer. Baptiste Liger, directeur de la rédaction du magazine Lire Magazine Littéraire, partage ses conseils de lecture. Les créateurs des grands personnages de la bande dessinée n’ont pas forcément le monopole de leurs héros. C’est parfois regrettable, mais parfois ça peut être formidable, la preuve.
Les héros de BD revisités
Baptiste Liger : « Eh oui, les personnages de bandes dessinées évoluent avec les années. Le meilleur symbole, c’est probablement Batman, car il n’y a pas un Batman mais différentes versions de l’homme chauve-souris. Celui de Frank Miller n’a rien à voir avec celui de Dave McKean, par exemple.
Même chose pour le manga Astro Boy, pour prendre un cas bien connu de tous, il a varié selon les périodes.
Si on connaît ce système dans le cas de la bande dessinée étrangère, c’est la même chose, et on a tendance à l’oublier dans le cas de la BD franco-belge.
Il y a tout d’abord les reprises très traditionnelles, très codifiées avec un cahier des charges bien précis, à l’image des derniers albums des dernières aventures d’Astérix signées Jean-Yves Ferri et Didier Conrad qui respectent pratiquement à la lettre tout l’esprit d’Uderzo.
Même chose pour les Blake et Mortimer d’Edgar P. Jacobs qui a été repris quasiment à l’identique que ce soit par Ted Benoit ou François Schuiten.
Et puis on peut songer aussi à Lucky Luke, les derniers albums de Lucky Luke signés Jul et Achdé. D’ailleurs Lucky Luke est un des éléments de cet automne rayon neuvième art avec Un Cow-boy dans le coton, quoique non, Lucky Luke ce n’est pas un bon exemple.
Le célèbre cowboy imaginé par Morris et Goscinny a eu droit à des relectures assez étonnantes signées Matthieu Bonhomme avec L’Homme qui tua Lucky Luke ou bien encore Guillaume Bouzard et sa potacherie, dans ma mémoire très plaisante, Jolly Jumper ne répond plus.
Restons dans l’Ouest avec Blueberry, le célèbre héros de Jean Giraud Mœbius. Lui, il a été réimaginé par un duo star, s’il vous plaît, Christophe Blain, Joann Sfar.
Enfin, comment oublier ce véritable chef d’œuvre de la bande dessinée qu’est le Spirou d’Émile Bravo qui a été à la fois plébiscité par le public et par la critique. À se demander si Franquin n’offre pas, au fond, une base assez formidable pour tous les créateurs qui voudraient emprunter son univers.
La Bête, le nouveau Marsupilami de Frank Pé et Zidrou
Après Émile Bravo donc, c’est Frank Pé et Zidrou qui nous offrent un album hommage au Marsupilami en tout cas un Marsu comme vous ne l’avez jamais vu. Lorsqu’on prononce le nom de cet animal, on a naturellement tendance à penser à des aventures exotiques et comiques pour un public enfantin. Or, ce que Frank Pé et Zidrou choisissent c’est l’opposé. À savoir, un grand mélodrame social dans la Belgique des années 50. Non, non, non, ne fuyez pas !
Le premier tome de ce nouveau Marsupilami intitulé La Bête se concentre sur la relation amicale entre ce petit garçon qui est le souffre-douleur de ses camarades et cet animal qui a été capturé et qui s’est échappé sur le port d’Anvers.
Dès les premières planches, on voit que l’on est face à un projet loin de ce qu’on pouvait imaginer. Les couleurs sont plus sombres, tout comme les traits, tout comme l’univers en général. Et la grande intelligence de cet album, c’est justement de jouer avec nos souvenirs de lecteurs du Marsupilami, son côté très bariolé, son côté léger et le côté véritablement dramatique de la présente histoire avec une esthétique quasiment expressionniste par instants.
Le contraste pourrait être très artificiel mais on l’oubli au bout de quelques pages car l’histoire est forte, le projet esthétique l’est tout autant et on est emballés de bout en bout. Qui aurait pu croire, franchement, qu’on aurait fini en larme avec une aventure du Marsupilami ? Franchement ? Bref, autant dire que Frank Pé et Zidrou ont assurés comme des bêtes, voilà. Alors un message personnel pour eux, Houba houba ! »