On connaissait les enfants soldats, ces enfants à l’enfance volée, enrôlés par des chefs de guerre, en Afrique, en Asie. Le phénomène que décrit Roberto Saviano y ressemble. Les enfants, héros de Piranhas, sont au service du crime organisé, dealers, trafiquants, tueurs, voleurs.Llourdement armés, ils défient leurs aînés. Ils sévissent à Naples, mais aussi ailleurs…
Une fiction réaliste
Après le très célèbre Gomorra, enquête sur la Camorra, la mafia napolitaine, Extra Pure, une plongée dans le trafic mondial de la cocaïne, et Le Contraire de la mort, deux récits sur la pauvreté à Naples, le journaliste Roberto Saviano nous livre un premier roman : Piranhas. Mais s’il s’agit de fiction, les bases de l’histoire sont (malheureusement) plus que véridiques. Elles proviennent des recherches de l’auteur sur la criminalité des très jeunes, qui prend un essor inquiétant à Naples comme dans d’autres grandes métropoles dans le monde.
Vivre vite, mourir jeune
Roberto Saviano nous plonge dans l’univers effrayant des Piranhas, dans le quartier de Forcella à Naples. D’une plume efficace, il nous en livre les codes et nous suivons les méfaits de Nicolas Fiorillo, alias Maharaja, jeune chef d’un gang dont les membres ont entre 10 et 18 ans. Cruels, incontrolables et téméraires, les Piranhas s’identifient à des héros de films ou de jeux vidéo. Mais quand ils tuent, tabassent, volent ou rackettent, ce n’est plus un jeu et peu leur importe si la mort se trouve au bout du chemin. L’important étant de se faire un nom, de devenir riche et puissant.
Une nouvelle criminalité
Dans Gomorra, Roberto Saviano montrait des jeunes utilisés comme auxiliaires de la mafia et dont la seule perspective d’avenir était de monter les échelons pour devenir un membre à part entière de la Camorra, considérée comme une alternative à la misère, évoquée dans Le Contraire de la mort. Mais la situation a changé : à l’âge où leurs ainés entraient par la petite porte, les Piranhas défient des chefs pour prendre leur place, ils ont leurs propres bandes, toutes aussi redoutables que celles des adultes. Par le biais d’un roman, Roberto Saviano ne nous décrit rien moins qu’un nouveau visage de la criminalité.
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Paru le 4 octobre 2018 – 368 pages
Traduit de l’italien par Vincent Raynaud